Il fait d'abord état de son mécontentement, commençant par ces mots : « Monsieur le ministre » – il précise même, en guise de boutade, « monsieur le ministre du budget et des fonctionnaires », avec cette facétie qui me rappelle la réflexion de ma chère maman lorsque j'ai été nommé : « Je ne sais pas très bien ce que veut dire action et comptes publics. » Pour cette personne, j'étais donc ministre du budget et des fonctionnaires.
« C'est un citoyen en colère qui n'a pas l'habitude d'écrire qui vous adresse cette lettre, poursuit-il. J'ai lu dans la presse que vous étiez le ministre des administrations » – ce charmant Alexandre a mis des guillemets. « Allons bon, ça doit vous en faire, du travail ! Aussi je voulais vous faire part de ma parfaite incompréhension à la suite d'un incident qui m'est arrivé. »
« Avec mon épouse Justine, nous venons d'avoir une merveilleuse petite fille du prénom de Manon. Tout s'est merveilleusement bien passé, la grossesse comme les premières semaines » – l'enveloppe contenait une photo, que je ne montrerai pas devant la représentation nationale. « Parce qu'elle avait quelques fourmis dans les jambes, Justine a décidé de reprendre le travail plus tôt que prévu. C'est vrai, avec tout ce chambardement, Justine a oublié de déclarer à la Caisse d'allocations familiales. Résultat, non seulement nous avons dû… » – c'est Alexandre et Justine qui parlent – « … rembourser ce que nous touchions pour son congé parental, mais, en plus, on nous a fait payer des pénalités. Trouvez-vous cela normal, monsieur le ministre ? J'ai appris cela le vendredi. Arrivé à Béziers la veille, je suis allé au guichet de ma CAF. Je vous passe le fait que j'ai dû poser moi-même une demi-journée de congé, parce qu'on ne peut pas faire grand-chose à la CAF par internet. »