Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du vendredi 5 novembre 2021 à 9h00
Vigilance sanitaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Sans surprise, dirais-je, nous nous réunissons ce matin dans le cadre d'une navette expresse entre l'Assemblée nationale et le Sénat. C'est donc notre assemblée qui aura le dernier mot sur ce sujet, comme le veut l'usage.

Enfin, je ne sais pas vraiment si c'est le cas puisque malgré un nombre important d'amendements et des votes serrés, le texte soumis par le Gouvernement n'a été modifié qu'à la marge, alors que le texte adopté par le Sénat en était très éloigné. Aucun de nos arguments n'aura donc été entendu, tant au sujet de la territorialisation des mesures, de la clause de revoyure, de la nécessaire proportionnalité des délits et des peines, que du retour à la vie normale en dehors de tout cadre d'urgence. Le Gouvernement et sa majorité préfèrent avancer seuls.

Pour le groupe Libertés et territoires, tel est le nœud du problème. Nous maintenons qu'à l'heure actuelle, il est envisageable de mettre fin à ce régime d'exception. En effet, le Conseil d'État considère que les mesures appliquées sont efficaces pour faire face à un désordre momentané, mais ne sont rien pertinentes contre des menaces pérennes. Depuis le début, nous avons été constants dans nos prises de position. S'il était nécessaire en mars 2020 de donner les outils pour endiguer la vague épidémique, nous avons refusé depuis de conférer les pleins pouvoirs sanitaires au Gouvernement sans véritable contrôle démocratique. Or la remise d'un rapport ne constitue pas un contrôle démocratique.

Cette épidémie est grave mais, depuis le début de la crise, nous répétons que l'exécutif a tort de s'enfermer dans une logique verticale. Je le disais, l'union ne se décrète pas, elle se construit, évidemment en acceptant les idées et les souhaits des autres. D'ailleurs, nous ne comprenons toujours pas pourquoi il n'est pas possible aujourd'hui de procéder à la territorialisation des mesures. Voilà bien un réflexe de jacobinisme exacerbé, en vertu duquel l'on considère depuis Paris qu'une mesure sera plus efficace si on l'applique partout ou presque, sans tenir compte des avis des élus, de la population, ou plus simplement des réalités et des situations sanitaires locales. Si le taux d'incidence est aux alentours de 50 pour 100 000 habitants en Bretagne, je rappelle qu'il y a un an, nous avions fermé les bars et restaurants lorsque celui-ci avait dépassé 250 pour 100 000 habitants alors que personne n'était encore vacciné.

Du reste, je m'interroge désormais sur la pertinence et la fiabilité du calcul du taux d'incidence, dès lors que les formes graves des maladies dues au virus sont en constante baisse – et c'est heureux. D'ailleurs, l'instauration du passe sanitaire a eu pour conséquence de faire augmenter le nombre de vaccinations, dont le taux est désormais de plus de 95 % parmi la population éligible dans de nombreux départements français. Dès lors, on s'interroge sur l'utilité de maintenir cette mesure liberticide de manière uniforme dans l'ensemble du territoire.

Lors de la commission mixte paritaire puis de l'examen en nouvelle lecture, nous avons constaté qu'aucune avancée n'était possible, du fait de la position inflexible du Gouvernement. Pourtant, ce n'est pas faute d'avoir été force de proposition : tant les oppositions, à l'Assemblée nationale ou au Sénat, que certains individus dans votre propre majorité ont déposé des amendements. Au mois de mai, la majorité avait dit non à son gouvernement à propos du passe sanitaire, considérant qu'il ne devait pas s'imposer pour les actes de la vie quotidienne. Malheureusement, au mois de juillet, vous êtes vite rentrés dans le rang. Dès lors en vigueur, sans justification sanitaire majeure, le contrôle systématique de tous par tous est profondément attentatoire aux libertés fondamentales. En effet, le fait de devoir présenter un document de santé personnel pour chaque acte quotidien n'est pas anodin et ne doit pas être pérennisé.

Si la territorialisation des mesures est un marqueur fort de notre groupe, au même titre que la défense des libertés, nous sommes également attachés à la proportionnalité des peines. Or là encore, le compte n'y est pas. Ainsi, nous regrettons que les dispositifs totalement disproportionnés renforçant les sanctions en cas de fraude au passe sanitaire aient été rétablis en commission.

Enfin, nous réitérons notre ferme opposition à l'obligation de présentation du carnet vaccinal des élèves aux directeurs d'établissements, mesure qui avait fait l'objet d'un accord avec le Sénat, sur lequel vous vous asseyez désormais. Le protocole actuel donne suffisamment satisfaction et nous refusons que des enfants puissent être stigmatisés en raison de leur statut vaccinal.

Le fait de donner les pleins pouvoirs, sans évaluation réelle de l'action menée depuis le mois de mars 2020, pose question. En effet, il y a beaucoup à dire sur la gestion des masques, des tests et le choix du tout-vaccinal. Oui, les mesures doivent être débattues, votées et encadrées. C'est ce que nous voulons, c'est ce que vous refusez, nous le déplorons. Dans ces conditions, nous ne pourrons vous accorder les pleins pouvoirs et nous saisirons le Conseil constitutionnel. Notre opposition à cette volonté de disposer des pleins pouvoirs est totale.

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