La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente-cinq.
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé l'examen des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement no 201 portant article additionnel après l'article 1er.
Il s'agit de réinstaller un conseil de la simplification pour les entreprises. Un tel conseil avait été créé pour une durée de trois ans seulement et n'est désormais plus actif. Pourtant, ses nombreuses recommandations ayant été globalement reprises dans le cadre de la politique de simplification menée depuis plusieurs années, son utilité n'est plus à prouver. À cet égard, nous pouvons saluer le travail unanimement reconnu des coprésidents, Thierry Mandon et Guillaume Poitrinal.
L'amendement tend donc à réinstaurer et pérenniser ce conseil, renommé Haut Conseil de la simplification et de la réduction des délais administratifs, en élargissant son champ d'action aux particuliers et en insistant sur l'importance de la réduction des délais. J'ai eu l'occasion de m'exprimer à ce sujet en commission, mais je tiens à rappeler que la réduction des délais est une attente très forte de nos concitoyens, donc un objectif que nous devons poursuivre pour améliorer leur quotidien.
Le Conseil de la simplification pour les entreprises n'avait été créé que pour trois ans. Après avoir fait ses preuves, il s'est autodétruit, tel un message codé de la série « Mission impossible ».
Cette mission, si vous l'acceptez, serait de restaurer et de pérenniser ce conseil, en élargissant son champ d'action aux particuliers, et en insistant sur l'importance de la réduction des délais. Sur ce point, je m'associe aux propos de ma collègue Véronique Louwagie.
La parole est à Mme Florence Lasserre-David, pour soutenir l'amendement no 650 .
Cet amendement a été très bien défendu par mes collègues, aussi n'en dirai-je pas davantage.
La parole est à M. Stanislas Guerini, rapporteur de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, pour donner l'avis de la commission.
Je maintiens l'avis que j'ai rendu en commission à ce sujet, dont nous avons déjà longuement débattu. Plus qu'un comité, c'est le portage politique qui importe. Nous avons auditionné Thierry Mandon et Guillaume Poitrinal, et la majorité a fait un choix différent, dont nous avons amplement discuté. Les dispositions que nous avons retenues, tant du côté de l'exécutif avec le programme Action publique 2022 et un secrétariat d'État dédié, que de celui du Parlement, avec les réformes que vous connaissez, s'avéreront tout aussi efficaces.
Avis défavorable.
La parole est à M. le ministre de l'action et des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.
La parole est à Mme Jacqueline Dubois.
Une société de confiance est une société qui invite chacun à construire des projets de vie avec sérénité. Pour beaucoup, il est bien difficile de naviguer sur un océan de complexité administrative avec la crainte permanente de se retrouver hors-la-loi parce qu'un formulaire n'a pas été correctement renseigné ou une obligation mal comprise.
Chacun a pu faire l'expérience qu'il n'est pas toujours simple de satisfaire aux exigences réglementaires des administrations. Confrontés à quelques difficultés pour renseigner correctement les formulaires ou fournir les pièces demandées, de nombreux usagers se voient privés de certains de leurs droits tandis que d'autres renoncent simplement à les réclamer.
Emmanuel Macron avait dit, pendant la campagne présidentielle, que le coeur de la mission de l'administration ne serait plus la sanction, mais le conseil et l'accompagnement. L'article 2 propose un changement de regard de l'administration sur les usagers, un changement d'usage éminemment important pour les administrés et une société moderne. Il a pour objectif d'introduire le droit à la régularisation en cas d'erreur, sans pénalité, c'est-à-dire de permettre à un usager de rectifier une erreur si elle n'a pas été commise intentionnellement, et de ne pas être pénalisé pour cette erreur. Dès lors qu'un usager est, a priori, de bonne foi, l'administration pourra jouer un rôle de conseil pour une mise en conformité de sa situation.
Une relation de confiance implique aussi la réciprocité. C'est pourquoi il est également prévu, à l'article 2, que l'usager puisse être à l'initiative d'un contrôle, afin de s'assurer que sa situation est en règle.
