Intervention de Frédéric Petit

Séance en hémicycle du vendredi 29 octobre 2021 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Action extérieure de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédéric Petit, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères :

Aujourd'hui, nous travaillons en réseau ; nous l'avons tous vu sur le terrain. L'Institut français est maintenant doté d'un pôle « réseau » : j'attendais une telle réforme, désormais effective. Les ambassadeurs – vous l'aviez dit, monsieur le ministre, dans votre discours aux ambassadeurs en 2019 – travaillent en réalité comme des chefs d'orchestre chargés de faire jouer des virtuoses, comme des généralistes s'adressant à des spécialistes, et même nos opérateurs, même si les résistances en la matière sont connues, travaillent de façon décloisonnée : ils ont compris qu'ils devaient s'ouvrir.

En 2017, je m'étais rendu au Liban, carrefour de notre influence culturelle. J'y suis retourné cette année et si la France – je dis bien la France, pas le ministère ni l'ambassade – est toujours présente dans ce pays, marqué par deux années de crise politique et sociale puis dévasté par une catastrophe, c'est bien grâce à ce décloisonnement. Quand le service diplomatique au Liban m'entretient de diplomatie éducative, il me parle certes des 54 établissements homologués qui s'y trouvent, mais aussi, plus largement, des 300 écoles francophones que compte le pays, et c'est à leur rencontre que nous allons. Quand je discute avec les artistes libanais, ils ne me parlent pas du dernier festival s'étant tenu à l'Institut français : ils me font part de ce dispositif extraordinaire et très peu coûteux qui s'appelle NAFAS, « respiration » en arabe, et par lequel la France a permis à 100 artistes libanais de venir respirer en France, en résidence.

Quand j'auditionne l'Institut français du Proche-Orient (IFPO), notre citadelle de la diplomatie scientifique et archéologique, ce ne sont pas uniquement sa vingtaine de salariés que je trouve autour de moi : je vois des gens sur le terrain, qui travaillent à la reconstruction du port de Beyrouth auprès des architectes libanais, ou qui étudient l'impact sociologique, patrimonial et environnemental de cette reconstruction. La France, toute la France, est bien présente au Liban, y compris nos volontaires internationaux – j'ai rencontré ces jeunes qui s'engagent –, et les services de l'ambassade sont les animateurs de cette présence : ils donnent les impulsions nécessaires, bien au-delà de la stricte gestion de leur budget propre.

Nous avançons, monsieur le ministre, mais tout n'est pas parfait. J'ai fait quelques recommandations et je voudrais en rappeler quelques-unes. Nous devons faire un point d'étape issu d'un « retex », un retour d'expérience, concernant deux dispositifs. Les contrats de recrutement sur place (CRSP), d'abord, ont longtemps été vus comme une manière de dépenser moins – on l'a rappelé tout à l'heure ; je crois qu'il est logique d'y avoir recours, compte tenu de nos activités, car nous ne pouvons pas avoir partout des fonctionnaires détachés. Mais nous avons besoin de contrats de recrutement sur place qui soient dotés d'une visibilité, car il n'est pas normal qu'une directrice de maison d'édition doive renouveler son contrat tous les quelques mois ; il est logique qu'elle soit en CRSP mais elle doit pouvoir se projeter.

Le Fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI), ensuite, est plébiscité. Bravo pour cet outil, qui a deux ou trois ans. Nous devons maintenant voir comment nous allons inscrire ces financements dans le temps, de façon à les enchaîner au droit commun.

Je pense, monsieur le ministre, que nous devons mieux coordonner notre diplomatie scientifique. Nous disposons de quelques beaux outils, en particulier la Commission des fouilles et l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS). J'ai fait une contribution à ce sujet dans la loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 : je pense qu'il nous manque là un outil de coordination. Je pense aussi à l'AEFE – Agence pour l'enseignement du français à l'étranger –, bien entendu. Vous connaissez mes propositions à son sujet : il faut rénover sa direction du développement et retirer le poste de directeur de l'AEFE du mouvement des ambassadeurs, afin qu'il soit recruté sur projet pour cinq ans ; il faut aussi créer à l'intérieur de l'agence un comité de gestion des établissements qui soit en régie directe.

De tels constats me semblent partagés et vous nous avez promis, monsieur le ministre, une feuille de route consacrée à la diplomatie d'influence, qui aura pour tâche de créer la cohérence que nous appelons de nos vœux. Je crois que nous avançons dans le bon sens et que le présent budget en atteste.

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