Intervention de Vincent Ledoux

Séance en hémicycle du vendredi 29 octobre 2021 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Action extérieure de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVincent Ledoux, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, je ne m'attarderai pas sur le budget que vous nous présentez : il augmente de 50 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2021, mais prévoit en réalité plus du double de moyens, par rapport à l'évolution tendancielle, pour des mesures nouvelles. Il s'agit d'un bon budget, non pas parce qu'il augmente – cette augmentation était cependant absolument nécessaire pour maintenir la qualité de notre réseau diplomatique –, mais parce qu'il permet de poursuivre la démarche cohérente de modernisation et d'ouverture du Quai d'Orsay que vous avez engagée depuis le début de la législature.

Cette démarche est le prisme à travers lequel j'ai examiné ce dernier exercice budgétaire, dont j'ai retenu quelques traits saillants afin de montrer que, loin de l'image que l'on peut en avoir, notre diplomatie se réforme et s'ouvre, non seulement sur le monde, mais aussi sur la société française. C'est l'un des enseignements que j'ai tirés de ces cinq dernières années, qui m'ont permis, à titre personnel, de découvrir le Quai d'Orsay et les femmes et les hommes qui font fonctionner notre diplomatie.

Cette démarche d'ouverture sur la société doit encore être approfondie : nos concitoyens sont trop peu conscients du lien qui existe entre l'action diplomatique et consulaire et leur vie quotidienne. S'il s'est matérialisé de manière très concrète et efficace lors de la crise sanitaire pour ceux qui ont été rapatriés ou vaccinés à l'étranger, ce lien, pourtant bien réel, est moins évident pour nos compatriotes qui vivent sur le territoire français. Ainsi, dans le domaine culturel, il serait très utile que les Français soient davantage sensibilisés aux projets réalisés par les instituts français à l'étranger.

Pour ma part, au cours de cette législature, j'ai mesuré l'honneur, et le bonheur, que j'avais d'exercer la fonction de rapporteur spécial sur la mission "Action extérieure de l'État" et de pouvoir découvrir, à la faveur de l'élaboration de mon rapport, une maison que je n'aurais jamais pu connaître en tant que simple citoyen. C'est un privilège que j'ai retiré de l'élection. Mon devoir est aujourd'hui de me tourner vers nos concitoyens pour leur présenter cette belle maison qu'est le Quai d'Orsay.

L'une des caractéristiques de ce projet de budget de la mission pour 2022 est la priorité donnée aux ressources humaines, qui constituent le premier atout de notre diplomatie. Vous l'aviez souligné, monsieur le ministre : nous étions à l'os en matière d'effectifs. Je salue donc l'interruption, décidée l'an dernier et confirmée cette année, de la trajectoire de réduction de la masse salariale prévue dans le cadre du programme de transformation Action publique 2022. Le Quai d'Orsay aura tout de même rempli 80 % de son objectif et réalisé des gains d'efficience importants.

Premier point sur lequel je veux insister : la légère augmentation du plafond d'emplois est destinée à doubler le nombre d'apprentis recrutés au Quai d'Orsay. Au-delà d'un objectif commun à l'ensemble des administrations, cette hausse reflète la volonté du ministère de se tourner vers la jeunesse et de diversifier les profils recrutés. C'est également le sens de l'Académie diplomatique d'été, qui permet de faire découvrir les missions et les métiers de la diplomatie à des lycéens et des étudiants que leur milieu familial ne prédispose pas à la carrière diplomatique.

Cette initiative est très intéressante : j'insiste sur la nécessité d'entretenir les liens avec les jeunes passés par cette académie, même s'ils n'expriment pas d'emblée un intérêt pour les métiers de la diplomatie, dont on ne répétera jamais assez qu'ils sont très diversifiés. Je lie cette ouverture à la société et à la jeunesse à la nécessité de renforcer – de muscler ! – la territorialisation de la diplomatie. La présence de diplomates auprès des préfets, à travers les conseillers diplomatiques auprès des préfets de région, contribue à une diffusion des enjeux diplomatiques dans la vie quotidienne que j'appelle de mes vœux. On gagnerait à y associer plus étroitement les exécutifs locaux.

En cohérence avec cette démarche d'ouverture et avec la réforme de l'encadrement supérieur de l'État, l'année 2022 verra la création d'une école diplomatique et consulaire afin de mieux professionnaliser les parcours à tous les stades de la carrière. La création de cette école s'inscrit dans le cadre d'une réforme globale des ressources humaines, dont je salue le souci d'équité entre les différentes catégories d'agents.

Ce souci d'équité n'irrigue pas seulement les mesures salariales, de formation ou de logement social, il doit également être pris en considération dans le cadre de la stratégie de numérisation du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Comme dans de nombreuses administrations et entreprises, la pandémie s'est traduite par une numérisation à marche forcée des services, qui a fragilisé les collectifs de travail. Dans les nouvelles pratiques de fonctionnement à distance qui s'ancrent au quotidien grâce à des outils de sécurisation des communications audio et vidéo, veillons à ce que certaines catégories de personnels – notamment les agents de droit local et la catégorie C – ne se sentent pas exclues parce qu'elles ne disposent pas des mêmes possibilités de travail à distance que les autres. Ce processus doit par ailleurs tenir compte des exigences de sécurité inhérentes à l'activité diplomatique, qui impliquent d'importants investissements.

Face à la multiplication et à la violence des campagnes de dénigrement et de désinformation contre la France, je salue la volonté du ministère de revoir ses modes de communication pour inclure de manière plus étroite, dans sa stratégie, les relais des sociétés civiles des pays concernés et les diasporas.

Avec les ressources humaines et la numérisation, l'entretien du patrimoine immobilier constitue un autre axe fort de ce projet de budget. L'effort consenti est indispensable et devra être maintenu dans la durée.

Enfin, pour ce qui concerne la diplomatie culturelle et d'influence, je relève un nouvel effort de la France s'agissant de ses contributions volontaires aux organisations internationales. Celles-ci permettront de renforcer la voix de la France.

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