« Le monde se sentirait mieux s'il pouvait compter sur l'Europe, une Europe s'exprimant d'une seule voix […] pour faire entendre, chaque fois que c'est nécessaire, un message de tolérance et de modération, d'ouverture sur les différences, et de respect des droits de l'homme. » Cette phrase, prononcée par Valéry Giscard d'Estaing lors de la Convention sur l'avenir de l'Europe, en 2002, trouve aujourd'hui un écho particulier alors que, moins d'un an après sa disparition, la France a été à l'initiative d'une conférence sur l'avenir de l'Europe dont les résultats seront présentés lors de la présidence du Conseil de notre pays au semestre prochain. Le groupe UDI et indépendants a d'ailleurs demandé l'organisation d'un débat au sein de cet hémicycle sur ce sujet ô combien important et nous espérons, monsieur le secrétaire d'État, qu'une telle initiative pourra aboutir.
À la veille de cet événement majeur que constitue la présidence française, les sujets d'actualité pour l'Europe ne manquent pas, à commencer par la flambée des prix de l'énergie qui touche durement nos concitoyens depuis plusieurs semaines. Si les apports du marché européen de l'énergie sont indéniables, il s'agit aussi pour la France de porter une voix raisonnable, alors qu'aujourd'hui tous les citoyens paient le prix d'un marché européen mal préparé. Oui, cette crise doit nous pousser à la sobriété, à la rénovation de nos logements et à la construction rapide d'énergies décarbonées, mais aussi à réfléchir à une révision du marché, en commençant par s'interroger sur cette logique du prix marginal qui conduit les consommateurs à payer le prix du mode de production le plus cher, à savoir le gaz, alors que celui-ci ne représente que 20 % de la production européenne. Notre pays doit également pousser à la création d'une centrale européenne d'achat du gaz pour éviter la dispersion des contrats dans un marché totalement connecté. Sans ces changements, nous prenons tous le risque de voir certains de nos concitoyens remettre en cause une politique ambitieuse de l'Europe en matière environnementale, laquelle doit pourtant être mise en œuvre au plus vite.
Un des volets de la politique européenne environnementale concerne plus particulièrement notre agriculture. De nombreuses voix s'élèvent contre la stratégie dite « De la ferme à la fourchette », qui sera prochainement examinée au Parlement européen. Les objectifs de réduction des pesticides et des intrants, de même que la croissance du bio, sont plus que louables, mais nous devons rester très vigilants à ce que ces mesures ne pénalisent pas nos agriculteurs et surtout à ce que les gains environnementaux de cette stratégie ne soient pas contrebalancés par une augmentation d'importations dont on ne contrôlerait pas l'origine. L'indépendance alimentaire de l'Europe a été durement acquise dans la période d'après-guerre, la remettre en cause serait prendre le risque d'exposer l'Europe à une hausse de prix comme dans le secteur de l'énergie voire, pire encore, à des pénuries. Il est temps d'arrêter de faire de grandes promesses au public sans donner les moyens aux agriculteurs de trouver des pratiques de substitution. On peut à cet égard, pour en venir plus précisément à la question budgétaire, regretter que les fonds de la PAC aient de moins en moins d'importance dans le cadre financier européen, alors que les efforts que l'on demande aux agriculteurs n'ont jamais été aussi importants – je le mesure chaque semaine dans mon département de la Mayenne.
Concernant la contribution française pour cette année 2022, si l'on peut se réjouir de sa stabilité en comparaison avec l'année précédente, je souhaite vous interpeller sur un point, monsieur le secrétaire d'État : nous avons été alertés de la baisse des budgets Erasmus, et des universités notamment vont perdre plusieurs centaines de milliers d'euros qui permettent à des jeunes de voyager dans ce cadre. Alors que 2022 a été décrétée l'Année européenne de la jeunesse par Ursula Von der Leyen, comment une telle baisse est-elle rendue possible ? Que faire pour s'assurer que les étudiants qui souhaitent partir ne soient pas moins nombreux qu'avant la pandémie ?
Je souhaite enfin évoquer la situation en Pologne. Alors que la remise en cause des jurisprudences de la Cour de justice européenne gagne du terrain dans le débat public, l'acte périlleux de la Cour constitutionnelle polonaise nous amène à nous interroger sur le rapport de force que Bruxelles peut maintenant mettre en place avec Varsovie, s'agissant notamment de la question du plan de relance, et ce sans que la population polonaise soit la plus grande perdante des agissements de son gouvernement. La France se doit d'être force de propositions au risque de voir sa présidence du Conseil bloquée par une crise politique majeure.
« Oui nous pouvons rêver et faire rêver d'Europe », disait le président Valéry Giscard d'Estaing. Pour perpétuer cette volonté, le groupe UDI et indépendants votera bien évidemment en faveur de cette contribution française.