Ma question porte sur le système d'étiquetage nutritionnel nutri-score et son impact, entre autres, sur les produits AOP – appellation d'origine protégée – et IGP – indication géographique protégée.
Pour répondre aux inquiétudes justifiées de nombre de Français relatives à la qualité de leur alimentation, l'affichage nutri-score est obligatoire sur tous les supports publicitaires des denrées alimentaires depuis le 1er janvier 2021. Le nutri-score est un logo informant sur la qualité d'un aliment et constitué d'une échelle de cinq couleurs allant du vert foncé au rouge, lesquelles sont associées à des lettres allant de A à E.
Ce logo, qui permet instantanément au consommateur de s'informer sur la valeur nutritionnelle brute des produits, apparaît tout à fait pertinent s'agissant de certains produits agroindustriels.
Cependant, il convient de relever les effets pervers qui découlent de ce barème. En effet, des produits traditionnels, ancestraux, confectionnés à partir d'ingrédients simples, obtiennent des notes médiocres, à l'instar du foie gras du Gers, du brocciu de Corse, de l'huile d'olive de Provence, du porc noir de Bigorre, ou du maroilles du Nord, entre autres innombrables bons produits français.
À l'inverse, certains produits industriels pouvant se substituer à ces produits traditionnels, d'ailleurs parfois de manière trompeuse, obtiennent de bien meilleurs scores, notamment grâce à l'ajout d'eau dans la fabrication. Pire encore, selon la plateforme Open Food Facts, certaines frites surgelées obtiennent la meilleure note au nutri-score tout en étant des aliments ultratransformés au sens de la classification NOVA qui, elle, évalue le degré de transformation, voire de destruction structurelle, des aliments.
Comme toutes les évaluations nutritionnelles, le nutri-score a donc des limites. Il ne prend pas non plus en compte les pesticides pouvant se trouver dans les produits, ni les additifs utilisés. Notre action apparaît donc paradoxale : alors que nous demandons à nos concitoyens de « faire le choix des produits locaux et de qualité issus de notre agriculture », pour reprendre les mots de Julien Denormandie, 93 % des produits sous AOP ou IGP obtiennent la note D ou E.
Le nutri-score risque donc de favoriser des produits industriels qui, je le répète, imitent souvent de façon trompeuse des produits traditionnels, au détriment des producteurs, et ce, alors que les labels AOP et IGP sont gages de qualité, obligent à respecter un cahier des charges précis et contraignant et, partant, offrent un degré de transparence bien plus important.
Voilà pourquoi je souhaite que le Gouvernement précise sa stratégie visant à protéger et à renforcer les produits locaux, notamment ceux sous AOP et IGP, face à l'extension prochaine du nutri-score. Au pays des 1 000 fromages, nous ne voulons pas que le Carré Frais 0 % devienne la référence.