Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du mardi 23 janvier 2018 à 21h35
État au service d'une société de confiance — Article 2

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

Devant l'insistance de M. Jumel, qui souhaite entendre mon organe, et afin de répondre à M. le rapporteur – je ne voudrais frustrer ni l'un ni l'autre – , je tiens à prendre la parole, tout d'abord pour vous assurer, madame la députée, que le principe général du droit à l'erreur s'applique, en dehors de quelques exceptions, évidemment au cas que vous évoquez. Il est évident qu'en cas d'erreur de l'administration, la bonne foi est constituée pour l'entreprise, quel que soit son domaine d'activité, agricole ou autre, comme pour le simple contribuable. Il n'est donc pas nécessaire de le préciser dans la loi. Le faire risquerait même d'amoindrir la portée générale du texte.

Monsieur Jumel, je ne suis pas certain que le principe selon lequel « nul n'est censé ignorer la loi » soit un fondement de la République, même s'il est important. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il a été codifié et qu'on a veillé à ce que des sites, sur internet, facilitent la connaissance de la loi. Jadis, c'était le Journal officiel qui, parvenant le lendemain de sa publication dans les préfectures et les sous-préfectures de France, était censé contenir les lois et réglementations de la République.

Nous sommes tous attachés à ce que la loi de la République soit non seulement de portée générale, mais qu'elle s'applique sur tout le territoire, avec des exceptions fixées par le législateur lui-même. Pour autant, cela ne veut pas dire – et je vous renvoie à la discussion que nous avons eue tout à l'heure, ainsi qu'en commission – que les agents publics, en qui nous avons toute confiance, n'aient pas un devoir de latitude et d'appréciation. Cela me paraît d'ailleurs relever du domaine des ressources humaines, de la « conduite du changement », comme pourraient dire certains, en tout cas d'une volonté très forte de leur faire confiance.

Nous avons tous connu – vous en témoignerez, monsieur le député, vous qui êtes un élu chevronné – des cas où les agents publics eux-mêmes auraient souhaité disposer, non pas d'une latitude d'interprétation de la loi au sens où celle-ci pourrait être différente en Seine-Maritime ou dans le Nord, mais de la possibilité d'appliquer une règle correspondant à la vie réelle des gens.

Celui qui a la chance de posséder un certain capital social ou financier – voilà un argument qui devrait vous toucher et auquel je me range bien volontiers pour la défense des plus humbles – , a les moyens d'être conseillé, éclairé et même de prendre le temps d'étudier la loi. Il me semble, du reste, qu'un penseur que vous connaissez bien soulignait qu'avoir le temps de faire des études relevait d'une vision capitaliste des choses, car ceux qui ne possédaient que leur force de travail n'avaient pas les moyens de s'enrichir l'âme et de comprendre le monde complexe dans lequel ils vivaient. Cela vaut aussi pour le droit, qui est un élément de la politique, si je connais bien mon petit Karl Marx illustré.

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