Intervention de Nicole Sanquer

Séance en hémicycle du jeudi 25 novembre 2021 à 15h00
Risque d'épuisement administratif des français — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Sanquer :

Nombreux sont les enfants qui ont grandi avec, comme idée de l'administration, l'image d'Astérix luttant dans la maison qui rend fou pour obtenir un laissez-passer. Une fois adultes, ils se rendent compte que cette caricature ne forçait guère le trait. Ils constatent que certaines demandes administratives, si elles ne rendent pas fou, sont d'une complexité telle que même un ministre a reconnu nourrir une phobie à leur égard. Aussi, je vous remercie, madame Petit, de nous proposer d'échanger sur le sentiment de trop-plein d'administration dont souffrent nos concitoyens ; il est opportun d'étudier plus profondément l'épuisement qu'ils ressentent face à une administration omniprésente au quotidien, dans chaque action qu'ils entreprennent.

Si donc je comprends bien l'idée qui vous pousse à nous présenter aujourd'hui une telle proposition de résolution, je souhaiterais néanmoins vous faire part de certaines remarques partagées avec l'ensemble de mes collègues du groupe UDI et indépendants.

Tout d'abord, je dois avouer que l'État n'a pas vocation à être cette froide cage d'acier que vous décrivez dans votre exposé, en premier lieu parce que l'État et son administration sont aussi des acteurs qui doivent permettre l'émancipation de chacun par l'instruction obligatoire et gratuite proposée. L'État est aussi celui qui assure une juste redistribution des richesses pour que ceux qui ont le moins puissent vivre dignement. Enfin, l'État est également le filet qui assure à nos concitoyens une protection face aux événements de la vie. Je ne pense donc pas que l'action individuelle soit plus humaine et pleine de bons sentiments que celle d'un État qui saurait avoir une action juste et proportionnée, et c'est sur ce point que j'insisterai, car ce contre quoi il nous faut lutter, c'est cette maladie très française de la suradministration.

Le président de notre groupe, Jean-Christophe Lagarde, a récemment évoqué en commission son effarement devant les instructions diffusées par l'éducation nationale à la suite du premier confinement, qui allaient jusqu'à expliquer aux agents comment balayer les couloirs. Cette volonté de l'administration centrale de tout régenter empêche l'initiative personnelle d'agents qui sont au contact du terrain et se trouve être une source de mal-être tant pour ces agents que pour les usagers.

Mais, derrière cette critique du fonctionnement de l'administration, nous devons essentiellement voir une critique d'un État bien trop centralisé, éloigné des préoccupations des Français. Surtout, cette centralisation étouffe l'administration et l'empêche de s'adapter aux spécificités des territoires et des citoyens, qui sont pourtant nombreuses. Cet amour de notre administration centrale pour la surproduction de normes se retrouve aussi dans l'application du droit européen, et nous sommes souvent nombreux à nous plaindre de la surtransposition des règles européennes. Non seulement, en effet, cette pratique complique la vie de nos concitoyens, mais elle place aussi souvent nos acteurs économiques dans des situations de concurrence déloyale face à des Européens qui appliquent bien plus simplement les règles.

Enfin, comment évoquer ces problèmes de l'administration sans citer deux combats de mon collègue Guy Bricout : l'abondance des agences de l'État et l'abandon des services publics dans les territoires ruraux. On compte en France 1 200 agences de l'État. Le coût en est assurément important mais, surtout, ces agences sont source d'une surproduction normative qui sert à justifier leur existence. Si certaines sont, évidemment, vitales, on constate toutefois qu'elles sont quatre fois moins nombreuses en Grande-Bretagne ou en Allemagne. Quant à la disparition des services publics dans les territoires ruraux, elle est responsable d'un sentiment d'abandon chez certains de nos concitoyens, qui ne maîtrisent pas correctement les outils numériques. Surtout, face à des documents administratifs souvent généraux, ceux de nos concitoyens qui n'entrent pas dans les cases se trouvent sans interlocuteur ou sont obligés de se déplacer pour effectuer les démarches les plus simples.

Tous ces problèmes sont les éléments du ras-le-bol administratif des Français, qui pousse certains jusqu'à l'épuisement, comme vous l'expliquez. Ainsi, si les députés UDI et indépendants soutiennent cette proposition de résolution, qui vise à mieux connaître cet épuisement administratif et à lutter contre, nous pensons qu'il est surtout nécessaire d'agir sur l'ensemble des points que je viens d'évoquer : vous le verrez, les Français iront déjà beaucoup mieux !

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