Intervention de Michel Zumkeller

Séance en hémicycle du mardi 8 février 2022 à 21h30
Protection des lanceurs d'alerte - rôle du défenseur des droits en matière de signalement d'alerte — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Zumkeller :

Ne plus taire les scandales, permettre à chacun d'accomplir son devoir de citoyen en dénonçant des faits d'une gravité ou d'une dangerosité exceptionnelles dont il pourrait avoir connaissance, est une véritable avancée de notre système démocratique. Comme l'a évoqué mon collègue Philippe Dunoyer en première lecture, les lanceurs d'alerte sont en quelque sorte des « résistants des temps modernes ».

Apporter, en contrepartie, la protection nécessaire à cet acte de courage est désormais une évidence, tant ces actions sont salutaires. Un cadre juridique était nécessaire, et c'est ce que la loi Sapin 2 a apporté en 2016. Cette loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique a ainsi défini, pour la première fois, la notion de lanceur d'alerte et enserré la divulgation dans une procédure bien spécifique. Au vu des derniers scandales en date, il est apparu nécessaire de faire, cinq ans plus tard, un bilan de son application.

Grâce aux travaux menés par les deux assemblées – je pense évidemment à nos collègues Sylvain Waserman, Olivier Marleix et Raphaël Gauvain, sans oublier notre collègue sénatrice Catherine Di Folco –, nous avons pu identifier les insuffisances de ce texte ainsi que des axes d'amélioration.

Cette révision a également permis de rendre ce cadre juridique eurocompatible, par la transposition des dispositions de la directive européenne du 23 octobre 2019. En effet, la loi de 2016 a limité le champ d'application de la notion de lanceur d'alerte et les modalités des signalements. Par ailleurs, trop peu de citoyens ont connaissance du droit relatif aux lanceurs d'alerte, et la peur de subir des représailles ou de voir leur responsabilité engagée reste encore trop souvent un frein. Le texte issu de la CMP permet de remédier à ces difficultés. Nous nous réjouissons d'ailleurs que l'Assemblée et le Sénat aient su trouver un accord pour aboutir à un texte de compromis. Ce consensus est d'autant plus louable que la navette parlementaire s'annonçait délicate, car trouver le juste équilibre entre la protection des lanceurs d'alerte, la sauvegarde des secrets protégés et des intérêts des personnes mises en cause n'était pas aisé.

Avec mon groupe UDI et Indépendants, je salue particulièrement la suppression de la hiérarchisation des recours, la prise en compte des facilitateurs, les nouvelles modalités d'irresponsabilité pénale ainsi que le renforcement de l'accompagnement juridique et financier des lanceurs d'alerte. L'audition de la lanceuse d'alerte Frances Haugen par la commission des lois et la commission des affaires économique nous a bien démontré la nécessité de ces mesures.

La proposition de loi organique renforçant le rôle du Défenseur des droits propose également des changements importants. Cette autorité administrative indépendante, déjà compétente, notamment en matière de relation avec les services publics, de lutte contre les discriminations et de défense des droits des enfants, fait régulièrement la preuve de son utilité, d'autant que, désormais, plus d'un Français sur deux connaît son existence. Il est opportun d'accroître ses prérogatives, afin d'en faire une entité reconnue et centrale en la matière, mais aussi de lui donner les moyens d'action nécessaires, en créant un poste d'adjoint spécifiquement affecté aux lanceurs d'alerte, à l'instar des adjoints thématiques en fonction auprès de Mme la Défenseure des droits.

Enfin, comme tout nouveau cadre juridique, cette loi appellera, dans un second temps, la question de son effectivité. Tirant les enseignements de la loi Sapin 2, il apparaît désormais nécessaire de faire connaître à nos concitoyens l'existence de ces mesures dans lesquelles nous plaçons nos espoirs, afin qu'elles puissent en pratique faire la preuve de leur réelle efficacité.

Avec mon groupe UDI et indépendants, nous avons d'ores et déjà identifié des pistes de discussion pour nos prochains débats sur le sujet, telles que la protection financière des lanceurs d'alerte. La proposition de créer un fonds de garantie, défendue notamment par Mme la Défenseure des droits, nous paraît en effet devoir faire son chemin.

Enfin, reste la question de l'instruction de l'alerte et de son traitement effectif, y compris lorsque l'autorité compétente décide de ne pas y donner suite. Il s'agit également d'un aspect fondamental permettant d'assurer la pleine effectivité de ces mesures. Nous pourrons alors utilement nous appuyer sur les rapports portant sur le fonctionnement global de la protection des lanceurs d'alerte, que le Défenseur des droits aura désormais pour obligation de publier tous les deux ans.

Au vu des avancées apportées au bénéfice des lanceurs d'alerte, notre groupe UDI et indépendants votera ces textes issus des travaux de la CMP.

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