Quelle aventure législative que celle de cette proposition de loi ! Il y a plus d'un an, le 8 octobre 2020, notre assemblée a adopté, en première lecture, ce texte visant à renforcer le droit à l'avortement, inscrit à l'initiative de notre collègue Albane Gaillot lors de la journée réservée au groupe Écologie démocratie solidarité. Rejetée par le Sénat en janvier 2021, cette proposition de loi a ensuite été inscrite, dès le mois de février dernier, en deuxième lecture, à l'ordre du jour de la journée réservée du groupe Socialistes et apparentés.
Après son adoption en commission, nous avions malheureusement été contraints de la retirer de l'ordre du jour de la séance, empêchés par une pluie d'amendements peu constructifs émanant de quelques députés de droite. Contrairement au Gouvernement, les parlementaires que nous sommes ne disposent hélas, face à l'obstruction, d'aucune autre arme que leur patience : nous n'avions donc eu d'autre choix que de renoncer. Je ne m'étendrai pas sur cette pratique politicienne, même s'il est regrettable qu'elle puisse bloquer le travail des groupes minoritaires.
Nouveau rebondissement : le texte a été réinscrit à notre ordre du jour à la demande du groupe majoritaire. Nous reprenons donc là où nous nous étions arrêtés au mois de février. Je remercie à cet égard nos collègues du groupe La République en marche, qui ont décidé de poursuivre le chemin législatif de ce texte, et tout particulièrement leur président, Christophe Castaner. Une même proposition de loi inscrite à l'ordre du jour par trois groupes parlementaires différents, par l'opposition puis par la majorité : c'est un honneur pour l'Assemblée que de savoir dépasser ses clivages partisans pour la défense des droits des femmes, et c'est un honneur pour moi d'être à nouveau corapporteure du texte.
Sur le sujet de l'IVG, le travail transpartisan n'est pas nouveau ; c'est même la règle au sein de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Je tiens à cet égard à lui rendre hommage, ainsi qu'à sa présidente Marie-Claire Rixain. C'est dans ce cadre transpartisan que nous avions publié un rapport d'information relatif à l'accès à l'IVG dans notre pays : j'en fus la corapporteure avec Cécile Muschotti, dont je salue l'engagement sans faille en faveur de l'effectivité du droit à l'avortement. À l'occasion de ce travail de longue haleine, nous avions pu constater que, plus de quarante-cinq ans après l'obtention du droit à l'IVG, le bilan de l'accès à ce droit est alarmant : professionnels de santé, médecins, sages-femmes, travailleurs sociaux, associations, plannings familiaux, tous font état de plusieurs difficultés dans le parcours d'accès à l'IVG.
Les écueils sont multiples : difficulté pour accéder à une information claire et exacte, pour savoir à qui s'adresser, pour identifier un professionnel acceptant de pratiquer l'IVG, pour trouver des rendez-vous rapidement, pour être prise en charge dans les délais impartis. S'y ajoutent des inégalités : d'une région à l'autre, l'offre de soins est contrastée et le délai de prise en charge peut varier du simple au quadruple. Les zones rurales, notamment, voient le nombre de services d'orthogénie se réduire, avec la fermeture progressive des petites maternités.