Le droit de régularisation en cas d'erreur est exclu des domaines présentant des risques pour la santé, l'environnement, la sécurité des biens, des personnes, ou encore du droit européen et des contrats.
Une société de confiance devrait inviter chacun à construire sa vie avec la certitude que l'administration l'accompagne et le guide. Elle serait basée sur l'engagement et le respect mutuel…
Et bonne santé !
Bien entendu, surtout par les temps qui courent !
Nous nous penchons, à cet article 2, sur la disposition la plus emblématique du projet de loi : la reconnaissance d'un droit à l'erreur, pour les particuliers et les entreprises.
Lorsque la personne en cause régularise sa situation, de sa propre initiative ou après y avoir été invitée par l'administration, le projet de loi prévoit qu'elle ne pourra faire l'objet d'une sanction pécuniaire ou être privée d'une prestation, si du moins elle y a effectivement droit.
Si nous sommes favorables, sur le principe, à cette évolution, nous restons circonspects quant au dispositif proposé. D'une part, la notion de bonne foi n'est volontairement pas définie par le projet de loi, ce qui ouvre la porte à un certain arbitraire. D'autre part, la bonne foi étant présumée, il appartiendra à l'administration d'établir l'existence d'une manoeuvre frauduleuse ou la mauvaise foi de la personne concernée, ce qui pourrait représenter une charge de travail difficilement supportable à effectifs et moyens constants.
Nous partageons les préventions du Conseil d'État et du Conseil économique, social et environnemental. Nous nous étonnons que vous n'ayez pas pris davantage en compte leurs remarques.
Cet article porte sur le droit à l'erreur, auquel on réduit trop souvent ce projet de loi protéiforme. Il s'applique aux personnes physiques et morales qui ont fait preuve d'une méconnaissance involontaire d'une règle qui leur est applicable, et qui rectifient d'elles-mêmes leur erreur aux yeux de l'administration. L'article délimite la définition du droit à l'erreur et les domaines dans lesquels celui-ci ne s'applique pas.
En revanche, il passe sous silence un phénomène pourtant à l'origine d'un très grand nombre d'erreurs : l'inflation législative, la réformite aiguë, soit toutes les expressions qui caractérisent le fait qu'en France, nous aimons changer les règles. Quand vous êtes en plein match sur le terrain, et que l'arbitre décide de changer les règles en cours de jeu, il est normal que certains se retrouvent hors-jeu.
Le droit applicable change chaque année et il est en perpétuelle mutation. Il est donc difficile, pour les particuliers et les entreprises, d'être au fait de toutes les réformes qui les concernent directement. Tous peuvent commettre des fautes, et en toute bonne foi. Dans l'étude d'impact annexée au projet de loi, il est indiqué que « le droit à l'erreur s'appliquera en cas de première méconnaissance involontaire d'une règle applicable à la situation d'une personne. La présomption de bonne foi cessera de jouer en cas de renouvellement d'une erreur dans l'application d'une même règle », c'est-à-dire à droit constant. Or ce n'est pas toujours le cas.
C'est la raison pour laquelle j'ai déposé, sur cet article, un amendement visant à clarifier cet état de fait, en indiquant que le droit à l'erreur prend en compte les évolutions du droit. Je vous invite, bien évidemment, à soutenir cet amendement.
L'article 2 prévoit des changements importants dans la mission de l'État et de son administration en instaurant un droit à l'erreur et un droit au contrôle. Cet article contient des idées intéressantes, mais nous avons de grandes réserves quant à leur application.
Premièrement, le droit à l'erreur inverse la charge de la preuve en considérant a priori que la personne est de bonne foi. L'administration devra donc prouver la mauvaise foi de la personne mise en cause. Comment sera prouvée la mauvaise foi ? Avec les risques de contentieux et la pression que ceux-ci entraînent, ne risque-t-on pas de voir émerger une administration démunie pour sanctionner ceux qui doivent l'être ?
