Intervention de Agnès Firmin Le Bodo

Séance en hémicycle du jeudi 2 décembre 2021 à 15h00
Justice sociale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Firmin Le Bodo :

L'argument selon lequel l'AAH serait un minimum social comme un autre et devrait donc s'appréhender au regard des revenus du foyer ne nous convainc pas. Le groupe Agir ensemble considère en effet qu'elle constitue une prestation sociale, dont la vocation est de répondre à une incapacité durable d'accès à l'emploi et non à une vulnérabilité sociale temporaire. Sa raison d'être est donc bien d'assurer l'émancipation de la personne qui en bénéficie, indépendamment de sa situation conjugale.

Si le texte que nous avions adopté en première lecture comprenait un certain nombre d'effets secondaires – il aurait conduit à léser environ 40 000 bénéficiaires qui travaillent et sont en couple avec une personne inactive –, le Sénat a judicieusement enrichi la proposition de loi par un article 3 bis qui instaure un mécanisme transitoire permettant qu'il n'y ait aucun perdant. Nous regrettons le choix fait en commission de supprimer les articles 3 et 3 bis restant en discussion.

En juin dernier, l'Assemblée avait adopté la proposition de loi en substituant à la déconjugalisation un abattement forfaitaire de 5 000 euros sur les revenus du conjoint, venant remplacer l'abattement proportionnel de 20 % qui s'applique aujourd'hui. Cette mesure a depuis été intégrée au projet de loi de finances pour 2022, que nous examinerons en lecture définitive dans deux semaines. Si ce scénario était retenu, le niveau de revenu du conjoint à partir duquel le bénéficiaire perdrait son allocation à taux plein passerait de 1 020 à 1 270 euros nets mensuels ; le seuil d'extinction, lui, resterait le même, à 2 270 euros.

La solution qui nous est proposée par le Gouvernement est bien sûr préférable à la situation actuelle, mais elle ne répond pas au désir d'autonomie financière exprimé par les personnes en situation de handicap. Elle permettra de moins prendre en compte les revenus du conjoint, mais il ne s'agit pas d'une déconjugalisation. La situation de dépendance économique restera en effet la même pour bon nombre des personnes concernées.

Au regard des 11 milliards d'euros consacrés chaque année à cette prestation sociale, les 700 millions d'euros supplémentaires que coûterait la déconjugalisation sont certes une somme importante, mais nous estimons que les enjeux d'autonomie et de justice sociale qu'elle comporte méritent un effort de solidarité nationale de cette ampleur. Je tiens également à rappeler que c'est notre majorité, à l'initiative du Gouvernement, qui a revalorisé de manière substantielle le montant de l'AAH, le faisant passer de 810 euros en 2017 à 903 euros aujourd'hui, pour un coût total de 2 milliards d'euros. L'effort supplémentaire que nous souhaitons réaliser par la présente proposition de loi représente donc un tiers de ce qui a déjà été accompli.

Madame la secrétaire d'État, je salue votre travail et votre engagement, depuis 2017, pour améliorer la vie des personnes en situation de handicap. Mais sur ce sujet, nous avons un point de divergence ; il est documenté depuis 2017.

Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, vous l'aurez compris, le groupe Agir ensemble reste très majoritairement favorable à l'individualisation de l'AAH, dans son mode de calcul comme dans son plafonnement. À la veille de la journée internationale des personnes handicapées, nous voterons donc, avec constance et conviction, en faveur de la proposition de loi telle qu'elle nous est revenue du Sénat.

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