Intervention de Adrien Taquet

Séance en hémicycle du mardi 22 février 2022 à 21h45
Contrôle parental de l'accès à internet — Présentation

Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles :

Ce n'est pas sans émotion que je suis ici ce soir, à quelques jours de la fin de la XVe législature, pour l'adoption de cette proposition de loi dont nous partageons, avec Cédric O et l'ensemble du Gouvernement, les orientations. Il s'agit du dernier texte pour lequel j'ai à mon tour l'honneur de monter à la tribune, et je suis très heureux que ce soit à ce sujet.

Depuis que j'exerce mes fonctions, les questions de protection de l'enfance dans l'univers numérique ont pris une ampleur grandissante à la fois dans le débat public et dans mon action propre. Bien sûr, à ma nomination, j'ai d'abord mis toute mon énergie à lutter contre les violences physiques faites aux enfants. Avec un enfant qui meurt sous les coups de ses parents tous les quatre jours, mon action se tournait en priorité vers la protection physique de tous les enfants victimes de violences, notamment sexuelles, y compris – mais pas uniquement – ceux qui relèvent de l'aide sociale à l'enfance.

Au gré de mes déplacements et de mes échanges avec des parents, des rendez-vous avec des associations telles que l'Union nationale des associations familiales (UNAF), l'Observatoire de la parentalité et de l'éducation numérique (OPEN), Génération numérique, e-Enfance, le Conseil français des associations pour les droits de l'enfant (COFRADE), Point de contact, la Fondation pour l'enfance, la Fédération nationale des écoles des parents et des éducateurs (FNEPE), j'ai réalisé non pas tant l'importance – j'en étais déjà conscient, comme chacun d'entre vous – que l'urgence de la situation.

En effet, si le numérique est une chance pour nos enfants et nos adolescents, à qui il ouvre un champ immense d'apprentissage et d'enrichissement personnel, il peut aussi être une arme redoutable tournée contre eux. Entre exposition à des contenus inappropriés, confrontation à des individus malintentionnés ou tout simplement perte de contrôle dans l'usage quotidien des outils, les dangers sont nombreux. C'est pourquoi il faut agir sans attendre, sans ciller, auprès des enfants comme des parents. Tel est bien l'objet de l'action entreprise depuis trois ans.

Auprès des enfants, tout d'abord. Les actions de sensibilisation ont été nombreuses : je pense en particulier à l'annonce faite par le Président de la République, le 18 novembre dernier, du déploiement du passeport internet. L'objectif est de développer les compétences numériques des élèves dès la classe de CM1, à travers la plateforme PIX, afin de leur permettre d'être, dès leur plus jeune âge, acteurs de leur protection. Ils obtiendront ensuite en sixième, symboliquement, un passeport internet équivalant à une attestation de compétences numériques.

Bien sûr, l'effort ne peut ni ne doit reposer entièrement sur les enfants. Accompagner les parents est également essentiel. Bruno Studer le rappelait à l'instant, il n'est pas simple d'être parent à l'heure actuelle – c'est ce qu'ils nous disent. La question de la parentalité numérique est prégnante chaque jour qui passe. De nombreuses actions existent, déployées par les associations comme par les acteurs du numérique, mais elles ne sont pas encore suffisamment coordonnées ni assez lisibles, d'où un manque de visibilité pénalisant pour les parents, qui nous disent trop souvent être démunis, privés de solutions facilement mobilisables.

Afin d'y remédier, nous avons agi auprès des parents à chaque tranche d'âge de la vie de leur enfant. Pour les nouveaux parents, nous avons instauré un accompagnement qui commence dès l'arrivée de l'enfant, avec des messages clairs de santé publique relatifs à l'utilisation des écrans, que l'on retrouve dans le livret des 1 000 premiers jours, sur l'application du même nom et dans le carnet de santé rénové. Ces questions se posent en effet dès cet âge, avant les 2 ou 3 ans de l'enfant. Il est important de rappeler que les enfants se construisent par mimétisme auprès de leurs parents : passer son temps face à un écran ou sur un téléphone portable devant un jeune enfant le conditionne dans son usage futur des écrans.

Parce que les professionnels de la petite enfance sont au quotidien en lien avec nos enfants, il était aussi primordial de leur proposer une formation au numérique. C'est désormais chose faite, grâce à des modules prévus dans le cadre du plan de formation des professionnels de la petite enfance, qui concerne 600 000 professionnels – mesure présente dans le cadre de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté.

Afin d'aller plus loin et de continuer à encourager la coordination des dispositifs, j'ai, à l'occasion du dernier Safer Internet Day, annoncé un plan d'actions pour un usage raisonné des écrans. Dans le cadre de ce plan, j'ai annoncé l'organisation dès septembre 2022, sur tout le territoire, de campus de la parentalité numérique dont le premier s'est tenu ce jour-là en lien avec l'UNAF. L'objectif est d'accompagner chaque année les parents, partout sur le territoire, afin qu'ils puissent mieux protéger leurs enfants dans l'univers du numérique grâce à des actions de sensibilisation conduites par des associations qui auront reçu le label « campus de la parentalité numérique ». Ces campus porteront sur des thèmes variés, tels que l'utilisation des réseaux sociaux, le cyberharcèlement, la consommation excessive des écrans, l'accès des mineurs à la pornographie ou encore la protection des données de l'enfant.

Toutes les informations diffusées pendant les campus de la parentalité numérique sont également disponibles en ligne. Nous avons à cet effet renforcé et élargi le site jeprotegemonenfant.gouv.fr, qui devient le portail unique d'information sur la parentalité numérique, en accès libre, continu et gratuit, grâce à un travail de collaboration étroite avec l'ensemble des acteurs du numérique, comme les réseaux sociaux, les éditeurs de systèmes d'exploitation, les constructeurs de terminaux, les plateformes de vidéo à la demande, les télécoms, les éditeurs et consoliers de jeux vidéo, les chaînes de télévision et les associations d'accompagnement à la parentalité numérique.

Un campus de la parentalité numérique comportant deux volets, l'un en ligne, l'autre physique, un passeport internet, de multiples ressources, sont ainsi mobilisés pour répondre à un objectif : que la révolution des usages s'accompagne d'une révolution du soutien et de l'accompagnement des parents et des enfants.

Grâce à l'adoption de cette proposition de loi défendue par le président Bruno Studer, nous irons encore plus loin et le vote de ce soir sera une étape importante. La première remonte en réalité au 20 novembre 2019, lorsque le Président de la République a annoncé, à l'occasion du trentième anniversaire de la Convention internationale des droits de l'enfant, l'instauration future de cette disposition visant à développer le recours aux dispositifs de contrôle parental pour faciliter le dialogue entre parents et enfants et mobiliser tous les foyers autour de cette idée d'un meilleur contrôle de l'impact des outils numériques sur nos vies et celles de nos enfants.

Nous sommes très heureux, avec Cédric O, d'avoir soutenu dès l'origine cette proposition de loi du président Studer, que je remercie à nouveau de son engagement sans faille sur le sujet et sur les nombreux autres qu'il vient de détailler. Je vous remercie également toutes et tous de vous être saisis de ces questions, dans un esprit de concorde qui symbolise bien notre mobilisation et notre ambition communes lorsqu'elles concernent nos enfants. Au nom des enfants et de leurs parents, je vous remercie de permettre cette avancée – je l'espère – par votre vote.

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