Deuxièmement, quelles seront les conséquences pratiques de ce droit à l'erreur généralisé ? L'application générale du droit à l'erreur pose problème. Comme le fait remarquer le Conseil d'État : « Le Gouvernement a fait le choix, que l'étude d'impact justifie insuffisamment, de reconnaître un droit à l'erreur général dans les procédures déclaratives plutôt que d'identifier, comme c'est déjà le cas en matière fiscale, celles des procédures dans lesquelles une invitation à régulariser avant sanction devrait être créée. » Cette lacune dans l'identification des procédures concernées rend difficile l'examen de ses conséquences.
Troisièmement, ce texte va-t-il simplifier la vie des Français ? Rien ne le garantit.
Enfin, le problème central de cet article et du projet de loi dans son ensemble réside dans le manque de moyens. Sans moyens adéquats, les administrations ne seront en mesure ni de contrôler ni de conseiller de manière satisfaisante les citoyens. Cela risque de conduire à un affaiblissement pur et simple de l'État, sans bénéfice pour les Français mais pouvant rapporter beaucoup de bénéfices aux grandes entreprises et aux riches particuliers en mesure d'en profiter. Pour ces différentes raisons, nous demandons la suppression de l'article 2.
Comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner, le Conseil d'État et le Conseil économique, social et environnemental ont exprimé des réserves sur les dispositions de cet article 2, en particulier s'agissant du droit au contrôle. Nous ne comprenons pas du tout votre choix de proposer des mesures de portée générale, dont les effets sont très mal maîtrisés.
Vous avez mis en place des garde-fous en excluant du droit à l'erreur les atteintes aux biens et aux personnes ou à l'environnement. Ce ne sont pas des garanties suffisantes, et les lacunes restent nombreuses. Alors que le texte foisonne d'expérimentations diverses, il aurait été plus sage de procéder à une expérimentation ou de limiter le droit à l'erreur à un nombre limité de procédures, sous bénéfice d'inventaire.
S'agissant du droit au contrôle, vous vous montrez plus imprudent : vous faites peser sur l'administration une contrainte manifestement excessive. Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l'article 2.
L'avis de la commission est le même qu'en commission : elle est défavorable à la suppression de l'article 2, qui est une pierre angulaire du texte. Nous faisons le choix de présumer de la bonne foi, mais nous avons aussi adopté, en commission, des éléments permettant de définir la mauvaise foi, qui aideront les administrations à éviter d'éventuels contentieux. Nous avons également décidé d'étendre le droit à l'erreur à toutes les administrations. Vous nous reprochez ce choix très fort, mais nous ne voulons pas d'exceptions, car c'est un droit très important que nous ouvrons à tous les Français.
Enfin, vous abordez la question des moyens. Nous avons une vraie divergence politique sur ce point. Vous dites que, pour mieux faire, il faut plus de moyens. Nous pensons le contraire : par exemple, l'administration fiscale, qui d'ailleurs applique le droit à l'erreur depuis de nombreuses années, a réduit ses effectifs.
L'impôt est-il moins bien levé ? Je ne le crois pas. Nous sommes donc clairement défavorables à ces amendements de suppression.
Défavorable.
Je ne suis pas convaincu par les arguments des auteurs des amendements, pour deux raisons. D'abord, l'administration fiscale considère que le contribuable est, par essence, de bonne foi, et cela fonctionne très bien. Ensuite, je ne comprends pas complètement votre argument : en matière judiciaire, par exemple, le principe de la présomption d'innocence implique que la culpabilité soit prouvée ; on part du principe que la personne est innocente. Tout le droit français est innervé par ce principe. Il paraît pertinent que d'autres administrations que celle de la justice considèrent le citoyen comme nécessairement de bonne foi.
Par exemple, nous considérons toujours que le ministre est de bonne foi.
C'est une règle que nous nous fixons. Nous sommes parfois déçus, mais nous partons toujours du principe qu'il est de bonne foi !
Je crois véritablement que cela s'inscrit logiquement dans nos traditions. Entre l'administration et le citoyen, le fort est l'administration. C'est au plus fort, qui a le plus de moyens, de démontrer la mauvaise foi éventuelle de l'usager du service public.
