C'est avec un peu d'émotion que je m'adresse à vous ce soir pour clore plus d'une année de travail au service de cette proposition de loi. Vous le savez, ce texte final est le fruit de plusieurs étapes de construction.
Nous avons passé des mois à travailler avec les organisations professionnelles agricoles qui ont toujours soutenu cette initiative, et que je remercie aujourd'hui, mais aussi avec des professionnels du droit rural dont je salue l'investissement et l'expertise.
Nous avons bénéficié d'une analyse fine du Conseil d'État qui nous a permis d'ajuster le dispositif pour nous assurer qu'il était bien en phase avec nos principes européens et constitutionnels. Il est de notre responsabilité de vérifier que nous bâtissons des textes conformes à ces principes. Le rapport rendu par la haute juridiction a confirmé la proportionnalité de ce nouveau dispositif à ces normes supérieures. Je m'en félicite, d'autant que toutes ces précautions ne nous ont pas empêchés de construire un texte efficace et équilibré qui servira le monde agricole ! Il n'en sera que plus solide.
Certains auront l'occasion d'exprimer leur désapprobation, estimant que nous n'allons pas assez loin. Légiférer ne doit pas conforter un bilan personnel mais servir les personnes concernées dans leur quotidien. Aujourd'hui, j'entends la satisfaction d'un monde agricole qui voit enfin de telles mesures mises en œuvre, après des années de réflexion sans résultats concrets.
Les débats parlementaires ont été l'occasion d'améliorer l'ensemble du texte. Le travail en première lecture a apporté les précisions nécessaires aux divers articles, dans un esprit de dialogue transpartisan. Nous avons recueilli une majorité écrasante. Des centaines de députés ont cosigné cette proposition de loi avant de la voter. Je les remercie d'avoir cru en ce projet. C'est aussi cet esprit qui a guidé les négociations avec le Sénat, sans altérer nos objectifs.
Le Président de la République, le Gouvernement, le ministre de l'agriculture ont aussi pris la mesure de l'urgence d'agir. Ils ont été des soutiens indispensables pour concrétiser nos efforts.
Cette proposition de loi n'est pas isolée, elle forme un ensemble avec d'autres lois agricoles ambitieuses qui sont autant de signes forts de l'attachement de notre majorité aux questions agricoles. Certes, ce n'est pas la grande loi foncière attendue mais elle marque une nouvelle étape pour nos agriculteurs.
Nous avons eu – et j'insiste sur ce « nous » du collectif – l'ambition de proposer un dispositif concret et inédit en Europe. Il s'agit, d'une part, de lutter contre la concentration des hectares entre les mêmes mains en agissant sur les cessions de parts des sociétés qui en ont la maîtrise et, d'autre part, de réussir à installer de nouveaux agriculteurs et consolider ceux qui en ont besoin pour leur viabilité économique.
Nous pouvons être fiers du travail accompli pour contrer les menaces qui pèsent sur le foncier agricole français. La première d'entre elles est peut-être celle qui porte sur la vitalité de nos territoires. Les exploitations agricoles les font vivre. Si nous avons encore dans nos campagnes des marchés abondants aux produits variés, c'est grâce à la présence des exploitants. Or leur nombre dépend directement du foncier disponible. La moitié des agriculteurs a plus de 50 ans et leurs exploitations sont à la veille d'être transmises : il faut agir maintenant !
Autre menace : la baisse du nombre d'exploitations, qui met en danger notre souveraineté alimentaire. N'oublions pas que la concentration excessive de terres a également un impact sur la biodiversité et l'équilibre naturel. Nous avons trop longtemps sous-estimé la fragilité de nos sols. Force est de constater que s'ils sont maltraités, leur valeur agronomique se perd inévitablement et met des décennies à se restaurer.
La qualité de nos productions agricoles, c'est l'ADN de la ferme France et elle est indissociable de la qualité de nos lieux de production. Le foncier agricole en constitue le noyau dur. Nous devons préserver ce patrimoine au service d'une activité d'intérêt général : l'agriculture.
Aujourd'hui, par l'adoption de cette proposition de loi, nous prenons nos responsabilités et nous travaillons déjà au service d'une réforme foncière plus globale. Chers collègues, ce sujet était en réflexion et surtout en souffrance depuis de nombreuses années. Une solution concrète se fait enfin jour et c'est cette législature qui va la voir naître.
Pour finir, je tiens à remercier chaleureusement tous mes collègues députés et mes soutiens qui ont compris qu'il fallait agir sans perdre davantage de temps.