Intervention de Bruno Parent

Réunion du mercredi 10 janvier 2018 à 17h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance

Bruno Parent, directeur général des finances publiques :

Dans notre jargon, nous appelons cela le rescrit dynamique. Ce dispositif est né d'un autre champ de nos compétences, qui est celui de l'agrément. Le législateur, c'est-à-dire vous, nous donne pour des cas précis le devoir de délivrer des agréments lorsqu'un certain nombre de conditions sont remplies afin qu'une entreprise bénéficie d'un régime que la loi a prévu comme étant favorable.

Cela signifie en théorie que lorsqu'une entreprise nous présente un projet de restructuration par exemple, nous l'analysons et en déduisons que l'entreprise peut ou non bénéficier du régime de transfert de déficit ou toute autre chose de ce genre.

Mais dans les faits, les choses ne se passent pas ainsi. En réalité, un dialogue se noue, et lorsque nous signifions à l'entreprise que le schéma qu'elle présente ne respecte pas complètement l'épure, nous travaillons avec elle afin de voir si son projet peut entrer dans le cadre législatif sans pour autant dénaturer l'opération économique visée.

Je ne prétends pas que nous co-construisons la solution, mais nous n'en sommes pas loin. Et c'est de cette expérience des agréments qu'est née l'idée du rescrit dynamique.

Car il ne suffit pas de dire que face à une situation A, le régime fiscal applicable est le régime B. Il s'agit, par itérations successives, de trouver avec l'entreprise – y compris sur place, ce que ni l'agrément ni le rescrit ne prévoient pour le moment –, car nous venons à sa demande alors qu'il s'agit d'habitude du contraire, les conditions d'un dialogue. C'est cela que j'appelle un rescrit dynamique : par opposition à une réponse statique, c'est quelque chose qui se construit.

Voilà l'idée, qui certes demeure à construire et à écrire. Notre expérience est qu'en fonction des moyens dont nous disposons, il n'est pas envisageable de se consacrer au rescrit dynamique dans des proportions considérables. Or, c'est ce type d'action qui serait le plus utile à notre pays.

S'agissant de la durée des contrôles, des textes régissent déjà nos activités et limitent la durée, particulièrement dans les petites entreprises. La question de savoir ce qu'est la durée d'un contrôle s'est donc déjà posée.

Sur le plan technique, je suggère que cette durée soit bornée par la première et la dernière intervention sur place. Cela ne signifie pas qu'avant il ne se passe rien, car les entreprises sont prévenues ; cela ne signifie pas non plus qu'après il ne se passe rien, puisque le dialogue oral et contradictoire se poursuit, ce qui est heureux.

Au demeurant, nous devons élaborer le cahier des charges de cette expérimentation ; et le texte qui vous est soumis en donne les grandes lignes de façon constructive. Pour que cette expérimentation prenne corps, nous devons l'organiser et nous consacrer plus que nous l'avons fait jusqu'à présent à ce cahier des charges.

En dépit du fait que nous sommes à l'inspiration de certaines mesures, il est naturel que nous continuions à progresser ; c'est la raison pour laquelle un certain nombre d'articles vous sont soumis. Ils tournent autour de quelques idées simples : la régularisation vaut mieux que la notification de redressement, même sympathique et sans pénalité ; et la sécurité juridique constitue un enjeu tel qu'il faut l'améliorer en toute occasion.

Ainsi que vous l'avez constaté, nous incitons aux régularisations spontanées en réduisant le taux d'intérêt de retard. Nous incitons aussi aux régularisations en cours de contrôle, là aussi en améliorant le dispositif, car le but est bien que le contrôle dure le moins longtemps possible, ce qui est bon pour l'entreprise, mais aussi pour l'utilisation optimale des deniers de l'État.

Cette démarche est donc à la fois altruiste et rationnelle. Et la notion du temps dans les relations avec les entreprises est centrale, ainsi, tout ce qui concourt à réduire la durée du contrôle est-il bienvenu. C'est pourquoi nous proposons au législateur d'étendre les dispositions de l'article 62 du projet de loi, qui prévoit déjà des régularisations en cours de contrôle, en étendant son champ au contrôle des particuliers, que nous appelons sur pièces dans notre jargon.

Autant j'ai pu dire que l'article relatif aux contrôles à la demande n'avait pas connu un succès considérable, autant la régularisation au cours du contrôle a très bien fonctionné ; je pourrais dire qu'elle est devenue un produit d'appel. De fait, tout temps fiscal gagné par une entreprise est gagné pour l'économie et son développement.

Si nous constatons qu'une entreprise s'est trompée, elle paie vite et la situation est régularisée : tout le monde y gagne. Cet élément est important, car notre droit fiscal est complexe et changeant, grâce au Parlement…

Les aspects à privilégier sont donc l'incitation, la prévention des conflits plutôt que le contentieux, et la transaction avec l'entreprise – parfois critiquée –, qui est un contrat dans lequel l'État comme l'entreprise trouvent leur intérêt. Cette pratique a en outre le mérite de purger l'affaire puisqu'il y a eu accord : c'est pourquoi nous y recourons sans avoir le sentiment de biaiser la loi.

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