Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du lundi 13 décembre 2021 à 16h00
Égalité économique et professionnelle — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

Chers collègues, l'égalité ne s'édicte pas, ne se décrète pas. Il n'a malheureusement pas suffi de dire que les hommes et les femmes étaient égaux en droit pour en faire une réalité. L'égalité se construit, chaque jour un peu plus. En matière économique et professionnelle, les législatures et gouvernements successifs se sont attachés à faire avancer l'égalité : la loi Roudy, la loi Génisson, la loi Copé-Zimmerman, toutes ont contribué à reconnaître les femmes comme des acteurs économiques à part entière. Mais si notre arsenal législatif en matière d'égalité est probablement l'un des plus importants dans le monde, il ne suffit pas. L'égalité de rémunération a été établie voilà des dizaines d'années : elle n'est toujours pas une réalité. Depuis 2014, les entreprises de plus de cinquante salariés doivent avoir un plan d'action pour l'égalité professionnelle : 60 % des entreprises assujetties à cette obligation ne l'ont toujours pas remplie.

C'est d'une révolution culturelle globale que nous avons besoin : cela implique d'agir en faveur de l'égalité économique et professionnelle certes, ainsi que d'accélérer la lutte contre les violences sexistes et sexuelles et de garantir effectivement l'accès à la vie publique et politique ou encore la liberté des femmes à disposer de leur corps. À cet égard, nous regrettons évidemment que l'engagement du Gouvernement pour une grande loi sur l'égalité entre hommes et femmes n'ait pas été tenu, alors même que cet objectif a été proclamé grande cause nationale du quinquennat. Il nous reste désormais à avancer sur ce sujet à petits pas.

Dans cette proposition de loi, l'aspect économique a été privilégié. J'en profite pour remercier la rapporteure, Marie-Pierre Rixain, pour son travail qui nous aura permis d'aborder ce chantier avant la fin de la législature. S'agissant de l'accès des femmes aux responsabilités professionnelles et sociales, ce texte s'inscrit dans la continuité de la loi Copé-Zimmermann. Si cette loi a été un vrai succès au niveau des conseils d'administration, le ruissellement attendu dans le reste des organigrammes ne s'est pas véritablement produit et le plafond de verre continue de bloquer ou de ralentir la progression des femmes.

Il nous revient donc de poursuivre le travail contre le partage inégal du pouvoir au sein des entreprises. Je le rappelle : les quotas ne sont pas une solution parfaite, mais ils ont fait leurs preuves. Les femmes doivent pouvoir accéder aux postes de cadres dirigeants ou à l'investissement dans leurs projets d'entreprenariat : ce n'est nier ni les compétences, ni le mérite. Bien au contraire, c'est reconnaître ceux des femmes, au même titre que ceux des hommes. Néanmoins, nous ne ferons pas l'économie d'une révision des critères de l'index d'égalité professionnelle : il est encore largement perfectible pour améliorer nos données sur les inégalités professionnelles. Nous regrettons que nos amendements en ce sens n'aient pas été retenus.

Je veux enfin insister sur le double objectif qui doit être le nôtre : il faut permettre aux femmes d'accéder aux postes à responsabilités, plus valorisés, mais il est aussi impératif de valoriser et mieux reconnaître les métiers majoritairement exercés par des femmes. Ce dernier point est probablement le plus important car il concerne un nombre bien supérieur de femmes. Or la proposition de loi n'y répond pas. Briser le plafond de verre ne suffira pas si nous ne nous attaquons pas à ce « plancher collant » qui cantonne trop souvent les femmes à des postes moins rémunérés et plus précaires. Pour cela, il faudrait valoriser ces métiers féminisés, ces métiers du lien, que la crise sanitaire a remis en lumière. Il faudrait lutter contre le temps partiel subi, que les femmes occupent à plus de 80 %. Ne nous arrêtons pas à moitié du chemin, faute de quoi nous oublions la majorité de la population.

L'égalité ne s'édicte pas, je l'ai dit. Aujourd'hui nous allons voter en faveur de cette loi, qui est une grande étape, mais il faudra ensuite l'appliquer, ce qui impliquera de mener des politiques ambitieuses pour augmenter le nombre de places en crèches, aujourd'hui insuffisantes ; pour investir massivement dans l'éducation et l'enseignement supérieur ; pour contrôler l'application de ces mesures dans les entreprises, ce qui n'a pas été suffisamment fait jusqu'ici. Comme en première lecture, le groupe Libertés et territoires soutiendra cette proposition de loi.

Elle vise un enjeu qui nous concerne tous, car c'est toute la société qui gagnerait à une égalité réelle entre les femmes et les hommes.

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