Au nom du groupe Agir ensemble, je tiens d'abord à exprimer notre satisfaction et notre fierté de voir aboutir ce texte, dont nous sommes cosignataires et que notre assemblée avait adopté à l'unanimité en première lecture, et je veux ici remercier son rapporteur. Cher Bruno Studer, nous connaissons votre engagement de longue date en faveur de la protection des enfants sur internet. Merci d'avoir œuvré pour l'inscription de cette proposition de loi à l'ordre du jour de cette fin de législature. Vous êtes également pour beaucoup dans l'esprit d'ouverture et de bienveillance qui a caractérisé le déroulement de nos débats à l'Assemblée et nos échanges avec nos collègues sénateurs. Nous pouvons collectivement nous réjouir de l'accord trouvé en commission mixte paritaire, qui acte des avancées majeures en faveur d'un renforcement du contrôle parental pour mieux protéger nos enfants des contenus violents ou inadaptés qu'ils peuvent rencontrer en ligne.
En effet, si internet est un formidable vecteur d'émancipation, d'apprentissage et d'ouverture sur le monde, c'est aussi le terrain de jeu de prédateurs, le réceptacle de discours de haine, d'images violentes et d'engrenages qui doivent rester à distance des mineurs. Depuis plusieurs années, les témoignages de jeunes victimes de cyberharcèlement, de sextorsion ou d'exposition à des images pornographiques en ligne se multiplient et nous alertent quant à l'envers du décor d'internet. Il existe en effet un paradoxe : les enfants maîtrisent souvent mieux que leurs parents les outils numériques, mais ils en méconnaissent les dangers. On constate également un usage de plus en plus précoce du numérique : plus de 80 % des 10-14 ans se rendent régulièrement sur internet sans leurs parents, tandis que l'âge moyen d'utilisation du premier smartphone est de 9 ans et 9 mois.
Face à cela, nous avons agi, tant sur la répression que sur la prévention. C'est le sens de la loi Schiappa de 2018, qui a permis d'accroître les sanctions à l'encontre des auteurs de raids numériques. Avec la transposition de la directive sur les services de médias audiovisuels, nous avons également contraint les plateformes vidéos à mettre en place des mesures pour empêcher les mineurs d'accéder aux contenus pornographiques. L'année dernière, la loi visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste a par ailleurs renforcé la répression des infractions sexuelles commises en ligne, notamment en créant le délit de sextorsion. Enfin, en 2021, nous avons lancé la plateforme jeprotegemonenfant.gouv.fr, dédiée à l'information et à l'accompagnement de la parentalité numérique.
Toutefois, notre action ne doit pas s'arrêter là. La loi de 2004 pour la confiance dans l'économie numérique contraignait les fournisseurs d'accès à internet à informer leurs clients de l'existence d'outils de contrôle parental, mais force est de constater que leur usage est encore largement insuffisant : plus de la moitié des parents n'y ont pas recours. Il est donc primordial de simplifier et d'encourager l'installation du contrôle parental, car les outils de supervision restent la meilleure arme contre les dangers en ligne.
C'est l'objectif de cette proposition de loi qui prévoit d'obliger les fabricants à préinstaller un dispositif de contrôle parental sur tous les terminaux connectés qu'ils commercialisent. En première lecture, nous avons, à juste titre, étendu cette obligation aux vendeurs de produits reconditionnés et garanti la gratuité de ces outils.
Je me réjouis par ailleurs que la rédaction issue des travaux de la CMP ait permis de conserver plusieurs apports du Sénat qui vont dans le bon sens, comme l'interdiction de commercialiser les données collectées lors de l'activation du contrôle parental ou une meilleure sensibilisation par les fabricants aux risques liés à une exposition précoce aux écrans.
Encourager le recours au contrôle parental, c'est offrir des moyens supplémentaires aux parents pour prévenir l'exposition précoce de leurs enfants aux images inappropriées, violentes et pornographiques, mais aussi au cyberharcèlement, qui touche près d'un enfant sur cinq. C'est donc une avancée significative dans la protection des enfants et des adolescents, qui doit s'accompagner d'un renforcement conséquent de la prévention.
Dans mon rapport sur l'évaluation de la loi Schiappa, je préconisais de rendre obligatoire la mise en place de séances de prévention en milieu scolaire dédiées à l'usage du numérique et des réseaux sociaux. C'est une demande formulée par les acteurs de terrain.
Enfin, je ne peux terminer cette intervention sans évoquer le rapport de la commission sur les 1 000 premiers jours de l'enfant, présidée par Boris Cyrulnik et dont le travail nous rappelle qu'une exposition trop précoce aux écrans est particulièrement néfaste pour le développement de l'enfant, car elle entrave l'apprentissage et la construction de sa propre régulation émotionnelle.
Mes chers collègues, vous l'aurez compris : parce que nous sommes convaincus de l'importance de cette proposition de loi, le groupe Agir ensemble votera, bien entendu, en faveur des conclusions de la commission mixte paritaire.