Je vais m'exprimer à propos de ces deux amendements et demander à Aurore Bergé de les retirer, mais je voudrais prendre un peu de temps pour expliquer ma position.
Je rappelle tout d'abord que le plafonnement à 9 % du rabais qui peut être consenti aux collectivités locales a été introduit dans la loi en 2003. Avant cette date, le rabais n'était pas plafonné et les entreprises qui fournissaient des collectivités se livraient entre elles à un combat féroce.
L'objectif d'un tel plafonnement était et reste de permettre à une grande diversité d'entreprises de trouver leur place sur le marché des ventes de livres aux collectivités. Je constate d'ailleurs que les libraires continuent de répondre aux marchés des bibliothèques ; c'est la preuve qu'ils considèrent encore cette part de leur activité comme rentable, et donc que l'objectif de la loi de 2003 est atteint. Il n'y a donc pas lieu de modifier ce paramètre.
Votre proposition, madame la députée, consiste à faire évoluer le rabais de 9 %, non pour garantir la diversité des opérateurs sur les marchés publics des collectivités, mais pour améliorer la rentabilité générale des librairies. J'y suis défavorable pour deux raisons.
D'abord, une telle mesure aurait pour effet – cela a été dit – de renchérir le coût d'acquisition des livres pour les bibliothèques des collectivités territoriales, ce qui constituerait un virage à 180 degrés par rapport à l'esprit du texte que nous nous apprêtons à adopter. Il me semble que les tensions pesant sur le budget des collectivités doivent nous inciter à la prudence : nous constatons année après année que les crédits alloués au budget d'acquisition des bibliothèques ne sont pas en hausse, c'est pourquoi j'ai instauré une aide spécifique de 10 millions d'euros sur deux ans dans le plan de relance, afin d'aider les collectivités à renouveler leurs collections de livres imprimés.
Ensuite, la mesure conduirait à ponctionner le budget des collectivités locales. Il est vrai que si les libraires pouvaient vendre leurs livres plus cher aux bibliothèques, leur rentabilité serait améliorée. Mais les librairies ne sont pas les seules entreprises qui vendent des livres aux bibliothèques ! La rentabilité des grossistes et des opérateurs spécialisés, qui ne rencontrent pas du tout les mêmes difficultés, serait également améliorée. Une telle mesure ne me semble donc pas optimale eu égard à l'exigence de bon usage des deniers publics.
Il me semble enfin que l'article 2 de la proposition de loi, qui permet aux communes et à leurs groupements de soutenir les librairies de leur territoire, constitue un outil adapté pour cibler les détaillants de livres qui en ont le plus besoin. Pour toutes ces raisons, je sollicite le retrait de vos deux amendements.