Intervention de Cédric Villani

Séance en hémicycle du mardi 1er février 2022 à 9h00
Questions orales sans débat — Démarches administratives pour les étrangers

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCédric Villani :

La dématérialisation des demandes de renouvellement ou d'obtention de titre de séjour a certes effacé les interminables files d'attente matinales devant les préfectures, mais tous les problèmes ne sont pas résolus, loin de là. Désormais, les demandeurs se heurtent bien trop souvent à l'impossibilité totale de déposer leurs dossiers. Le dispositif est complètement engorgé. C'est ce qu'on constate par exemple à la préfecture de ma circonscription, en Essonne. Dans d'autres départements, l'impossibilité d'obtenir un rendez-vous sur internet, même en réitérant les efforts durant de longues semaines, est telle qu'un marché noir des inscriptions s'est mis en place.

Quand le blocage est complet, il ne subsiste aucune autre solution que de saisir le tribunal administratif pour qu'il force les préfectures à accorder un rendez-vous, ou de solliciter tel ou tel élu ayant l'oreille de l'administration. Les conséquences de ces blocages peuvent être très graves : perte d'emploi ou de droit au travail, précarité, dénuement voire perte de logement et des aides sociales, pour les personnes concernées et pour leur famille.

La préfecture se place implicitement dans l'illégalité par son incapacité à faire avancer des dossiers que la loi exige de traiter en temps et en heure afin d'éviter que ne soient considérées comme étant en situation irrégulière les personnes ayant déposé une demande, notamment des mères d'enfants français ou des employés actifs dont le travail fait honneur à leur entreprise et à la France. Qu'on en juge : à l'heure actuelle, les dossiers de première demande déposés début 2021 n'ont toujours pas été pris en compte et l'on force les requérants à renouveler leur récépissé tous les trois mois en attendant.

À la sous-préfecture de Palaiseau, par exemple, ce sont aujourd'hui plusieurs centaines de personnes qui sont en rupture de droits. Je citerai certains cas dont j'ai eu connaissance : Abdelkader, aux précieuses compétences, dont l'employeur désespéré redoute de voir son entreprise péricliter si la procédure de renouvellement n'est pas enclenchée ; Soumia, mariée à un Français, que son chef de service s'apprête à soumettre à un arrêt de travail si elle ne reçoit pas de rendez-vous pour renouveler son visa ; Zhou, universitaire de classe internationale travaillant en France pour un prestigieux organisme d'enseignement supérieur, déboutée il y a deux ans de sa demande de naturalisation au motif futile qu'elle a participé à un colloque international et dont le recours n'est pas examiné ; Chahid, qui attend lui aussi depuis deux ans que soit traité son dossier de regroupement familial afin que son épouse désormais enceinte le rejoigne.

Devant ce tableau consternant, quels sont les moyens mis à disposition des préfectures ? Quelle stratégie comptez-vous adopter pour que les requérants soient traités dignement et qu'ils ne soient plus placés, du fait de la lenteur de la réponse administrative, dans des situations humaines absurdes et insupportables ?

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