Le nouveau système favorise en effet les apparatchiks, les parachutés, les fameux « cursus inversés », par opposition aux cursus classiques. Dès lors, dans un contexte d'antiparlementarisme, on reproche souvent aux parlementaires d'être déconnectés des préoccupations des Français, alors que l'on ne pouvait opposer un tel reproche aux parlementaires bien implantés localement qu'étaient les députés-maires et les sénateurs-maires. J'ai connu le sénateur-maire de Soulac-sur-Mer quand il exerçait ces deux mandats ; quand je me rends là-bas pour des cérémonies annuelles, tous les habitants me disent combien ils regrettent cette époque – ce sentiment est surtout manifeste dans les zones rurales, reconnaissons-le.
Par ailleurs, la réforme de 2014 a privé les parlementaires d'une assise locale susceptible de renforcer leur autorité et leur indépendance vis-à-vis des partis politiques. Ainsi, l'interdiction du cumul, alliée à la réforme du quinquennat, me semble avoir aggravé encore le déséquilibre déjà très important des pouvoirs au profit de l'exécutif dans la V
Enfin, paradoxalement, le non-cumul pourrait contribuer à dévaloriser progressivement le mandat parlementaire, puisque les personnalités politiques sont désormais incitées à lui préférer celui de chef d'un exécutif territorial – ce fut manifeste dans les mois passés. Avant cette législature, nous n'avions jamais vu autant de suppléants de députés renoncer à siéger au Parlement, dans le seul but de conserver leur mandat local. Cela doit nous interroger.
Si les voix des députés de mon groupe, Libertés et territoires, sont partagées sur ce texte, nous sommes unanimes pour considérer que cette proposition est loin de pouvoir répondre seule aux attentes de réforme démocratique. Renouveler la confiance passe en effet par une réforme institutionnelle profonde de notre République, nécessitant de réviser la Constitution, pour y inscrire le principe de différenciation territoriale. Une république girondine doit être une république décentralisée, avec un parlement renforcé. Un parlementaire ou élu local disposant d'un pouvoir élargi ne se poserait jamais la question du cumul des mandats.
De grands blocs de compétences doivent être totalement transférés aux collectivités locales, comme cela se fait dans les pays européens voisins. Nous croyons en effet que les décisions doivent être prises à l'échelon le plus proche, autant que possible, conformément au principe de subsidiarité. Tout ne doit pas se décider à Paris.
Les députés de notre groupe voteront, comme de coutume, en liberté de conscience sur ce texte. La question de l'ancrage territorial des élus est essentielle pour notre démocratie.