Je me réjouis de prendre la parole dans cet hémicycle : la protection des abeilles est un enjeu qui me tient à cœur, et éminemment d'actualité.
Soyez assurés que, si l'enjeu peut encore paraître mineur à certains, il nous concerne toutes et tous. Pour illustrer son caractère central pour nos modèles économiques comme pour notre environnement, je crois nécessaire de convoquer quelques chiffres : 35 % de ce que nous mangeons dépend de la pollinisation par les insectes ; près de 90 % des plantes à fleurs dans le monde dépendent, au moins en partie, de la pollinisation par les insectes ; 70 % des cultures dépendent de la pollinisation ; 40 % de la valeur économique agricole est directement liée au niveau de pollinisation ; en France, près de 55 000 apiculteurs entretiennent 1 360 000 colonies.
Malgré la multitude de services écosystémiques que nous rendent les abeilles, leur mortalité en hiver est de 20 % à 30 %. Vous l'aurez compris, nous sommes confrontés à un défi environnemental, sanitaire, sécuritaire, économique et social majeur.
Les causes de ce déclin, nous les connaissons de longue date. La première d'entre elles, ce sont les effets néfastes de notre agriculture intensive sur les écosystèmes et en particulier sur les pollinisateurs. Viennent ensuite le dérèglement climatique, les activités humaines et l'exploitation des territoires modifiant les milieux et le fonctionnement des écosystèmes, les dangers biologiques, les prédateurs et parasites, entre autres. Parmi ces derniers, les frelons asiatiques, prédateurs majeurs des colonies d'abeilles, sont présents sur le territoire français depuis 2003 et prolifèrent de manière inquiétante depuis.
Face à ce déclin préoccupant, nous ne sommes pas restés inactifs. Dès 2017, lors des états généraux de l'alimentation, la nécessité d'adopter des modes de cultures davantage respectueux des écosystèmes a été soulignée. L'atelier n° 1, dédié à la qualité environnementale de notre alimentation, l'atelier n° 11, dédié à la transition écologique du secteur agricole, ou encore l'atelier n° 14, dédié à la performance environnementale du secteur, se sont tous attelés à dégager des solutions concrètes permettant de protéger nos écosystèmes. La loi EGALIM, votée en 2018, a ainsi consacré notre volonté d'accroître la qualité de notre modèle alimentaire, la transition agroécologique étant essentielle à la notion de qualité.
En juin dernier, notre ministre de la transition écologique, Barbara Pompili, et notre ministre de l'agriculture et de l'alimentation, Julien Denormandie, ont lancé de façon conjointe une consultation publique nationale en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation. Le plan Pollinisateurs contiendra des mesures ambitieuses pour la protection des habitats et la restauration des services écologiques rendus par la pollinisation.
Je salue tout particulièrement le travail fourni dans ce cadre.
Encore plus récemment, la loi climat et résilience a réaffirmé la nécessité d'opérer une transition agroécologique rapide et efficace, en luttant contre les dérèglements à venir mais également en s'adaptant à ces bouleversements. En cela, les pollinisateurs constituent un levier majeur de notre capacité d'adaptation, le secteur agricole ne pouvant s'en passer.
Plus généralement, il s'agit d'assurer l'intégrité des écosystèmes et de la biodiversité, sans laquelle la vie humaine ne peut perdurer.
Enfin, le frelon asiatique figure désormais dans la liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes, adoptée en 2016 par l'Union européenne. Des opérations de lutte inscrites au code de l'environnement sont à l'œuvre depuis cette date. En 2018, un arrêté a inscrit le frelon asiatique sur la liste des espèces réglementées. Nous agissons donc à l'encontre de sa prolifération et continuerons de le faire.
C'est dans ce contexte législatif et réglementaire que nous examinons une proposition de résolution à l'initiative de notre collègue Robert Therry du groupe Les Républicains, laquelle rappelle ces enjeux et propose deux mesures : inviter le Gouvernement à déclarer la sauvegarde des abeilles grande cause nationale 2022 et l'encourager à réfléchir à l'élaboration d'un plan national de lutte contre le frelon asiatique.
Au vu du contexte que je viens de présenter, nous conviendrons toutes et tous du caractère systémique de l'action de protection des populations de pollinisateurs. Aussi les deux mesures proposées n'interviennent-elles qu'en complément de l'ensemble des actions que nous avons déployées depuis le début de notre mandat. Elles ne traduisent qu'une vision partielle de cette problématique qui exige des adaptations au sein de l'ensemble des secteurs économiques possédant un impact sur le déclin observé.
Mais force est de constater que les deux mesures proposées par la proposition de résolution font écho à une urgence. La perception de cette urgence est désormais transpartisane, quasi consensuelle, et je m'en réjouis. C'est pourquoi je voterai pour cette proposition de résolution, qui traduit un engagement écologique grandissant de la représentation nationale.