Ce serait une erreur fondamentale de penser que les problèmes de la justice ne concernent que la justice. Si la loi est le ciment de la société, l'institution judiciaire est l'artisan qui, chaque jour, veille au respect des droits et des libertés individuels, et au maintien de ce lien social qui nous unit tous.
Dès lors, quand les citoyens perdent confiance en leur justice, quand les juridictions ne parviennent plus à assumer efficacement leurs missions, quand les procédures pénales sont perçues comme obscures et qu'un sentiment d'impunité se développe chez certains, c'est toute la structure de notre société qui en pâtit.
Ces dérives, que nous subissons depuis plusieurs années, sont celles contre lesquelles luttent ces projets de loi ordinaire et organique pour la confiance dans l'institution judiciaire. Ils ont été coconstruits avec les magistrats, les auxiliaires de justice, les usagers du service public judiciaire et les membres de la doctrine, qui peuvent notamment s'exprimer dans le cadre des états généraux de la justice récemment inaugurés par le Président de la République. En outre, les dispositions ont été enrichies par le travail mené en bonne intelligence avec le Sénat, jusqu'à la commission mixte paritaire conclusive.
Ces textes sont avant tout ceux d'une justice qui se nourrit des progrès technologiques pour regagner la confiance des citoyens. À ce titre, le groupe Agir ensemble salue particulièrement la possibilité d'enregistrer et de diffuser certaines audiences judiciaires et certains actes réalisés par le juge d'instruction. Cette évolution, conditionnée à l'accord écrit des parties et entourée d'importantes garanties afin de protéger ces dernières, permettra aux Français de voir et de comprendre par eux-mêmes le fonctionnement de l'institution judiciaire.
Ces textes sont également ceux d'une procédure pénale qui respecte les droits de la défense. En ce sens, la durée des enquêtes préliminaires est limitée à deux ans et peut s'étendre à cinq ans pour les infractions les plus graves. Animée de la même volonté, la majorité a choisi d'assurer enfin une protection complète du secret professionnel des avocats, y compris dans le domaine du conseil.
Toutefois, la parcimonie et le bon sens doivent aussi être appliqués à la définition des infractions elles-mêmes. C'est pourquoi nous délimitons clairement le délit de prise illégale d'intérêts, actuellement à l'origine de nombreuses condamnations d'élus locaux qui n'ont souvent commis, pour seule faute, qu'une erreur de procédure.
En outre, une justice digne de confiance est une justice efficace : tel est l'esprit de la création d'un ou de plusieurs pôles spécialisés dans le traitement des crimes sériels, complexes ou non élucidés, et de la généralisation, dès le 1er janvier 2023, des cours criminelles départementales composées de cinq magistrats professionnels. Cette mesure s'accompagnera d'un comité de suivi, qui comprendra deux députés et deux sénateurs respectivement désignés par le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat. Ce comité établira un rapport public au plus tard deux mois avant l'entrée en vigueur de l'article 7 du projet de loi ordinaire. L'équilibre est ainsi parfaitement trouvé entre le Gouvernement et les deux chambres.
La fermeté doit également constituer l'un des fils conducteurs de notre politique d'application des peines. Les crédits de réduction de peine ne seront désormais plus automatiques. Enfin, le contrat d'emploi pénitentiaire sera l'assurance de faire de la prison un lieu de réinsertion et non de perdition.
Le groupe Agir ensemble souscrit pleinement à l'ensemble des objectifs visés par les présents projets de loi. C'est d'ailleurs pourquoi il s'est fait force de proposition, en soutenant plusieurs amendements qui ont été adoptés. Nous nous félicitons en particulier du dispositif visant à ce que la part disponible du compte des détenus évadés soit versée d'office au profit des parties civiles après un an. De même, le caractère obligatoire de l'audience préparatoire de mise en état des affaires criminelles permettra aux parties de s'accorder sur les témoins et experts à entendre afin de se concentrer, lors de l'audience, sur les débats.
S'agissant de l'expérimentation de la présence d'un avocat honoraire au sein des cours d'assises et des cours criminelles départementales, nous sommes satisfaits que la commission mixte paritaire ait conclu à la limitation de celle-ci au sein des seules cours criminelles.
Enfin, les dispositions de l'article 3 relatives au secret professionnel des avocats ont fait couler beaucoup d'encre – à juste titre, car c'est un sujet fondamental dans une démocratie. Alors que le projet de loi avait l'ambition de mieux protéger ce secret professionnel, les modifications du Sénat l'ont affaibli. La commission mixte paritaire a abouti à un point d'équilibre, mais la version qui découlera de la présente discussion, après l'adoption de l'amendement du Gouvernement, nous semble la plus protectrice du secret professionnel des avocats, sans tomber dans une impunité qui serait incompatible avec la démocratie.
La confiance des citoyens se mérite, et l'institution judiciaire n'échappe pas à cette règle. Fort de ce constat, le groupe Agir ensemble soutiendra avec conviction ce projet de loi, grâce auquel les procédures seront plus transparentes, les peines mieux appliquées et les infractions mieux poursuivies par la justice.