Intervention de Marie-Noëlle Battistel

Séance en hémicycle du vendredi 5 novembre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Écologie développement et mobilité durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques :

Ce budget présente deux facettes. Côté positif, nous saluons la poursuite du plan de relance et le renforcement du dispositif MaPrimeRénov', qui suscite un vif intérêt. Ce plan reste cependant loin des ambitions que notre groupe avait défendues en proposant la prime pour le climat, soit un effort de 510 milliards en faveur de la rénovation thermique sur trente ans, afin de relever le défi que représentent les 7,5 millions de passoires énergétiques, alors que la dépense moyenne par ménage pour le chauffage en France s'élevait à 1 683 euros en 2017 – eh oui, avant même la crise de l'énergie que nous connaissons actuellement – et parce que la part du bâtiment dans la consommation d'énergie en France est de 43 %. De plus, rien n'indique aujourd'hui que le dispositif MaPrimeRénov' sera prolongé après 2022.

Nous notons également que 506 millions d'euros d'aides sont alloués à l'achat d'un véhicule propre. Sur ce sujet aussi, notre groupe formule une proposition forte, notre collègue Gérard Leseul ayant déposé une proposition de loi visant à permettre à tous les citoyens d'accéder à un prêt à taux zéro pour l'achat d'un véhicule moins polluant.

Côté négatif, nous regrettons fortement que le chèque énergie, créé en 2015, ne soit pas réévalué en 2022 alors même – je viens de l'évoquer – que le coût actuel de l'énergie plonge nombre de familles dans une précarité soudaine. Vos récentes annonces – bouclier tarifaire, chèque énergie de 100 euros supplémentaires ou encore indemnité inflation – sont soit tardives soit inégalitaires car ne tenant pas compte de la situation géographique du ménage ni de sa composition. Elles ne permettent pas de compenser la hausse du coût de l'énergie pour nos familles et ne sont pas à la hauteur des enjeux de court, moyen et long termes.

Par ailleurs, seulement 410 millions d'euros sont prévus en dépenses l'année prochaine pour l'hydrogène alors qu'il nous faut tout faire pour investir massivement et rapidement dans ce domaine.

L'examen du compte d'affectation spéciale "Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale" , et plus particulièrement du programme 794 consacré au soutien national apporté aux ZNI, revêt cette année une dimension particulière. En effet, les travaux de la COP26 ont démarré, suscitant des attentes légitimes en faveur de la préservation de nos écosystèmes et une vraie ambition en matière de résilience énergétique.

Nous avons tous pris connaissance des prévisions alarmistes du GIEC, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, selon lesquelles la température de la planète augmenterait de 1,5 degré Celsius dès 2030, soit dix ans plus tôt que leurs précédentes prévisions. Pire : parmi les cinq scénarios étudiés, le plus pessimiste prévoit un réchauffement compris entre 3,3 et 5,7 degrés Celsius.

Dès lors, comment concilier production d'énergie et protection de nos ressources naturelles ? Cette interrogation prend un sens particulier en outre-mer puisque ces territoires, riches d'une biodiversité exceptionnelle, présentent depuis toujours des aspects environnementaux et sociaux spécifiques, notamment du fait de leur situation insulaire, de leur climat et de leur exposition aux risques naturels. Or les procédures par lesquelles l'État menait une politique énergétique nationale sur l'ensemble de son territoire n'étaient pas adaptées au contexte spécifique des outre-mer.

À cet égard, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 18 août 2015 a représenté une grande avancée en prévoyant la régionalisation des programmations pluriannuelles de l'énergie, lesquelles doivent être les leviers pour l'avenir de l'énergie en outre-mer.

S'agissant des ZNI, nous avions émis plusieurs propositions lors de l'examen du projet de loi dit climat et résilience, comme l'obligation d'installer des batteries lors de la pose de panneaux solaires, notamment sur les bâtiments et parkings, car l'enjeu n'est pas seulement de créer de l'énergie renouvelable à l'instant t mais bien de stocker cette énergie propre. Dans le cas contraire, comment satisfaire les besoins en électricité les jours de pluie et pendant la nuit ?

J'entends aussi les interrogations, parfois légitimes, de certains collègues à propos de la charge croissante que représente la CSPE, la contribution au service public d'électricité. Mais je tiens à rappeler que dans ces territoires, jusqu'à récemment, le fioul et le charbon constituaient le modèle de production énergétique historique. Les zones non interconnectées – notre collègue Philippe Naillet nous le rappelle régulièrement –, soucieuses de faire preuve d'exemplarité et de résilience en matière énergétique, proposent de s'orienter vers un mix électrique reposant à 100 % sur des énergies renouvelables locales.

Il est donc indispensable de renforcer les incitations à maîtriser la demande d'énergie et de diversifier les sources d'énergie renouvelable locale : photovoltaïque, éolien, hydraulique, énergies marines, géothermie. Plutôt qu'une hausse de plus de 170 millions d'euros des charges dans les ZNI, nous souhaiterions voir allouer des moyens équivalents à la production d'énergies durables, qui viendraient s'ajouter à ceux du plan de relance.

Comme je l'ai rappelé en ma qualité de rapporteure pour avis, les outre-mer ne sont pas suffisamment entendus. À l'aube d'échéances nationales, j'appelle à une écoute plus attentive pour que l'ambition écologique que nous défendons devienne la source d'économies qu'attend le Gouvernement. Le groupe Socialistes et apparentés s'abstiendra sur les crédits de la mission.

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