La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui à l'initiative de la Gauche démocrate et républicaine vise à réduire les inégalités d'accès à l'enseignement supérieur créées par Parcoursup, ce qui est a priori un objectif louable.
Nous le savons, chaque année, les élèves de terminale sont confrontés à de nombreuses difficultés lors de la procédure Parcoursup. On se souvient par exemple des dysfonctionnements recensés en mai 2019 mais également de difficultés et d'inégalités récurrentes dans l'accès, non seulement à l'enseignement supérieur en général mais aussi à des informations claires pour nos lycéens.
Chaque année, nous dénonçons ces difficultés, ces bugs, ces inégalités d'accès. Et chaque année, vous nous répondez, madame la ministre, que tout va pour le mieux même si, souvent, sur le terrain, des lycéens, des parents d'élèves ou des associations de parents d'élèves nous interpellent vivement sur ce sujet, nous faisant part de leurs angoisses.
Cette année encore, plus de 90 000 élèves se sont retrouvés sans affectation à l'issue de la première phase de Parcoursup en juillet. Certes, au cours des étapes suivantes, certaines difficultés se sont progressivement résorbées. Mais le processus a été extraordinairement stressant, c'est le moins que l'on puisse dire.
Le Gouvernement répète que la plateforme d'orientation Parcoursup est un système beaucoup plus humain que feu APB, ce que je conçois bien volontiers. Cependant, le resserrement du calendrier et le peu de transparence des algorithmes demeurent des sources d'inquiétude pour nos étudiants, il faut le rappeler.
La procédure crée du stress pour les familles comme pour les lycéens. D'après une enquête réalisée par Ipsos pour le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation en septembre 2021, 82 % des néobacheliers jugeaient la procédure Parcoursup stressante. Ils sont en effet invités à exprimer jusqu'à dix vœux, ainsi que des sous-vœux et parfois des vœux d'apprentissage. Des erreurs d'aiguillage étant toujours possibles, nous le savons tous – inutile de le nier –, certains se retrouvent, à l'issue des différentes étapes, dans des filières qu'ils ne souhaitaient pas vraiment intégrer, ce qui peut aboutir à des réorientations en cours d'année ou à l'issue d'une première année ratée ou même à des abandons avant la fin de la première année.
Il faut aussi reconnaître que les délais de réponse sont longs et que les files d'attente qui se créent engendrent elles aussi du stress, de l'angoisse, de fortes incertitudes, ce qui peut conduire certains candidats à effectuer un choix par dépit et à s'inscrire dans une formation qui ne leur convient pas vraiment, voire qui ne leur plaît pas du tout, uniquement s'assurer une inscription dans l'enseignement supérieur.
Par ailleurs, les lycéens français sont de plus en plus nombreux à s'orienter vers des établissements d'enseignement supérieur à l'étranger, en Europe ou ailleurs. Plusieurs de ces établissements les démarchent en les incitant à ne pas attendre les étapes suivantes du processus de Parcoursup, à se débarrasser des affres de ce parcours et à les rejoindre. Des élèves, de plus en plus nombreux, préfèrent ainsi assurer leurs arrières en se tournant vers des établissements étrangers, ce qui est tout de même fâcheux.
La proposition de loi présentée par nos collègues du groupe de la Gauche démocrate et républicaine s'appuie notamment sur des constats et recommandations formulés par la Cour des comptes dans son rapport de février 2020, qui dresse un premier bilan de l'accès à l'enseignement supérieur dans le cadre de la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants. Nous partageons la plupart de ces observations et bien des préconisations. Nous sommes d'accord avec nos collègues sur le diagnostic établi, celui des inégalités d'accès à l'enseignement supérieur et à l'information, mais nous sommes beaucoup plus réservés sur les dispositifs qu'ils proposent dans leur texte, qui sont contraires à l'idée que nous nous faisons de l'enseignement supérieur.
Nous ne sommes pas favorables à l'anonymisation pure et simple du lycée d'origine, sans création d'un outil statistique tel que le préconise la Cour des comptes : une mesure de l'écart entre les notes obtenues au bac et celles obtenues au contrôle continu. Il ne nous semble pas non plus souhaitable d'ajouter aux critères de détermination des capacités d'accueil un « taux de pression », d'ailleurs jugé peu fiable par la Cour des comptes. Enfin, l'obligation préconisée par la proposition de loi d'accueillir tous les candidats venant de l'enseignement professionnel et technologique au sein des STS et des IUT ne nous semble ni raisonnable ni réaliste. Nous, au groupe Les Républicains, avons toujours insisté sur l'importance de l'information des élèves pour leur bonne orientation. C'est d'ailleurs un point qu'avait soulevé la mission flash que nos collègues Frédéric Reiss et Géraldine Bannier avaient menée il y a quelques mois.
Parce que la proposition de loi contient à ce stade peu d'avancées, nous nous abstiendrons lors du vote, même si, encore une fois, nous partageons certains constats de nos collègues.