La présence dans les tribunes de représentants de nos concitoyens harkis témoigne de l'attention portée par cette communauté aux décisions qui seront prises aujourd'hui par l'Assemblée nationale. Ma collègue Christine Pires Beaune m'a rappelé tout à l'heure le parcours exemplaire de Mohand Hamoumou, qui réside comme elle dans le Puy-de-Dôme. Cet homme, qui s'est toujours senti français, en Algérie comme en France, a démontré, par les mandats qu'il a exercés dans son département, combien sa génération avait apporté à notre pays.
Je veux saluer aussi la présence du premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure : notre groupe a fait le choix d'être représenté au plus haut niveau de notre parti pour l'examen de ce projet de loi. Ce n'est certes pas à l'Assemblée nationale d'écrire l'histoire, car l'histoire est l'affaire des peuples et des historiens. Les responsables politiques se fourvoient lorsqu'ils cherchent à l'écrire. Toutefois, lorsqu'ils se penchent sur l'histoire, ils peuvent lui apporter de la solennité. C'est cet esprit qui nous guide et qui inspire notre collègue Olivier Faure. Sa présence, ainsi que les amendements que nous avons déposés et les positions que nous avons défendues pendant les travaux en commission, démontrent notre volonté, face à la tragédie des harkis, d'enrichir le projet de loi. Nous vous l'avons dit, madame la présidente de la commission : nous souhaitons un consensus apaisé sur ce texte afin que la représentation nationale porte un message partagé à nos compatriotes sur les mesures que nous allons adopter.
Nous avons formulé plusieurs propositions d'amélioration du texte, avec le souci, notamment, de ne pas nous tromper dans les mots que nous choisissons. Face à une telle tragédie, en effet, chaque mot compte. Il ne nous appartient sans doute pas d'écrire l'histoire, mais nous avons le devoir de ne pas nous tromper sur les mots dont nous faisons usage dans la loi.
Tel est le sens de l'un de nos amendements, qui s'inscrit dans le droit fil des idées exprimées par François Hollande dans sa déclaration du 25 septembre 2016, lorsqu'il était chef de l'État. S'agissant des harkis, il n'est évidemment pas possible de parler de « délaissement » puisqu'il s'agit d'un « abandon ». La communauté nationale a bel et bien abandonné les harkis. Et si nous devons leur demander pardon pour la tragédie – j'insiste sur ce terme – qu'ils ont vécue, nous devons avant tout réparer les préjudices qu'ils ont subis. De même, ils n'ont pas souffert de « conditions d'accueil précaires », comme le texte initial l'affirmait, mais de « conditions d'accueil inhumaines ».
Je regrette, madame la ministre déléguée, que vous n'ayez pas repris davantage les termes de la déclaration de François Hollande dans votre intervention à la tribune comme vous l'aviez fait en commission. François Hollande avait évoqué les conditions d'accueil inhumaines des familles transférées dans des camps en France et avait appelé la communauté nationale à réparer les dommages infligés aux harkis.
Nous veillerons, par ailleurs, à ce que le projet de loi ne reste pas un texte purement déclaratif, empreint de bonne volonté mais sans traduction concrète. Nous souhaitons, en particulier, que tous les harkis obtiennent la compensation financière qui leur est due. Pour cela, la création d'une commission pluraliste, composée de manière intelligente et incluant des parlementaires et des représentants de la communauté des harkis, est indispensable. Cette commission, dénommée Commission nationale de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis, devra choisir un dispositif de réparation satisfaisant aux yeux de nos concitoyens.
Les associations de harkis auraient préféré que la réparation soit intégrale, mais le Gouvernement a fait le choix d'une aide forfaitaire, calculée à partir du nombre de mois passés dans les camps – on comprend évidemment pourquoi sur le plan technique. Le groupe Socialistes et apparentés a, quant à lui, proposé une solution intermédiaire : une aide forfaitaire prenant en compte l'ensemble des préjudices subis et pas simplement le temps passé dans les camps. Nous souhaitons, par ailleurs, que le dispositif de réparation s'applique le plus largement possible. Alors que les aides existantes ne bénéficient qu'à 5 469 personnes, nous demandons que le périmètre du dispositif couvre les 50 000 personnes susceptibles d'être concernées.
Nous devrons également nous assurer que les moyens humains et financiers consacrés au traitement des demandes soient suffisants. De même, les missions de la Commission nationale de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis auprès de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) devront être clairement définies.
Le projet de loi prévoit, enfin, que le montant forfaitaire de la réparation prenne en compte les sommes déjà perçues. Faute d'un temps de parole suffisant, je ne peux malheureusement pas développer davantage nos propositions
Lorsque je me suis exprimé tout à l'heure sur les deux premiers textes à l'ordre du jour, après notre collègue Josy Poueyto, j'ai évoqué les familles de harkis des Pyrénées-Atlantiques qui vivent dans sa circonscription et dans la mienne, c'est-à-dire à Pau et à Mourenx. J'ai mentionné les familles Benedin, Rafa et Ferki, qui ont fait la richesse de notre pays et de notre région. En m'exprimant ce matin au nom du groupe Socialistes et apparentés, j'ai une pensée pour elles et pour leurs enfants. Les petits-fils Ferki sont les amis de mes enfants : ils se voient tous les week-ends ! L'intégration des harkis a donc parfois été une réussite :…