…et la cellule de gendarmerie Demeter traque les militants écologistes.
Finalement, le Président de la République et La République en marche accompagnent avec soin le modèle Monsanto. La réglementation sur les pesticides est au service des firmes. Les données fournies par les industriels sont confidentielles. Le vote des États dans les comités d'homologation est secret. Tout cela découle de l'opacité des lois européennes sur les autorisations et les interdictions de pesticides.
D'ici à la fin de 2022, l'Union européenne doit de nouveau statuer sur la prolongation pour cinq ans de l'autorisation du glyphosate. Depuis le début de l'année, La France est présidente du Conseil de l'Union européenne. Elle doit donc être exemplaire et ambitieuse, en l'interdisant immédiatement. C'est ce que prévoit la proposition de loi de mon collègue Loïc Prud'homme.
La situation est dramatique. En 2016, 800 000 tonnes de Roundup – le nom commercial du glyphosate – et de ses adjuvants, ont été répandues sur la planète. En France, la réduction de l'utilisation du glyphosate n'est pas sur la bonne trajectoire pour atteindre les objectifs pourtant modestes que s'était fixés le Gouvernement, à savoir une diminution de moitié d'ici à 2022 – nous sommes en 2022. En effet, la vente de glyphosate a augmenté d'environ 42 % entre 2019 et 2020, passant de 6 000 tonnes en 2019 à 8 600 tonnes en 2020.
Or le glyphosate présente un risque avéré pour la santé et l'environnement. Depuis 2015, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) le reconnaissent comme cancérogène probable. Un nouveau rapport de l'INSERM, publié le 30 juin 2021, le confirme ; il pointe le lien entre l'exposition au glyphosate et la présence de lymphomes. Est-ce là une constatation simpliste ?
De plus, on ne compte plus les témoignages et les enquêtes sur les maladies et malformations que ce produit provoque. Selon la Mutualité sociale agricole (MSA), un agriculteur sur cinq souffre de troubles de santé directement liés à l'usage des pesticides. Le glyphosate est rarement utilisé seul, plutôt en association avec d'autres composés, qui renforcent son action.
Nous refusons que le glyphosate alimente, à l'instar du chlordécone, la pléthore des scandales d'État. En France, jusqu'en 2007, il était étiqueté biodégradable et supposé respecter l'environnement, alors même que ses résidus détruisent la biodiversité, s'accumulent dans les nappes phréatiques et contaminent les aliments. Des résidus ont notamment été retrouvés dans le miel. En 2017, l'organisation non gouvernementale (ONG) Générations futures a annoncé avoir trouvé des traces de glyphosate dans les urines de presque tous les Français testés. Sollicité par le collectif ariégeois Campagne glyphosate, j'ai accepté de me soumettre à un test. Le résultat était déconcertant : 1,167 nanogramme par millilitre. Or je ne suis pas un cas isolé : on a trouvé des traces de glyphosate dans les urines de 99,7 % des 6 796 participants.
Plus globalement, le glyphosate est un symbole d'un système agricole à bout de souffle. Verrouillé par l'agrochimie, il ravage la biodiversité. Interdire le glyphosate, c'est mener une politique contre les lobbies et pour la transition écologique. Personne ne peut ignorer combien il est difficile pour les agriculteurs et les agricultrices de vivre de leur métier, ni à quel point le modèle d'agriculture productiviste est cause de souffrance : 18 % des ménages agricoles vivent en dessous du seuil de pauvreté, selon une étude de l'INSEE parue en octobre 2021. D'après la MSA, 605 agriculteurs se sont suicidés en 2015. Ce sont des faits, monsieur le ministre, pas un constat simpliste. L'agriculture paysanne et biologique constitue la seule issue sérieuse à l'agriculture Monsanto et à la précarité des agriculteurs.
Le rapport publié en 2017 par l'INRAE confirme que l'agriculture biologique est économiquement performante : elle est davantage rémunératrice pour les paysans. Si nous changeons de modèle pour développer une agriculture vertueuse, nous créerons des milliers d'emplois, tout en protégeant la biodiversité. Les conclusions du rapport de France Stratégie sur les performances économiques et environnementales de l'agroécologie vont dans le même sens : « les exploitations agroécologiques […] sont en général plus rentables que les exploitations conventionnelles, alors que leurs exigences environnementales sont élevées ». S'il vous faut une preuve supplémentaire qu'un autre modèle est possible, pensez aux 53 000 agriculteurs et agricultrices bio qui font la démonstration que l'on peut se passer du glyphosate !
Alors comment faire ? Sortir du glyphosate implique de passer par la loi.
Nous devons offrir aux agriculteurs et aux agricultrices un cadre leur permettant d'envisager sereinement l'avenir, un engagement ferme pour la santé publique et contre les multinationales des phytosanitaires, qui doit s'accompagner d'un modèle économique qui profite avant tout aux paysans et aux paysannes. C'est la raison pour laquelle nous devons leur garantir un revenu décent durant la transition vers l'agroécologie. Nous proposons de sortir des marchés agricoles mondialisés, de garantir des prix planchers à toutes les productions, de fixer des quotas ou encore d'instaurer un protectionnisme solidaire sur des critères sociaux, environnementaux et sanitaires.
D'autres leviers d'action sont à notre disposition. Contrairement à votre ambition, il faut absolument garantir aux agriculteurs qu'ils ne vendront pas leurs produits à perte, sous la pression d'une concurrence prétendue libre et non faussée. Plutôt que de baisser les prix et les marges des producteurs, vérifions les marges des distributeurs et donnons les moyens à tous les Français d'acheter des produits de bonne qualité, en augmentant les salaires.