Intervention de Didier Quentin

Séance en hémicycle du jeudi 27 janvier 2022 à 15h00
Accord france-qatar relatif au statut des forces — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDidier Quentin, rapporteur de la commission des affaires étrangères :

La commission des affaires étrangères a adopté le 1er décembre 2021 le projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre la France et le Qatar, relatif au statut de leurs forces. Cet accord, signé en 2019, vise à apporter la sécurité juridique requise à l'envoi de notre personnel militaire au Qatar et, ainsi, à renforcer notre coopération de défense avec ce pays. Il revient désormais à notre assemblée, siégeant en séance publique, d'autoriser l'approbation de cet accord. C'est l'occasion pour nous de faire le point sur le positionnement géopolitique du Qatar ainsi que sur l'état des relations franco-qatariennes, en particulier dans le domaine de la défense.

Ce qui caractérise avant tout la politique extérieure du Qatar, c'est une volonté d'indépendance, notamment à l'égard des autres monarchies du Golfe. Ce désir d'autonomie, qui s'est traduit par la création de la chaîne Al Jazeera et par un soutien aux mouvements issus de l'islam politique durant les printemps arabes, a provoqué une grave crise régionale de juin 2017 à janvier 2021. L'Arabie Saoudite, Bahreïn, les Émirats arabes unis et l'Égypte ont alors rompu leurs relations diplomatiques avec le Qatar et organisé le blocus du pays. Pendant cette crise, le Qatar a pu compter sur le soutien de la Turquie, mais aussi sur celui de l'Iran, avec lesquels il continue d'entretenir aujourd'hui des relations de bon voisinage. Cette crise régionale est désormais en voie d'apaisement.

Par ailleurs, le Qatar se pose en médiateur dans les relations avec les talibans dont il abrite, avec l'autorisation des États-Unis, une représentation à Doha depuis 2014. Il a noué des partenariats militaires avec la Turquie et l'Italie. Il a aussi une relation de défense très étroite avec les États-Unis, concrétisée par la présence à Al-Udeid de la plus grande base militaire américaine au monde hors du territoire américain – ce qui n'est pas toujours su.

Qu'en est-il de la France ? Nos deux pays entretiennent des relations depuis la déclaration d'indépendance du Qatar en 1971 et l'ouverture croisée de représentations diplomatiques en 1972. Notre coopération bilatérale s'est renforcée au cours des dernières années, tant sur le plan économique que sur le plan culturel. On peut mentionner, par exemple, le contrat de maintenance et d'exploitation du métro de Doha, remporté par deux opérateurs français, l'accompagnement apporté par la France lors des quinzièmes Jeux asiatiques organisés à Doha en 2006 ou encore l'année culturelle France-Qatar de 2020. Sur le plan de la défense, le Qatar est l'un des principaux importateurs d'armements français, notamment d'avions Rafale. Le Qatar participe à des opérations communes avec la France, par exemple dans le cadre de l'opération Barkhane. Vingt-cinq militaires français sont par ailleurs déployés sur la base d'Al-Udeid dans le cadre de la coalition contre Daech.

Quel est, dans ce contexte, l'intérêt de l'accord qui nous est soumis ? Il apporte surtout une sécurité juridique à l'envoi de personnel militaire par la France au Qatar, et inversement. Deux obligations fondamentales sont posées. Tout d'abord, la partie d'accueil ne peut pas faire participer un membre du personnel de la partie d'envoi à une activité en dehors de son territoire, sauf accord préalable. Ensuite, les membres du personnel de la partie d'envoi, ainsi que les personnes à leur charge, sont tenus au respect de la législation de la partie d'accueil.

Par ailleurs, un encadrement est apporté au statut juridique des forces déployées dans l'État partenaire, qu'il s'agisse de l'entrée et du séjour, du port d'arme, du permis de conduire, de l'accès aux services de santé ou encore de la domiciliation fiscale. En matière pénale, un partage de juridiction est prévu. Une infraction commise par un militaire français au Qatar relèvera ainsi, en principe, de la compétence des juridictions qatariennes, et seulement par exception des autorités françaises lorsque les faits reprochés se seront déroulés dans le cadre du service ou auront porté atteinte aux biens ou à la sécurité de la France ou du personnel français. En cas de poursuites devant les juridictions de la partie d'accueil, la personne concernée bénéficiera des garanties du droit à un procès équitable.

On sait que la peine de mort est toujours en vigueur au Qatar.

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