Intervention de Frédérique Vidal

Séance en hémicycle du jeudi 7 octobre 2021 à 15h00
Création d'un ticket restaurant étudiant — Présentation

Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation :

Nous sommes réunis en cette fin d'après-midi pour examiner la proposition de loi visant à créer un ticket restaurant étudiant. Ce texte, adopté par le Sénat le 10 juin dernier, prévoyait dans sa rédaction initiale de créer un ticket restaurant dont pourraient bénéficier tous les étudiants. Son examen en première lecture au Sénat a permis d'affiner le dispositif et d'en préciser les contours, le limitant aux étudiants n'ayant pas accès à une structure de restauration universitaire sur leur territoire. Les débats nourris et constructifs que nous avons eus au Sénat se poursuivent aujourd'hui et je suis convaincue que nous parviendrons ensemble à trouver une solution d'équilibre qui puisse répondre le plus efficacement et le plus largement possible à un problème que nous avons tous identifié comme essentiel : l'accès des étudiants, où qu'ils se trouvent sur le territoire, à une offre de restauration à tarif modéré.

Car au fond, c'est bien l'objectif que nous poursuivons tous : l'identification de « zones blanches » de la restauration universitaire et la mise en place de solutions adaptées propres à chacun des territoires identifiés, permettant de résorber les lacunes. C'est pourquoi je me réjouis que la commission des affaires culturelles et de l'éducation ait adopté, la semaine dernière, un amendement qui conforte et élargit cette ambition. Un amendement qui ne se cantonne pas à un outil, mais qui reconnaît la pluralité des outils et leur complémentarité, tout en rappelant le rôle prédominant et essentiel des CROUS (centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires) dans cette dynamique.

Je voudrais rappeler, pour introduire les débats, que la lutte contre la précarité alimentaire est une des priorités du Gouvernement. La crise sanitaire a aggravé et mis en lumière de trop nombreuses situations de fragilité. Nous avons créé tous les dispositifs pour y répondre, pour que se nourrir et avoir accès à trois repas par jour ne soit pas un parcours du combattant, mais soit garanti pour toutes et tous.

À la rentrée de septembre 2020, nous lancions ainsi le ticket de restauration universitaire à un euro pour les étudiants boursiers. En janvier, suite aux annonces du Président de la République, le bénéfice de ce dispositif était élargi à l'ensemble des étudiants – boursiers et non boursiers – et aux étudiants internationaux pour deux repas par jour. Entre janvier et septembre, 14,4 millions de repas ont ainsi été servis par les CROUS, partout sur le territoire. En cette rentrée, nous maintenons ce ticket à un euro pour tous ceux qui en ont besoin – boursiers et étudiants en difficulté –, les autres bénéficiant d'un tarif social modéré à 3,30 euros.

L'instauration de cette mesure et sa poursuite sont emblématiques de la mobilisation des CROUS et de leur personnel durant la crise. Le réseau des œuvres, partout sur le territoire, a fait preuve d'une réactivité et d'une adaptabilité remarquables. Je tiens à saluer leur engagement sans faille au service des étudiants de notre pays. Ils ont permis le déploiement effectif du ticket à un euro ; ils se sont mis en ordre de marche pour proposer de nouveaux services, comme la vente à emporter, la livraison, l'installation de camions de distribution et le click and collect. Grâce à eux, au plus fort de la crise, les restaurants universitaires ont pu ouvrir en respectant des protocoles sanitaires très exigeants. Aucun autre pays européen n'a déployé de tels dispositifs dans de telles conditions.

Le sujet qui nous réunit aujourd'hui met à nouveau le réseau des œuvres au centre des discussions. Je le rappelle et je l'affirme devant vous sans ambiguïté, le CNOUS (Centre national des œuvres universitaires et scolaires) et les CROUS sont les acteurs majeurs de la restauration étudiante de notre pays. Le Gouvernement n'engagera aucune démarche qui puisse les fragiliser ou remettre en cause les missions fondamentales qu'ils assurent. Les restaurants universitaires sont déjà présents dans plus de 200 villes en France ; ce sont près de 800 structures accessibles sur le territoire ; sur les quelque 2,8 millions d'étudiants accueillis dans l'enseignement supérieur, plus de 2,3 millions comptent au moins un restaurant universitaire dans leur environnement immédiat. Les étudiants sont 80 % à plébisciter l'offre de restauration des CROUS et l'activité des restaurants universitaires augmente en moyenne de 5 % par an hors période de crise.

L'offre des restaurants universitaires ne cesse de s'enrichir pour répondre aux attentes des étudiants, avec des repas complets et équilibrés, des menus végétariens et des produits de qualité, dans une démarche de développement durable. Elle permet de partager des repas dans un cadre collectif et convivial ; elle favorise le lien social et l'échange. On ne parle plus d'offres de restauration, mais bien d'un accompagnement social et humain, indispensable pour la réussite et le bien-être.