Au reste, cette disposition permettrait vraiment de modifier une certaine vision de l'administration. Beaucoup de nos concitoyens se plaignent précisément d'être mal considérés par cette dernière, se sentant systématiquement traqués, contrôlés, soupçonnés. Si l'on veut changer cette relation, il faut effectivement l'inscrire dans le droit.
Je salue cet exercice de contradiction consistant à dire que le droit à l'erreur est déjà appliqué mais qu'il faudrait quand même l'inscrire dans la loi. Ce qui est étrange dans l'avis du Conseil d'État, c'est que tout le monde est considéré de bonne foi, sauf les bénéficiaires du revenu de solidarité active – RSA – et des allocations des caisses d'allocations familiales – CAF – , qui sont considérés de mauvaise foi par principe.
Vous ne cessez de dire que le droit à l'erreur s'appliquera de manière indifférenciée à toutes les administrations, mais pour ce qui concerne les droits sociaux, il y a une présomption de culpabilité de l'assisté, qui chercherait à frauder et à profiter de l'État providence. Les bénéficiaires du RSA et des allocations des CAF sont exclus du champ du dispositif, mais les contribuables désireux de ne pas trop être embêtés par l'administration pourront en profiter. Nous sommes opposés à votre logique et nous demandons, à ce titre, la suppression de l'article 2.
De surcroît, la question des moyens restera centrale. Nous ne disons pas que, pour faire mieux, il faut être plus nombreux. Mais si l'objectif est de conforter le lien de proximité en renforçant le maillage territorial, de rétablir l'accès des citoyens aux services publics en établissant, par exemple, un accueil physique, on ne peut pas le faire avec moins de personnes. On ne peut pas couper les fonctionnaires de différentes administrations, même si, avec votre proposition de guichet unique, vous souhaitez pouvoir disposer de fonctionnaires polyvalents, qui maîtrisent à la fois la législation relative à pôle emploi, à la CAF ou au RSA. C'est impossible et cela ne conduira qu'à mettre les gens sous pression. Nous demandons la suppression de cet article, parce que le discernement existe évidemment dans l'administration.
La force du Gouvernement est de s'appuyer sur des diagnostics de bon sens, des lieux communs, des normes quelquefois déconnectées de la réalité et enquiquinant la vie des acteurs de terrain pour en tirer des réponses qui, au bout du compte, s'opposent à une logique d'intérêt général. Il le fait, reconnaissons-le, avec une certaine cohérence. Le ministre de l'économie nous explique qu'en limitant le rôle de l'État et en prenant acte du « moins d'État », il permet le « mieux d'État ». La ministre du travail a affaibli la protection du droit du travail en expliquant que cela permettrait de libérer les énergies et de créer des emplois. On mesure à quel point cela n'est pas vrai !
Désormais, le Gouvernement s'appuie de façon très démagogique sur des exemples de concitoyens confrontés à des erreurs manifestes d'appréciation pour remettre en cause un principe fondamental de la République : celui de la loi qui protège, de la République une et indivisible. Où que l'on habite, le pouvoir d'appréciation de la présomption doit être défini par le législateur. En généralisant le droit à l'expérimentation et le droit à l'erreur, en refusant de donner une définition précise de la bonne foi, vous instaurez un droit à géométrie variable. Telle est la malformation congénitale de votre projet de loi libéral.
On a bien fait de venir !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
En aucun cas, on ne peut laisser dire que le droit à l'erreur, c'est « moins d'État ».
Relisez le dispositif : le droit à l'erreur est une inversion de la logique ; c'est une présomption de bonne foi. Cela n'a strictement rien à voir avec plus ou moins d'État ! Les agents publics restent en place et continuent d'assurer leurs missions de contrôle. C'est un changement radical de mentalité : l'usager est présumé de bonne foi, et non plus de mauvaise foi. C'est cela qu'il faut bien comprendre dans l'article 2. Ne faites pas l'amalgame avec moins d'État et moins d'argent public, cela participe d'un débat différent.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Contrairement aux déclarations du Gouvernement et à ce qu'indique l'exposé des motifs, il n'est explicité nulle part dans l'article 2 que le droit à l'erreur est limité à la première erreur. Laisser le texte en l'état permettrait de graves dérives. Toute erreur considérée de bonne foi deviendrait non sanctionnable, que ce soit la première fois qu'elle est commise ou non. Nous pourrions considérer qu'une personne ayant commis une erreur du même type sera jugée de mauvaise foi, mais il est plus prudent de le préciser dans le projet de loi. Tel est l'objet de notre amendement.
