Intervention de Bernard Perrut

Séance en hémicycle du jeudi 4 novembre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Santé ; solidarité insertion et égalité des chances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Perrut, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales :

La mission Santé revêt une dimension particulière et inédite dans le contexte de la crise sanitaire ; pourtant, ses crédits – 1,2 milliard d'euros, en baisse par rapport à 2021 – ne concernent que très partiellement la santé publique et son fonctionnement.

Le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins recule d'environ 40 millions d'euros, du fait de la non-reconduction d'une dotation exceptionnelle en faveur d'une ARS. La prévention est pourtant la meilleure façon de réduire les dépenses de santé ; je regrette que tous les moyens ne soient pas mobilisés pour en faire l'une de nos priorités partagées. Depuis 2020, le programme 204 fait office de support indirect à la gestion financière de la crise sanitaire – je renvoie au montage complexe mobilisant Santé publique France et l'assurance maladie. Durant la crise sanitaire, l'État a fait tout ce qu'il a pu – rappelons les difficultés liées aux masques, aux vaccins, aux prestations de transport et aux systèmes d'information –, mais les collectivités se sont aussi amplement mobilisées pour organiser des tests de dépistage et monter des centres de vaccination. La crise a démontré que la politique de santé devait être tout sauf centralisée – l'un des objectifs de la mission "Santé " est justement de réduire les inégalités territoriales et sociales dans le domaine sanitaire. Comment permettre une prise de décision plus proche des territoires et assurer une meilleure répartition de l'offre de soins – avec, pourquoi pas, une cogouvernance entre les régions et les agences régionales de santé ? C'est une proposition que je défends volontiers. Que proposez-vous, monsieur le ministre, pour mieux associer les collectivités ?

J'en viens aux hôpitaux, qui ont été lourdement affectés, humainement et financièrement, par la covid. Qu'en est-il des surcoûts occasionnés par la crise ? Le responsable d'un hôpital me confiait récemment que 60 % seulement des surcoûts liés à la covid avaient été couverts – or l'exercice 2020 est clos. Pour 2021, l'établissement n'a reçu que 2,3 millions d'euros, alors que 8 millions ont été engagés. Quant au surcoût de 1 million d'euros lié à la vaccination, il n'est toujours pas couvert. Monsieur le ministre, tous les hôpitaux ont-ils reçu – et recevront-ils encore – les moyens nécessaires à l'accomplissement de leurs missions, alors qu'ils sont déjà en tension ? Enfin, nous ne pouvons que déplorer l'épuisement du personnel et les fermetures de lits, qui sont bien réelles dans certains établissements – j'aimerais vous entendre à ce sujet, monsieur le ministre.

Les crédits du programme 183 Protection maladie s'établissent à plus de 1 milliard d'euros ; ils concernent l'accès aux soins des étrangers en situation régulière, sans compter les dix autres dispositifs qui dispensent des soins à cette population, dont cinq seulement ont été chiffrés. Certes, la nature de cette politique publique rend les prévisions des dépenses difficiles, mais l'information figurant dans les documents budgétaires à leur sujet est partielle, et ne livre pas de véritable analyse de cette politique. Pourquoi de tels manquements ?

La mission Solidarité, insertion et égalité des chances connaît une relative stabilité : le programme Égalité entre les femmes et les hommes est en augmentation, tandis que le programme Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales se rétracte.

J'aimerais m'attacher quelques instants au handicap et à la dépendance. Je connais votre volonté en ce qui concerne le handicap, madame la secrétaire d'État ; les réponses apportées sont toujours insuffisantes, mais on ne peut que saluer la revalorisation de l'AAH. De nombreux chantiers restent toutefois en suspens, comme l'indispensable déconjugalisation de cette allocation, ou l'ouverture de la prestation de compensation du handicap (PCH) aux personnes ayant des troubles neurologiques et psychologiques. Votre réponse ne saurait être strictement comptable, tant les personnes concernées vivent la situation actuelle comme une injustice ; le dispositif mérite d'être corrigé, pour répondre aux attentes fortes des personnes en situation de handicap et des associations qui les représentent.

Quant au chantier du grand âge et de l'autonomie, il reste marqué par l'abandon du grand projet de loi que nous attendions depuis le début de la législature. Certaines mesures ont été introduites dans les projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 et 2022, mais elles ne nous permettent pas de débattre du défi majeur qu'est le modèle de prise en charge du grand âge et de l'autonomie. Nous espérions un texte essentiel, qui puisse nous réunir ; les acteurs du grand âge et les Français exprimaient aussi de fortes attentes. Je ne peux que regretter l'absence de perspectives pour notre modèle de prise en charge du vieillissement – enjeu qui nous concerne tous.

Le groupe Les Républicains attend des réponses à ces nombreuses questions ; c'est pourquoi, à ce stade de la discussion, il ne peut vous apporter son soutien, ce que je regrette vivement.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.