Intervention de Jean-Paul Dufrègne

Séance en hémicycle du jeudi 13 janvier 2022 à 15h00
Droit de révocation des élus — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Dufrègne :

Nos collègues de la France insoumise nous donnent l'occasion de discuter d'un sujet important, singulièrement dans un moment où notre démocratie est bousculée dans des proportions peu communes, comme en témoignent la violence inacceptable exercée contre les élus un peu partout sur notre territoire ou la désertion des urnes, scrutin après scrutin.

Sans jamais justifier les actes de violence, il faut chercher à comprendre ces phénomènes qui nous semblent symptomatiques du désenchantement que les Françaises et les Français éprouvent vis-à-vis de la parole politique et de leurs institutions. Ils accréditent l'idée que nous vivons une crise démocratique très profonde, appelant sans tarder une rénovation institutionnelle de grande ampleur.

Cependant, aussi vertueux soit-il, nous ne croyons pas que le droit de révocation des élus permettra de résoudre ce fléau, dans la mesure où celui-ci s'attaque aux conséquences de ce désamour démocratique et nullement aux causes.

Aujourd'hui, la défiance citoyenne à l'égard de la représentation politique est avant tout exacerbée par notre rigidité constitutionnelle. Voulue comme telle par ses pères fondateurs, la Ve République consacre de façon disproportionnée le parlementarisme rationalisé. L'exécutif dispose de pouvoirs sans équivalent dans les autres régimes démocratiques.

En outre, avec l'instauration du quinquennat présidentiel en 2000, dont le corollaire est la synchronisation du calendrier électoral, les épisodes de cohabitation sont devenus beaucoup plus hypothétiques. Cela a pour effet d'amplifier davantage la prééminence du Président de la République en accentuant le fait majoritaire, qui veut que le chef de l'État, élu avec la force du suffrage universel, entraîne dans son sillage la formation d'une majorité présidentielle à l'Assemblée nationale.

Pour le pluralisme politique, le tribut à payer est lourd. Nous devons contrecarrer cette logique mortifère en transformant notre système politique en véritable régime parlementaire. Les solutions sont connues : inversion du calendrier électoral, fin de l'élection du Président de la République au suffrage universel, élection du Premier ministre par l'Assemblée ou encore suppression de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, du vote bloqué et de tous les autres artifices du parlementarisme rationalisé.

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