Je ne reviendrai pas en détail sur les principaux chiffres du budget de la mission "Outre-mer," qui reste relativement stable par rapport aux années passées, les autorisations d'engagement s'établissant à 2,6 milliards d'euros et les crédits de paiement à 2,5 milliards. Je note néanmoins que le recul des autorisations d'engagement et des crédits de paiement du programme Emploi outre-mer, qui finance notamment le soutien aux entreprises ultramarines et l'aide à l'insertion professionnelle, est fortement lié au contexte sanitaire et économique. Souhaitons que ce mouvement ne soit que passager – du moins, je l'espère.
Le programme Conditions de vie outre-mer connaît une dynamique plus favorable. Il comprend notamment les contrats de convergence et de transformation (CCT), les crédits consacrés au logement, à la continuité territoriale ou encore aux établissements scolaires.
Ces constats dressés, je souhaite appeler l'attention de notre assemblée sur deux points importants. D'une part, le programme Conditions de vie outre-mer se signale par une baisse des crédits consacrés à la continuité territoriale et aux collectivités territoriales, qui soutiennent notamment la mobilité professionnelle et personnelle des ultramarins, ainsi que de ceux dédiés aux établissements scolaires. Je défendrai donc des amendements en faveur de leur maintien au niveau de l'année précédente. Je soutiendrai également un amendement en faveur de l'aide au fret, dont le coût connaît, comme chacun sait, une hausse exponentielle depuis le début de l'année 2021, entraînant des conséquences graves pour les entreprises ultramarines et le pouvoir d'achat de nos populations.
D'autre part, il convient de se pencher sur le taux d'exécution des crédits : ce qui compte en définitive pour les ultramarins et pour les entreprises, ce n'est pas tant les crédits ouverts que ceux qui sont effectivement consommés. Plusieurs points de vigilance méritent à cet égard d'être soulignés.
La signature des contrats de convergence et de transformation est à présent effective pour les cinq DROM, ainsi que pour Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis et Futuna et Saint-Martin. Mais la consommation des crédits au 31 décembre 2021 reste bien inférieure aux montants contractualisés, dont elle ne représente que 18 %. Selon nos prévisions, ce chiffre devrait avoisiner les 30 % à la fin de l'année 2022. La semaine dernière, devant la commission des lois, vous avez fait part, monsieur le ministre, de votre optimisme quant aux perspectives d'exécution à venir grâce à l'effet de levier des crédits de la relance et de la fin de la crise sanitaire. Notre assemblée devra suivre attentivement ce point.
Il en est de même s'agissant du fonds exceptionnel d'investissement : la discordance entre les autorisations d'engagement de 110 millions et les crédits de paiement de 63 millions d'euros illustre l'état d'avancement des projets. Alors que les territoires ultramarins font face à des difficultés économiques et sociales importantes, que leur isolement constitue un défi économique supplémentaire et que le niveau de vie de leurs habitants est structurellement inférieur à celui de la France hexagonale, nous ne pouvons nous permettre de ne pas mobiliser pleinement les crédits votés. J'entends bien que la crise sanitaire a pu entraîner des difficultés d'exécution dans plusieurs secteurs, mais il ne faudrait pas qu'elle devienne l'arbre qui cache la forêt. Notre assemblée devra également être vigilante sur ce point.
Pour terminer, je souhaite dire un mot sur l'exécution des crédits de la ligne budgétaire unique (LBU) qui finance le logement dans les cinq départements et territoires d'outre-mer. Je me réjouis bien sûr que les difficultés structurelles d'exécution se résorbent progressivement depuis un an ou deux, mais regrette que cette amélioration intervienne après plusieurs années de baisse du niveau des crédits. Il faudra s'assurer que les hausses de crédits de la LBU dans le projet de loi de finances pour 2022 ne remettent pas en cause cette dynamique d'exécution favorable. Cette embellie ne doit cependant pas masquer les difficultés structurelles. Je rappelle que le nombre de logements financés et livrés n'a fait que diminuer depuis plusieurs années : on en a compté 8 164 en 2020 contre 11 292 en 2013, soit une baisse de 28 %.
Les causes de cette diminution sont connues : sans m'attarder, je citerai les problèmes de mobilisation du foncier, le coût du foncier aménagé, les paramètres de financement parfois inadaptés aux besoins et aux moyens des ménages, les complexités administratives et, enfin, un manque d'ingénierie au sein des collectivités, qui ne sont pas suffisamment accompagnées. Telles sont les principales remarques que je souhaitais formuler sur ce budget.