Après une CMP conclusive, nous allons nous prononcer définitivement sur la proposition de loi rebaptisée par le Sénat « Contrôle parental sur internet », qui rend obligatoire l'installation d'outils de contrôle parental sur les équipements numériques pour encadrer l'accès à internet des enfants et prévenir certains risques. En quelques années, le numérique a en effet envahi notre quotidien, particulièrement celui des plus jeunes. L'arsenal législatif n'a pas suivi le même rythme, et doit être amélioré. Tout l'enjeu est de trouver un équilibre entre la protection des utilisateurs et de leurs données et le respect de leur droit à l'intimité et à la vie privée. M. Pancher l'a souligné : il ne s'agit évidemment pas que les plateformes, les fournisseurs d'accès à internet (FAI) ou les fabricants d'équipements se substituent aux parents, mais d'offrir à ces derniers davantage de moyens de protéger leurs enfants de manière éclairée. En effet, l'âge moyen auquel les jeunes sont équipés d'outils numériques est de plus en plus précoce : 44 % des 12-17 ans ont eu leur premier téléphone avant l'âge de 12 ans, et on compte en moyenne cinq équipements numériques différents par foyer.
Si l'accès à internet offre incontestablement des opportunités, il constitue aussi une source de dangers – nous le savons tous –, notamment pour les jeunes enfants en plein développement : ils sont exposés à un risque d'addiction aux écrans, de cyberharcèlement ou d'exclusion sociale. Plus de 82 % des mineurs ont déjà été confrontés à du contenu pornographique en ligne, et la même proportion des jeunes de 10 à 14 ans indique aller régulièrement sur internet sans ses parents. De leur côté, huit parents sur dix se disent préoccupés par l'utilisation que leur enfant fait ou pourrait faire d'internet. Il est donc nécessaire de mettre à leur disposition des outils pour mieux protéger leurs enfants.
La proposition de loi a été enrichie par plusieurs contributions de l'Assemblée nationale et du Sénat. Nos différents échanges et une écoute réciproque – c'est suffisamment rare pour être souligné – ont fait évoluer le texte dans le bon sens. À titre d'exemple, le décret qui arrêtera les modalités d'application du dispositif de contrôle parental sera soumis à l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) avant d'être publié. Ce sera l'occasion d'aborder les recommandations de la CNIL concernant la reconnaissance faciale, le ciblage publicitaire ou la protection des données personnelles des mineurs. De plus, les fabricants d'équipements auront l'obligation de délivrer aux utilisateurs une information sur les risques liés aux usages numériques et sur les moyens de prévention disponibles.
Le chantier reste cependant vaste, et la protection des mineurs sur internet peut se heurter aux intérêts financiers des fabricants d'équipements, des FAI et des plateformes. Ces lobbys puissants influent aussi sur le droit européen. Il est nécessaire de faire évoluer ce dernier si nous voulons mieux nous protéger, afin que nos données personnelles ne soient plus considérées comme une marchandise et que les entreprises ne puissent plus surveiller et induire notre comportement et celui de nos enfants à des fins commerciales, notamment par le ciblage des publicités, ou encore en nous incitant à passer toujours plus de temps devant les écrans, ce qui est particulièrement nocif pour les plus jeunes. En la matière, il reste beaucoup à faire – nous en avons déjà amplement débattu. Les enfants passent en moyenne quatre heures par jour devant les écrans ; or, selon plusieurs études, une exposition prolongée provoque de l'anxiété, des difficultés d'attention ou des troubles du langage et du sommeil.
Avec ce texte, monsieur le rapporteur, vous posez un premier jalon utile et bienvenu. C'est pourquoi, comme lors des lectures précédentes en commission et en séance, nous voterons votre proposition de loi.