Si je prends la parole aujourd'hui au nom du groupe La République en marche, c'est que j'ai eu le plaisir de rapporter ce projet de loi devant la commission de la défense saisie pour avis. Celle-ci a émis un avis favorable à son adoption, qui marquera une nouvelle étape dans l'approfondissement de notre coopération de défense et de sécurité avec Maurice.
Je ne reviendrai pas sur les dispositions de l'accord qu'il nous est demandé d'approuver, car elles ont été parfaitement exposées par notre collègue Didier Quentin. Il constitue l'une des pierres qui concourra au renforcement de notre architecture de défense et de sécurité dans l'espace indo-pacifique, chaque jour plus stratégique. En témoignent la recrudescence, dans la zone, des tensions sécuritaires et politiques ainsi que de diverses revendications territoriales, qui accentuent le risque de voir émerger des crises régionales. Je pense notamment à l'attitude de la Chine, éminemment déstabilisatrice, comme au risque de résurgence de l'insécurité maritime du fait d'actes de piraterie, en particulier au large de la Corne de l'Afrique.
L'incertitude stratégique menace la stabilité de la région tout entière et doit conduire la France à s'interroger sur le rôle qu'elle ambitionne de jouer dans cette partie du monde. Or il ne fait guère de doute que, pour notre pays, l'espace indo-pacifique constitue un enjeu de premier plan.
Il l'est d'abord pour des raisons géographiques. Avec les îles Éparses, Mayotte, La Réunion et, plus loin à l'est, la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie, la France est présente dans les deux océans, l'Indien et le Pacifique. Cette large dissémination territoriale, qui confère à notre pays la deuxième zone économique exclusive au monde, impose de déployer des moyens pour assurer notre souveraineté et protéger les 1,6 million de nos ressortissants qui vivent dans ces régions.
Si cet espace indo-pacifique représente un enjeu particulier, c'est aussi parce que, dans un contexte bouillonnant, la France revendique une position de puissance d'équilibre. C'est d'ailleurs ce qui explique qu'au cours des dernières années, d'importants efforts aient été menés en faveur du renforcement de notre présence dans les enceintes multilatérales de la région. Je rappelle à ce titre que la France est membre de la Commission de l'océan Indien, seule organisation politique du sud-ouest de l'océan Indien et seule organisation africaine dont notre pays soit membre. Elle siège aussi à l'IORA avec vingt-deux autres pays, de l'Afrique du Sud à l'Australie. En outre, elle s'est dotée d'une stratégie indo-pacifique, dévoilée le 2 mai 2018 par le Président de la République.
Les enjeux de notre présence dans la zone indo-pacifique sont si cruciaux que notre assemblée s'est elle-même saisie du sujet au travers de deux missions d'information qui rendront prochainement leurs conclusions. J'ai l'honneur d'avoir été désignée corapporteure de l'une d'entre elles et, pour moi qui suis née aux Seychelles, c'est une véritable fierté que de travailler sur les questions de défense dans la région.
C'est dans ce contexte qu'intervient le renforcement de notre coopération avec Maurice. Pourquoi Maurice ? À première vue, d'aucuns pourraient s'étonner de ce rapprochement stratégique. Pourtant, la coopération de défense entre nos deux pays est importante. Elle est même quasiment inversement proportionnelle à la taille du pays. En matière de défense, nos actions de coopération sont essentiellement menées par les forces armées de la zone Sud de l'océan Indien, stationnées à La Réunion. Sur le plan opérationnel, elles concernent notamment la lutte contre le terrorisme, le renforcement de l'interopérabilité dans les trois milieux et l'amélioration de la sécurité maritime. Nous organisons aussi conjointement de nombreux exercices interarmées régionaux, comme Papangue en 2018 à La Réunion ou, depuis cette date, les exercices Phoenix sur le thème de la lutte contre le narcotrafic ou encore Varatraza, mené conjointement avec les forces malgaches, seychelloises et comoriennes.
Il me paraît d'ailleurs indispensable de continuer à conforter nos relations avec les pays de la sous-région, en profitant de notre axe Djibouti-Mayotte-La Réunion car, des côtes somaliennes au canal du Mozambique, l'ouest de l'espace indo-pacifique a parfois tout d'une poudrière qui, si elle est peu médiatisée, doit nous conduire à la plus grande vigilance.
Vous l'aurez compris, chers collègues, mon groupe soutiendra l'adoption du projet de loi, et j'invite l'ensemble de notre assemblée à faire de même.