d'autant que nous en partageons le constat comme les objectifs. Il y a plus de trois ans, je vous remettais les conclusions et les 110 propositions de la mission d'information de la commission des affaires étrangères consacrée à notre stratégie en matière de diplomatie culturelle et d'influence pour les dix prochaines années, afin qu'elle devienne un puissant instrument de notre politique étrangère. Depuis l'importance géopolitique de l'espace francophone jusqu'au principe d'exception culturelle, en passant par l'Europe de la culture et des savoirs, cela fait longtemps que culture, au sens large, et diplomatie s'entrelacent.
Je le répète, la culture, l'enseignement du français à l'étranger, la francophonie doivent être au cœur de notre action diplomatique. N'en déplaise à ceux qui pensent qu'il n'y a pas de culture française, notre image à l'étranger demeure positive ; nous existons dans le regard de nombreux pays. La France se perçoit, elle est perçue comme une nation de culture, un grand pays en matière de cinéma, de gastronomie, de mode, d'industries du luxe, mais aussi de débat d'idées et d'œuvres de l'esprit. Notre influence dépendra de notre capacité à répondre à la curiosité, aux attentes que suscite la France, et surtout à les entretenir, car les temps changent. Notre pays ne peut plus, ne doit plus se reposer sur ses lauriers, se contenter d'une rente de situation. La compétition mondiale de plus en plus vive lui impose de faire partager ses idées, ses œuvres culturelles, sa vision du monde, ses concepts, sa langue, y compris dans l'intérêt de son économie : exportations, attractivité touristique. Nous devons recourir fortement à l'outil de l'influence culturelle afin de créer les conditions d'un rapprochement profond, à long terme, avec les autres pays, et de tisser des liens qui pourront se révéler décisifs. En effet, si le travail des chancelleries permet d'avoir des alliés, la diplomatie culturelle permet de se faire des amis.
Cette feuille de route trace un chemin, indique une direction, mais il ne s'agit là que de la première étape d'un long processus. Ce qu'il faut désormais, c'est l'appliquer, porter les moyens à la hauteur de nos ambitions, cesser de faire de la culture – de la culture seule – une variable d'ajustement. Au fil des années, un fossé s'est creusé entre des ambitions toujours plus grandes, toujours plus nombreuses, et des moyens financiers et humains éparpillés, souvent insuffisants. Monsieur le ministre, nous soutenons évidemment votre intention, à l'occasion de la présidence française du Conseil de l'Union européenne, de progresser sur ce point ; je regrette seulement que l'élection présidentielle tombe en plein durant le semestre que durera cette présidence, qui sera immanquablement perturbée par nos échéances démocratiques, et donc amputée.
Le temps vous étant compté, nous vous jugerons sur vos actes ; car en matière de diplomatie, hélas, nous avons pris depuis cinq ans l'habitude des grandes annonces présidentielles, des belles opérations de communication, d'un luxe de papier glacé auquel les résultats ne répondaient pas toujours. Il convient d'ailleurs de rendre hommage au travail et aux efforts des diplomates, de tous les agents de votre ministère, que je souhaite saluer et remercier, mais aussi à ceux du réseau culturel et d'influence, qui accomplissent tant avec si peu de moyens.
Monsieur le ministre, c'est un changement complet de nos pratiques qu'il faudrait opérer, en plaçant l'influence au cœur de l'organisation du Quai d'Orsay, afin qu'elle irrigue l'ensemble des décisions. Sans arrogance ni défaitisme, nous devons prendre le sujet à bras-le-corps et montrer que la France est encore capable d'écrire l'histoire, luttant ainsi contre la muséification de notre image, de notre culture. L'influence constitue pour les nations une source de puissance ; rares sont celles qui possèdent une telle capacité de projeter, de communiquer leur vision du monde. Nous, membres du groupe Les Républicains, croyons en la France pour qu'elle soit forte, puissante, ambitieuse sur la scène internationale : une France qui rayonne par sa grandeur et qui n'a pas fini de tenir son rang dans le concert des nations. C'est cette vision que nous continuerons d'avoir ; c'est ce combat que nous continuerons de mener.