Oui, madame la rapporteure, il existe encore des zones blanches de restauration universitaire et ce sont bien les CROUS qui, une fois encore, sont les acteurs qui les identifient et mettent en œuvre les solutions pour y remédier. La solution, désormais mentionnée dans le texte issu de la commission, est celle du conventionnement avec d'autres structures de restauration. Les CROUS organisent ainsi des politiques d'agrément et de conventionnement pour permettre aux étudiants de bénéficier de structures de restauration telles que les cantines administratives, scolaires ou hospitalières, qui sont soumises aux mêmes exigences de qualité de service public. Les CROUS l'ont déjà fait pour 183 structures qui bénéficient d'un agrément et poursuivent résolument cette dynamique. Depuis la rentrée, une dizaine de sites supplémentaires sont en cours de conventionnement.

À Creil, à Châteaubriant, à Dieppe, à Draguignan, à Guéret, à Mende, à Morlaix, à Saint-Lô, à Vienne ou à Privas, les CROUS offrent le bénéfice de ces conventions aux étudiants. Les CROUS d'Amiens, de Normandie, de Nice, de Limoges, de Montpellier, de Rennes ou de Grenoble se sont engagés dans cette dynamique. Je tiens à saluer leur action à tous au service des étudiants éloignés des grandes métropoles universitaires. Elle permettra aux étudiants en soins infirmiers, en IUT (instituts universitaires de technologie), en INSPÉ (instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation), qui n'avaient pas accès à un service de restauration, de bénéficier de la tarification sociale. C'est cette dynamique qu'il nous faut poursuivre.

Oui, vous avez encore raison, madame la rapporteure, nous devons proposer aux étudiants des solutions plus immédiates, adaptées aux territoires, partout où ces conventionnements commencent à s'appliquer ou sont sur le point de l'être. Mais je ne crois pas qu'il puisse exister une solution unique et uniforme qui pourrait se décliner sur l'ensemble du territoire. Mon ministère est celui de l'adaptation, qui fait confiance aux acteurs de terrain, et je voudrais que cette façon de fonctionner irrigue non seulement le système d'enseignement supérieur, mais aussi tous les volets de la vie étudiante et de campus.

La crise nous a montré que nous pouvions compter sur l'engagement et la complémentarité de l'ensemble des acteurs pour trouver les meilleures solutions pour les jeunes, par le biais d'une approche globale de l'étudiant en travaillant avec les collectivités territoriales. C'est pourquoi le dispositif proposé par la commission me paraît répondre parfaitement aux enjeux.

L'aide financière créée pour les étudiants qui n'ont pas encore accès aux structures conventionnées pourra ainsi prendre plusieurs formes et s'adapter aux besoins du terrain et aux solutions déjà existantes. Je pense aux bons alimentaires utilisables auprès de structures et de services de restauration agréés, mais aussi auprès d'épiceries sociales et solidaires. Ces bons pourront être demandés auprès des CROUS dès lors que l'établissement de l'étudiant se situe dans une zone blanche, définie chaque année par arrêté. Afin de faciliter le plus possible les démarches, une procédure dématérialisée de demande et de délivrance des bons sera organisée.

Enfin, la définition des solutions agréées, permettant de répondre aux besoins locaux, pourra faire l'objet d'une convention tripartite entre établissements partenaires retenus et CROUS. Vous le voyez, la solution de transition proposée est bien concrète ; mes équipes y ont d'ores et déjà réfléchi. Beaucoup d'établissements ayant déjà opté pour de tels dispositifs durant la crise, il nous revient maintenant de les élargir.

Parmi les amendements déposés, certains concernaient la lutte contre la précarité des étudiants sous toutes ses formes. Permettez-moi de rappeler, là encore, que peu de gouvernements ont fait de la jeunesse et des étudiants une priorité aussi marquée en cette période de crise. Dès le premier confinement et la rentrée 2020, nous avons versé des aides exceptionnelles de 200 euros, puis de 150 euros ; nous avons doublé les aides d'urgence des CROUS ; nous avons prolongé le droit à bourse en fonction de l'incidence de la crise sur le cursus ; nous avons réexaminé les situations sociales pour adapter le niveau des bourses ; nous avons créé plus de 20 000 emplois étudiants et prolongé les contrats doctoraux ; nous avons installé, gratuitement, des distributeurs de protections périodiques. Toujours, la vie et le bien-être étudiants ont été au cœur de l'action de mon ministère et c'est bien cette démarche globale, qui envisage la vie étudiante sous toutes ses facettes, que je souhaite poursuivre avec vous, loin des solutions toutes faites ou des postures.

Pour conclure, je veux à nouveau adresser mes remerciements les plus sincères aux CROUS et à leur personnel, mais aussi à l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur et de leurs équipes, dont la mobilisation au service des étudiants a toujours été exemplaire. Je souhaite également remercier les étudiants qui se sont massivement fait vacciner. Cette rentrée à 100 % en présentiel, dont les étudiants et les établissements sont si heureux, ils l'ont rendue possible et ils peuvent en être fiers.

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