Intervention de Marietta Karamanli

Séance en hémicycle du lundi 17 janvier 2022 à 16h00
Réforme de l'adoption — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli :

Cette proposition de loi visant à réformer l'adoption a suscité beaucoup d'espoir. Quelques années après l'entrée en vigueur de la loi du 14 mars 2016, le régime juridique de l'adoption, qui a déjà opéré des avancées, connaît encore des lacunes auxquelles la présente proposition de loi entend remédier.

Je ferai trois observations. D'abord, nous faisons tous le constat que la situation reste anormale à la fois pour de nombreux enfants et pour des familles et candidats à l'adoption. On observe depuis 2007 une tendance à la diminution du nombre des agréments, même si cette diminution a ralenti en 2019, passant de 11 % l'année précédente à 4,5 %. Fin 2019, le nombre d'agréments en cours de validité était de 10 200. Cette même année, 3 220 enfants avaient le statut de pupille de l'État, chiffre en augmentation de plus de 6 % par rapport à 2018. Cette augmentation s'inscrit dans une tendance longue de croissance, puisque le nombre de pupilles a augmenté de 44 % depuis 2008. Parallèlement, pour 2019, seuls 690 pupilles de l'État auraient quitté ce statut à la suite d'un jugement d'adoption au cours de l'année. Ce chiffre est en baisse de 5 % par rapport à l'année précédente, la diminution étant engagée depuis 2016.

En deuxième lieu, nous sommes d'accord avec un grand nombre des dispositions de ce texte, qui est à bien des égards un texte technique, mais dont la portée humaine est forte et récurrente, et qui touche aux attentes de notre société, des enfants et des familles – attentes qui, toutes, sont fortes.

Troisièmement, plusieurs dispositions méritent, comme nous l'avons évoqué en commission, un approfondissement ou des modifications, en vue desquels le groupe Socialistes et apparentés soutiendra des amendements.

Deux principes fondamentaux sont avancés, auxquels nous souscrivons. Il s'agit, d'une part, de l'intérêt de l'enfant et, de l'autre, de la volonté de donner une famille à un enfant.

Le titre Ier de la proposition de loi entend à la fois valoriser davantage l'adoption simple et déconnecter l'adoption du statut matrimonial de l'adoptant pour autoriser l'adoption en cas de pacs ou de concubinage. Cet article met fin à une différence de traitement entre couples hétérosexuels et homosexuels mariés et non mariés. Il s'agit d'une avancée significative. Cet article, important symboliquement, l'est aussi pour la vie quotidienne des familles.

Nous nous interrogeons cependant sur les articles 11 et 13. L'article 11 bis , qui redéfinissait le régime de l'adoption au plan international, a été supprimé par le Sénat. En première lecture, j'avais précisé que le texte initial modifiait la mission des organismes autorisés pour l'adoption et recentrait leur mission sur l'adoption internationale. La proposition modifiait les règles de délivrance de l'autorisation d'exercer et ces organismes seraient demain limités dans leurs missions à l'international alors que, jusqu'à présent, ils pouvaient agir sur le territoire français. Il me semble important, monsieur le ministre, de pouvoir discuter de cette question pour faire avancer la situation. Il nous faut retenir une version du texte qui préserve une expérience humaine d'accompagnement des familles adoptantes, tenant compte des besoins tant des enfants que des futurs parents.

Enfin, l'article 13 vise à clarifier les conditions d'admission en qualité de pupille de l'État en cas de remise de l'enfant par les parents au service de l'aide sociale à l'enfance, en distinguant le consentement à l'admission en qualité de pupille de l'État, du consentement à l'adoption. Ce faisant, il propose de supprimer toute mention du consentement à l'adoption des parents qui confient leur enfant à l'ASE, situation qui concerne 10 % des enfants pupilles. En première lecture j'avais noté que cette disposition supprimait le consentement par les parents au moment où le conseil de famille envisage l'adoption de leur enfant pupille de l'État. L'association ATD Quart Monde avait fait remarquer que les raisons pour lesquelles un enfant devient pupille de l'État sont multiples. Cette qualité maintient, en tout état de cause, la filiation. Si, comme le promeut le texte dans sa version d'origine, le consentement initial des parents au statut de pupille vaut accord ou consentement à une possible adoption plus tard, le même article supprimant ainsi la filiation, la situation devient problématique et nous avons proposé des amendements sur ce point. Il convient donc de s'assurer que le texte est à la fois rédigé clairement et sans ambiguïté quant à l'absence d'automaticité entre accord au statut de pupille de l'État et accord à l'adoption.

Compte tenu de l'ensemble de ces avancées annoncées et en espérant que notre débat nous permettra d'aller un peu plus loin, le groupe Socialistes et apparentés soutiendra ce texte.

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