Intervention de Hélène Vainqueur-Christophe

Séance en hémicycle du jeudi 18 janvier 2018 à 15h00
Indivision successorale et politique du logement outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHélène Vainqueur-Christophe :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, vous me permettrez tout d'abord d'adresser à notre collègue rapporteur, cher Serge Letchimy, mes plus sincères félicitations pour le travail qu'il a mené en bonne intelligence, avec talent et opiniâtreté, sur ce sujet. L'examen de cette proposition de loi est en quelque sorte l'aboutissement d'un long chemin initié par lui, mais aussi par nombre de nos collègues ultramarins afin de faciliter l'accès au foncier sur nos territoires.

Vous me permettrez aussi de remercier le groupe Nouvelle Gauche auquel j'appartiens, et, avec lui, l'ensemble de mes collègues, notamment de l'hexagone, qui ont choisi d'inscrire cette proposition de loi dans la première niche du quinquennat réservée à notre groupe. Preuve, s'il en fallait, que, sur ces bancs, nous sommes attachés à considérer les outre-mer comme une priorité de l'action publique.

Je peux vous l'affirmer, mes chers collègues, ces quatre petits articles sur lesquels nous sommes amenés à débattre aujourd'hui constituent une véritable révolution pour nos territoires.

En permettant de faciliter la sortie de l'indivision successorale par dérogation à la règle de l'unanimité, ce texte donne, par ailleurs, sa pleine légitimité au principe d'adaptation inscrit à l'article 73 de la Constitution. Vous le savez, pour nous, députés élus dans des circonscriptions des outre-mer, ce pouvoir d'adapter les règles nationales aux caractéristiques, contraintes et intérêts des différents territoires de la République est utile et précieux.

J'ose donc croire que, par ce texte, non seulement nous réglons des problèmes juridiques qui causent bien souvent la paralysie de nos territoires, mais aussi nous apportons une solution à des querelles familiales, souvent anciennes, qui déchirent nos compatriotes.

Il est vrai, chers collègues, que le poids de l'histoire et des drames qui l'accompagnent est encore pesant, et que notre rapport à la terre est bien souvent empreint d'un attachement symbolique fort et tenace. Du fait de son caractère apparemment protecteur à l'égard du patrimoine familial, il est donc vrai de dire que l'indivision n'est pas forcément perçue négativement sur nos territoires.

Il n'en demeure pas moins que l'évolution de ce dispositif juridique est devenue impérative, voire vitale, pour nos régions. À l'heure où je parle, le nombre de successions non réglées fait florès partout dans les outre-mer. Souvent, les partages n'ont pas été réalisés ou enregistrés selon la règle, et ce sur plusieurs générations. Nous faisons fréquemment face à une kyrielle impressionnante d'ayants droit indivisaires, allant parfois jusqu'à plusieurs centaines.

Conjuguée à la forte pression démographique et à l'urbanisation massive qu'ont connues nos territoires depuis 1945, cette impasse de l'indivision conduit à un dramatique gel du foncier, déjà très rare sur nos îles. Cette embolie foncière est d'autant plus inquiétante dans des régions où la pénurie de logement et où la problématique de l'aménagement du territoire sont cruellement endémiques.

Ainsi, je souhaite le dire franchement aux détracteurs de ce texte, il ne s'agit aucunement de faciliter la liquidation du patrimoine immobilier de nos compatriotes, de favoriser le morcellement ou d'amoindrir le pouvoir des ayants droit. Il s'agit bien, par ce texte, de lever l'entrave faite aux volontés de développer l'offre de logement dans nos pays, de réhabiliter les habitations parfois vétustes, et de permettre aux collectivités locales de lutter efficacement contre le logement insalubre et, par là même, contre le développement des épidémies. Enfin, il s'agit, parfois, de permettre de reprendre la main sur des habitations transformées en squats par des délinquants au coeur de nos villes.

Je tiens, par ailleurs, à remercier notre rapporteur d'avoir pris la précaution de préciser les situations dans lesquelles cette simplification de la procédure successorale ne s'appliquera pas, par exemple lorsqu'il s'agit du local d'habitation et que le conjoint survivant du défunt y réside. Je me satisfais aussi de voir garanti un droit d'opposition pour les indivisaires qui ne seraient pas favorables à un tel projet.

J'espère que ces précautions ne limiteront pas excessivement la portée de ce texte, tant attendu par nos populations et collectivités. Je crois donc qu'il est bon d'avoir prévu une durée d'application pour l'ensemble de ces dispositions limitée à dix ans, afin d'en évaluer l'efficacité concrète sur nos territoires.

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, le groupe Nouvelle Gauche votera ce texte avec enthousiasme et surtout avec l'espoir d'en finir avec cette problématique qui freine le développement de nos régions ultramarines.

En conclusion, je souhaite interpeller le Gouvernement sur la situation de nombreuses familles des outre-mer, non imposables et peu solvables, pour lesquelles le recours à un notaire n'est financièrement pas envisageable. Je souhaite que le Gouvernement favorise la mise en place de dispositifs d'aide financière aux familles demandeuses, afin de les accompagner dans leurs démarches, comme le font aujourd'hui certaines collectivités locales.

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