Intervention de Caroline Abadie

Séance en hémicycle du mardi 5 octobre 2021 à 15h00
Interdiction des pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCaroline Abadie :

Il est des évidences qu'on aimerait s'épargner : non, une orientation sexuelle n'est pas une maladie ; non, une identité de genre n'est pas une maladie. Il n'y a rien à guérir – ou alors, la seule chose qu'il faut peut-être soigner, c'est l'homophobie et la transphobie de certains. Pourtant, depuis quelques années, les témoignages sont de plus en plus nombreux à nous alerter, de la part de femmes et d'hommes dont l'entourage familial, médical ou spirituel voudrait, contre leur gré, les convertir à une autre orientation sexuelle ou à une autre identité de genre – comme si cela relevait d'un choix, d'une volonté ou d'une opinion, alors qu'on touche ici à la nature la plus profonde et la plus intime de l'être. S'il n'y a rien à guérir, il n'y a rien non plus à convertir.

Rappelons-le : ni les brimades, ni les insultes, ni les coups, ni les électrochocs, ni les exorcismes, ni les mariages forcés n'ont d'utilité ou d'efficacité pour faire entrer des gens dans des cases déterminées. Ce ne sont que des violences intolérables, aux effets dévastateurs, qui brisent des vies. Nous avons décidé de nous y attaquer avec cette proposition de loi.

Au nom du groupe La République en marche, je tiens à remercier notre rapporteure. Chère Laurence Vanceunebrock, merci d'avoir lancé l'alerte, dès le début de la législature, sur un phénomène qui commençait à peine à être connu ; merci de l'avoir étudié avec sérieux, dans le cadre d'une mission d'information menée avec Bastien Lachaud ; merci d'avoir partagé avec nous vos analyses et vos conclusions, toujours avec tact et pédagogie concernant un sujet si sensible.

L'ONU avait lancé le mouvement en 2015, et le Parlement européen avait suivi en 2018. Grâce à ce travail, c'est aujourd'hui au tour de la France : nous serons l'un des premiers pays européens, avec l'Allemagne, Malte et la Belgique, à nous attaquer sans détour à ces méthodes barbares. En créant un délit spécifique pour ces dernières, nous envoyons un double message. À ceux qui ont subi ces pratiques d'un autre âge, nous disons : « Oui, vous êtes victimes ; oui, nous sommes avec vous ; oui, nous vous protégerons. » À ceux qui leur infligent ce qui relève parfois de la torture physique ou psychologique, nous disons : « Vous n'êtes pas des thérapeutes ; vous n'êtes pas des guides spirituels ; vous êtes des charlatans ; vous êtes des délinquants. Vous serez poursuivis et sanctionnés pour les âmes et les corps que vous avez abîmés. »

Nous nous réjouissons que ce texte, défendu par le groupe La République en marche, ait été inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée. Cela témoigne de la mobilisation du Gouvernement, et nous vous remercions, madame la ministre déléguée, chère Elisabeth Moreno, pour votre engagement grâce auquel cette proposition de loi se concrétise.

Nous proposerons de compléter le dispositif, tout d'abord en répondant à une forte attente exprimée par la majorité en commission : il s'agira de renforcer les sanctions lorsque les actes incriminés touchent des mineurs ou des personnes particulièrement fragiles en raison de leur état de santé. On sait le rôle de la contrainte et de l'emprise dans ces mécanismes. Il est notre devoir d'en protéger les plus vulnérables.

Nous proposerons ensuite de reconnaître aux associations la capacité d'agir en justice, car elles se mobilisent toujours aux côtés des victimes. Il faut un effort immense à ces dernières pour briser le silence, et le soutien des associations est essentiel dans leur parcours de résilience et de reconstruction. Comme pour les autres discriminations, les associations ont toute leur place pour porter la voix des victimes – nous proposerons un amendement en ce sens.

La proposition de loi constitue un outil supplémentaire pour les forces de l'ordre et la justice, afin de lutter plus efficacement contre les violences visant les LGBT. Elle s'inscrit dans un cadre plus large, celui du combat que nous menons depuis le début de la législature contre les discriminations et pour l'égalité réelle des droits. Elle succède à l'ouverture de la PMA aux couples de femmes, ainsi qu'à notre lutte contre les mariages forcés ; elle s'accompagne évidemment d'une hausse des moyens de la DILCRAH pour ses missions d'éducation et de sensibilisation.

Avec gravité face aux souffrances éprouvées, mais aussi avec la fierté de faire avancer la dignité, le groupe La République en marche soutiendra l'adoption de la proposition de loi.

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