Le 31 mars 2021, monsieur le ministre, vous avez proposé aux Mahorais de coconstruire un projet de loi pour un développement accéléré du territoire. Ce processus a rassemblé plus de 1 600 personnes de la société civile autour d'ateliers thématiques animés par le préfet et dès le 1er mai 2021, plus de 680 propositions vous ont été présentées dans ce cadre.
Le 17 décembre dernier, vous avez saisi le conseil départemental pour avis sur deux projets de loi. Le 13 janvier 2022, considérant que les propositions des Mahorais n'avaient pas été prises en compte, celui-ci a émis, à l'unanimité, un avis défavorable après une consultation organisée par son président réunissant des représentants de la société civile ainsi que l'ensemble des maires de Mayotte. Il a ensuite proposé l'ouverture de négociations permettant d'envisager une prise en compte des préoccupations régionales les plus légitimes. Le conseil économique, social et environnemental régional (CESER) s'est également montré très réservé sur ces deux textes.
Dans un entretien accordé à la presse locale ce matin même, vous dénoncez « ceux qui font perdre du temps par des calculs politiciens » et vous déclarez que « le plan pour Mayotte annoncé pour les dix ans de la départementalisation ne verra pas le jour ».
Je tiens à vous dire devant la représentation nationale que les Mahorais sont profondément attachés à cette loi et qu'ils souhaitent que le processus soit mis en œuvre sans tarder. Il importe toutefois de rappeler que le conseil départemental s'est prononcé contre le projet par vingt-six voix sur vingt-six, transcendant ainsi les clivages politiques, que les douze candidats déclarés aux législatives dans les deux circonscriptions du territoire y sont défavorables, tout comme l'ensemble des partis politiques, y compris ceux proches du Gouvernement.
Dès lors, la question posée n'est pas celle d'une politisation du débat comme vous cherchez à le faire croire pour mieux dédouaner le Gouvernement de ses responsabilités. Non, après quarante années durant lesquelles les gouvernements successifs ont décidé à notre place, il s'agit, conformément à une demande unanimement exprimée, de faire en sorte que l'État accepte enfin de nous écouter. C'est pour cela que je regrette très sincèrement la posture que vous affichez selon laquelle ce projet serait à prendre ou à laisser et qu'il n'y aura pas de discussions tant que nous ne nous agenouillerons pas.
Je dois vous avouer que ce n'est pas l'idée que je me fais du dialogue républicain au sein nos institutions. C'est la raison pour laquelle je vous suggère un rapprochement avec le conseil départemental, qui se montre pleinement disponible pour envisager une solution de sortie dans laquelle tout le monde se retrouverait : l'organisation, dans le mois à venir, d'un référendum local des électeurs sur le fondement de l'article 72-1, alinéa 2 de la Constitution, portant sur l'avis à donner sur ce projet de loi. Ainsi, les Mahorais pourront exprimer leurs souhaits et vous montrerez, en l'acceptant, votre volonté de dépasser les réticences politiciennes, si tant est qu'elles existent.