Intervention de Jean-Paul Lecoq

Séance en hémicycle du vendredi 29 octobre 2021 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Action extérieure de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Monsieur le ministre, vous avez des raisons d'être satisfait : vous avez stoppé l'hémorragie. Mais nous, parlementaires communistes, ne pouvons pas nous satisfaire de cette situation. Avec la crise sanitaire internationale et les ravages terribles causés par le covid-19 aux économies ou aux systèmes économiques et sociaux des pays les plus fragiles, ainsi que les crises diplomatiques internationales qui éclatent en permanence, la diplomatie n'a jamais été autant sollicitée et n'a jamais été aussi indispensable à l'équilibre précaire de notre monde et à la paix. Nous ne pouvons pas continuer à avancer dans ce monde sans une administration très compétente et protégée.

Je m'interroge donc sur la réforme de l'encadrement supérieur, qui mettra en péril le corps de conseiller des affaires étrangères et des ministres plénipotentiaires. Je m'interroge aussi sur l'utilisation importante de contrats de droit local, relevée y compris au sein de votre majorité, et sur la disparition de la gestion directe des fonctions supports, pour reprendre votre vocabulaire très méprisant à l'égard de ces agents. Ce mouvement vise à diminuer les coûts au détriment de la sûreté de notre réseau consulaire et d'ambassades. Le recours à la sous-traitance pour ces fonctions pose de graves problèmes et il est inquiétant de savoir que notre État n'est plus capable d'assurer seul la sécurité de ses bâtiments, de ses personnels, de ses services informatiques et j'en passe.

Enfin, je m'interroge sur la multiplication des agences qui reprennent, morceau par morceau, des prérogatives initialement dévolues au ministère central. Ces agences emploient des salariés de droit privé et sont trop peu soumises au contrôle parlementaire. Leur multiplication pose la question du rôle de l'État dans la conduite des politiques publiques. Demain, votre ministère sera-t-il uniquement chargé de la gestion de ces agences, comme Atout France, l'Agence française de développement (AFD), Business France – la bien nommée ! –, ou restera-t-il un service public centralisé, avec un personnel formé, et disposant d'un statut adapté à sa fonction ?

C'est un véritable débat de fond, qui oppose notre vision d'un service public porté par des agents protégés et très bien formés à votre vision libérale d'un service au public où tout le monde est interchangeable. Car il faut prendre la mesure du travail réalisé par notre diplomatie. Les députés communistes tiennent d'ailleurs à remercier à nouveau, car on ne le fera jamais assez, les agents qui ont réussi, avec si peu de moyens, à rapatrier autant de monde durant la crise du covid-19 en 2020 ou lors de l'évacuation de l'Afghanistan. En ce moment même, ils continuent au quotidien de faire face à d'innombrables problèmes administratifs en raison des changements permanents des règles pour entrer et sortir d'un territoire.

S'agissant du budget proprement dit, il faut se féliciter de l'augmentation de la contribution française aux systèmes multilatéraux, notamment au Conseil de sécurité des Nations unies. L'objectif affiché de ce retour de la France parmi les grands contributeurs est le renforcement des outils de maintien de la paix et de prévention des conflits, au soutien des organisations dédiées à la sécurité internationale. Pour renforcer la prévention des conflits, je vous propose de commencer par respecter et faire respecter les résolutions des Nations unies que vous votez ! Avec de telles ambitions, nous espérons par exemple que vous allez rapidement organiser un référendum d'autodétermination au Sahara occidental plutôt que de payer la MINURSO (mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental), coûteuse et pour l'instant assez discrète, puisque vous refusez d'élargir ses missions au respect des droits de l'homme.

Un très grand nombre de questions subsistent sur le statut de votre ministère, sur le budget en tant que tel, son application et sa mise en œuvre par votre administration. Avec un budget stable de 3 milliards d'euros, le ministère des affaires étrangères ne sera pas capable d'affronter les enjeux diplomatiques de demain, a fortiori avec des fonctionnaires au statut incertain. Pour les députés communistes, une diplomatie de la paix mériterait des moyens qualitatifs toujours plus importants. Ce budget n'est donc pas satisfaisant et nous voterons contre.

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