Nous nous rangeons à votre avis de prudence. L'exposé des motifs et nos débats ne laissent pas de place au doute : c'est bien la première erreur qui est concernée. Nous donnons un avis favorable à votre amendement.
Je tiens à saluer le discernement du rapporteur. Il est étrange de devoir préciser cela par voie d'amendement, mais je ne veux pas polémiquer sur le sujet.
Exclamations sur les bancs du groupe REM.
Nous avons déposé, tout au long du texte, des amendements qui s'inscrivent dans la même logique. J'espère que votre bonne foi de l'instant sera une bonne foi de tous les instants.
J'espère ne pas avoir contrarié M. Bernalicis en donnant un avis favorable à cet amendement. Il serait dommage que cela l'empêche de continuer à nous faire part des aspects très intéressants de sa vie, dont nous avons eu un aperçu avant le dîner. Mais il a l'air en forme, et comme je crois que cette première fois que j'émets un avis favorable aux amendements de son groupe sera la dernière, je lui suggère d'en profiter au lieu d'être contrarié !
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
L'amendement no 620 est adopté.
L'article 2 instaure un droit à l'erreur au profit du public dans son rapport à l'administration en présumant la bonne foi des personnes physiques qui se trompent lors du renseignement d'une déclaration administrative. Les exemples de sentence administrative définitive en cas d'erreur sont nombreux, comme cet agriculteur qui, pour avoir coché la mauvaise case dans le cadre d'un formulaire « PAC » – politique agricole commune – , se voit amputé de 7 000 euros.
Le dispositif proposé accorde le bénéfice du droit à l'erreur pour toute méconnaissance involontaire de règle applicable à la situation des personnes concernées. Or une erreur n'est pas une méconnaissance. C'est bien l'erreur involontaire et technique – puisque l'erreur est par nature involontaire – qui est appelée, selon les termes de l'exposé des motifs du projet de loi, à faire l'objet de cette nouvelle mesure de clémence et de compréhension administrative.
Cet amendement, comme celui qui a été défendu par Mme Corneloup, est conforme à l'esprit du texte. Il vise à permettre à ceux qui font une erreur de bonne foi de ne pas être sanctionnés mais de bénéficier du droit à l'erreur. C'est pourquoi nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 618 .
L'alinéa 6 prévoit qu' « une personne ayant méconnu une règle applicable à sa situation ne peut pas faire l'objet, de la part de l'administration, d'une sanction [… ] si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l'administration ». L'amendement vise à faire également bénéficier de cette disposition la personne « ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation », afin de ne pas sanctionner les personnes qui commettent des erreurs de saisie, par nature involontaires.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 802 .
Cet amendement vise à élargir les dispositions de l'alinéa 6 au renseignement des formulaires, notamment de la PAC, que j'ai évoqués en défendant la motion de renvoi en commission et qui imposent de cocher une des deux options – je n'ai pas encore demandé aux uns et aux autres laquelle ils cocheraient. Or la rédaction de ces formulaires peut induire en erreur de manière involontaire : on peut avoir coché la mauvaise option en étant parfaitement de bonne foi.
Cet amendement sera complété par un autre, visant à inscrire la PAC dans le texte.
Entre la case « favorable » et la case « défavorable », je coche la case « favorable » aux amendements identiques nos 301 et 618 , dont la rédaction, en visant les erreurs matérielles, correspond le mieux à l'esprit du texte et aux échanges que nous avons eus en commission. C'est pourquoi je propose l'adoption de ces deux amendements identiques et le retrait des amendements nos 732 et 802 .
L'amendement no 732 n'est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l'amendement no 428 .
