Intervention de Luc Farré

Réunion du mercredi 20 décembre 2017 à 9h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance

Luc Farré, secrétaire général de l'Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) :

Tout d'abord, je souhaite insister, au nom de l'UNSA, sur la notion de confiance dans l'administration, qui nous semble généreuse. Accepter une erreur et permettre de la corriger est une idée intellectuellement satisfaisante. Cependant, elle suppose plusieurs transformations importantes de l'administration. L'évolution de la mission des agents, du contrôle vers le conseil, implique en effet qu'ils s'adaptent et qu'ils soient formés.

La notion de rescrit, qui apparaît à plusieurs reprises dans le texte, nous paraît extrêmement difficile à définir juridiquement et risque d'ouvrir un champ important aux éventuels fraudeurs. Ce risque pèse, du reste, sur de nombreux articles et ne nous semble pas suffisamment encadré dans le texte actuel. Nous savons en effet ce dont sont capables ceux qui savent lire et comprendre les textes de loi, en particulier en matière de détournement fiscal.

L'article 26 soulève le même type de problème. Les normes de construction ont pour objet de protéger les citoyens ; permettre qu'elles ne soient pas toutes appliquées met en question le sens même de la loi. Pour l'UNSA, cette réforme est importante en ce qu'elle changera le rapport des entreprises et, dans une moindre mesure, des particuliers avec l'administration sous l'aspect du contrôle, lequel vise précisément à vérifier la bonne application de la loi et peut conduire à des sanctions. Si la loi peut ne pas être appliquée, ne vaudrait-il pas mieux la modifier ?

Nous insistons, par ailleurs, sur les conséquences de ces réformes pour les agents. Le texte affectera leurs missions, mais il ne saurait être le prétexte à une suppression massive de postes. Car la mission de conseiller, d'aider et de contrôler, qui demeurera et qui est indispensable à la protection des citoyens, ne peut souffrir des suppressions d'emploi, qui risqueraient d'affaiblir notre République. J'insiste donc sur la nécessité d'une formation en profondeur des agents, lesquels ne doivent pas être laissés seuls face à de telles transformations, qui ne manqueront pas de les confronter à des problèmes importants, notamment de positionnement.

Par ailleurs, je regrette que ce projet de loi essentiel apparaisse maintenant dans le calendrier, alors que le Gouvernement a ouvert le chantier « Action publique 2022 », et que les organisations syndicales représentatives des personnels n'aient pas été associées à une réflexion préalable. Néanmoins, l'UNSA se félicite que certaines dispositions de la première mouture du projet de loi qui avait été présentée au Conseil économique, social et environnemental (CESE) n'aient pas été retenues ; nous souhaitons, du reste, qu'elles ne réapparaissent pas au cours de la discussion sous la forme d'amendements. Je pense notamment aux dispositions relatives aux campagnes et à la propagande électorales, à la petite enfance, au carnet du logement et au contrôle de légalité.

Deux articles suscitent des interrogations : l'article 25, qui tend à autoriser les associations cultuelles à collecter des dons par SMS, et l'article 38, qui vise à modifier la loi de 1905 de séparation des églises et de l'État, en favorisant la possession et l'administration par une association cultuelle d'un patrimoine immobilier sans lien avec le culte. Cette forme de subvention déguisée remet en question l'existence d'un ministre chargé des cultes. J'appelle donc votre attention, mesdames, messieurs les députés, sur l'importance de ces dispositions au regard du délicat équilibre sur lequel repose la loi de 1905, dont je ne rappellerai pas l'histoire.

Enfin, la notion de baluchonnage, introduite à l'article 37, est une idée généreuse puisqu'il s'agit de soutenir les aidants familiaux, mais elle soulève la question des heures de travail et de leur rémunération. Quant à la dématérialisation des actes de l'état civil, elle pose des problèmes de fond et de forme : de fond, parce qu'elle supprime un service public de proximité en l'éloignant des territoires ; de forme, parce que l'expérimentation de la numérisation de nouveaux services – je pense en particulier à la délivrance des cartes grises – ne fonctionne pas correctement.

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