Intervention de Patrick Mignola

Séance en hémicycle du mercredi 15 décembre 2021 à 15h00
Déclaration du gouvernement relative à la présidence française du conseil de l'union européenne suivie d'un débat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Mignola :

À cette condition, une Europe de la croissance à visage humain pourra aussi devenir une Europe à la puissance démultipliée. Imagine-t-on pouvoir relever seuls le défi climatique ? C'est par nos moyens communs d'investissement que nous changerons de paradigme écologique, et nos efforts diplomatiques communs devront convaincre les pays les plus émetteurs de CO2. Nous serons aux côtés des continents les plus pauvres, pour accompagner leurs contraintes en limitant leur empreinte environnementale. Cette capacité à organiser la transition écologique passera par les attributs de la puissance, qu'il conviendra d'utiliser sans hésiter : la taxe carbone aux frontières protégera ainsi nos entreprises et nos agriculteurs, autant qu'elle sera exigeante pour nos partenaires. Cette force devra aussi s'exercer pour défendre les pêcheurs de toutes nos façades maritimes. Elle devra ramener les flux commerciaux – depuis les accords bilatéraux jusqu'aux Nouvelles Routes de la soie – à de justes principes. Nous devons concevoir les accords commerciaux internationaux non plus seulement à l'aune du prix – quitte à faire faire le tour de la terre à une vache – mais d'une éthique écologique qui permettra de remettre le monde à l'endroit.

Cette puissance collective pour relever le défi du climat devra aussi s'exercer sans trembler face aux révolutions numériques. Une avancée technologique autorise-t-elle à ne pas payer ses impôts, à enfreindre la loi et à violer la vie privée ? Or c'est ce que font les GAFA tous les jours. Leur responsabilité doit être engagée sur les appels à la violence, la manipulation de l'information et l'exploitation des données personnelles. Notre responsabilité est de protéger de leur prédation la valeur des biens culturels, dont la presse fait expressément partie. Et ils doivent payer des impôts, comme toutes les grandes entreprises, avec une fiscalité plancher pour tous. Quel serait ce monde où, selon que vous êtes puissant ou misérable, à petit, grande fiscalité, et à grand, petits impôts ? Si internet et la mondialisation nous ont fait, paraît-il, entrer dans la modernité, les réseaux, les plateformes et les multinationales doivent renoncer à leurs conduites médiévales.

Enfin, l'exercice du pouvoir européen doit nous permettre de sortir de l'indignité dans laquelle nous pataugeons face au défi migratoire. Je dis ici que chaque homme qui meurt en mer est une tache indélébile sur le visage de notre civilisation. À quoi nous sert d'avoir enfanté Goethe, Pascal et Léonard de Vinci si nous ne savons pas gérer des canots qui dérivent en Méditerranée ou qui coulent dans la Manche par défaut de politique migratoire commune, par défaut de politique commune de l'asile, par défaut de législation sur l'immigration légale, par défaut de courage ? Nous avons l'impérieux devoir de définir des politiques face à la migration, qui sera l'enjeu du siècle, qu'elle soit économique, sécuritaire ou climatique. Marielle de Sarnez avait formulé nos propositions en la matière. Des législations coordonnées, une solidarité dans la gestion des flux et une politique ambitieuse de développement des Suds, à l'instar de celle dont la France s'est dotée : tels sont les enjeux.

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