Nous nous apprêtons à examiner une nouvelle fois – une onzième fois – un texte qui vise à faire face à la crise sanitaire : il permettra de proroger l'état d'urgence sanitaire – ou, dites-vous, d'en sortir, nous l'avons bien compris… –, et de proroger les outils de gestion de cet état. Il imposera des dispositions relatives à l'état d'urgence sanitaire – ou à sa sortie – au-delà de la fin du quinquennat et de la législature. En définitive, ce texte revient à inscrire trois régimes juridiques d'exception dans notre droit jusqu'à l'été 2022.
Pourquoi faudrait-il proroger l'état d'exception pour si longtemps ? Nous avons prouvé notre capacité à voter un tel régime dans une temporalité très courte – plusieurs d'entre vous l'ont rappelé. Le Parlement est à nouveau consulté dans des conditions plutôt déplorables, alors que le projet de loi, dans son intention, est annoncé depuis le mois de juillet. Élection ou non, nous pouvons nous réunir si nous sommes convoqués, et nous répondrons à ce devoir comme nous l'avons toujours fait. N'y voyez ni de la polémique politicienne, ni une opposition de principe au Gouvernement, monsieur le ministre, mais plutôt la volonté de garantir les principes qui régissent notre État de droit – dont, rappelons-le, nous sommes garants. Il est de notre responsabilité collective de protéger la République et de veiller à ce que les institutions conservent la place qui doit être la leur. Contrairement à ce que j'ai pu entendre, l'interlégislature n'existe pas – elle existe encore moins sachant que la crise dure depuis plus d'un an et demi, et que les outils pour y répondre vont à l'encontre de nombre de nos libertés.
Le covid-19 fait désormais partie de nos communs. Aussi, si nous devons apprendre à vivre durablement avec le virus, devons-nous le faire dans un régime de droit commun. Nous ne pouvons prolonger durablement un régime d'exception qui atteint profondément l'état de droit.