Cet amendement de précision vise, à l'alinéa 6, à insérer, après la première occurrence du mot « administration », les mots : « d'un redressement fiscal ou social ».
Le droit à l'erreur prévu à l'article 2 est un droit supplétif : il s'applique en l'absence de droit existant, notamment en matière fiscale. Ces précisions ne sont donc pas utiles. C'est pourquoi je demande le retrait de l'amendement, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement no 428 est retiré.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement no 987 .
Cet amendement vise à limiter le champ du droit à l'erreur aux seules procédures intéressant le versement des prestations sociales. Il s'agit de transformer le droit à l'erreur en un dispositif d'expérimentation en ciblant les publics les plus fragiles.
Comme nous l'avons déjà souligné, il ne nous paraît pas raisonnable de prendre, comme vous le faites, une disposition de portée générale sans précaution. Les risques sont connus, qu'il s'agisse de ceux qui sont liés à une mauvaise interprétation ou à une interprétation divergente entre les différentes administrations en matière de bonne foi ou de droit à l'erreur, des risques de contentieux ou encore de ceux qui pèsent sur la charge de travail des administrations au détriment de leur mission de contrôle.
La sagesse commande donc de circonscrire le bénéfice du droit à l'erreur à un nombre limité de procédures. Tel est le sens de l'amendement d'appel à une réécriture de l'article.
C'est un avis défavorable pour une raison de fond : nous voulons que le droit à l'erreur soit le plus général possible.
L'amendement no 987 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Florence Lasserre-David, pour soutenir l'amendement no 651 .
Avec la création des maisons dédiées à l'accompagnement des usagers, les agents des collectivités sont amenés à aider les citoyens dans leurs démarches administratives. Cet amendement vise à ce que, en cas d'erreur de saisie, l'agent qui accompagne le citoyen soit présumé irresponsable.
Il ne pourrait être reconnu responsable que s'il est prouvé qu'il a commis une faute lourde et intentionnelle.
Je demande le retrait de votre amendement, qui me semble couvert par le droit existant. Les agents administratifs sont aujourd'hui protégés dans l'exercice de leurs fonctions. Si l'agent n'a pas commis de faute lourde ou intentionnelle, sa responsabilité ne peut pas être engagée. Votre amendement est donc satisfait.
S'il n'était pas retiré, j'émettrais un avis défavorable.
Madame la députée, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement parce que, sans vouloir contredire M. le rapporteur, l'amendement no 1102 du Gouvernement portant article additionnel après l'article 40 – il est donc situé vers la fin de la discussion – couvrira d'éventuels effets non prévus du texte. C'est pourquoi le retrait du vôtre me semblerait de bonne légistique.
L'amendement no 651 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 725 rectifié .
Nous appréhendons les textes sans préjugé ni sectarisme, mais avec pragmatisme et lucidité.
Sourires sur plusieurs bancs.
L'idéologie, c'est vrai, ce n'est pas votre genre.
Je souhaite savoir si le principe selon lequel « nul n'est censé ignorer la loi », principe irréfragable de la connaissance de la loi qui fonde la République, se trouve effacé avec la généralisation du droit à l'erreur.
Le Conseil constitutionnel a fixé des limites à ce principe, pour tenir compte tant des difficultés d'accès à la loi ou de lisibilité de la loi, que de celles qui sont liées à la jurisprudence ou à la multiplication des normes, voire à l'inflation législative et réglementaire. Le Conseil constitutionnel, qui est le garant de la République, a donc fixé un cadre visant à assurer ce sacro-saint principe selon lequel « nul n'est censé ignorer la loi » : où que l'on se trouve, dans quelque situation que l'on soit, on est confronté au même principe légal. En généralisant le droit à l'erreur, ne vous asseyez-vous pas sur ce principe ? Je veux simplement comprendre.
Je ne suis pas certain que le mot « généralisation » soit le bon. Ainsi, le droit à l'erreur ne concernera pas l'écologie, afin, peut-être, de préserver la possibilité d'une forme d'écologie punitive. De plus, outre que le principe selon lequel « nul n'est censé ignorer la loi » est antérieur à la République – il a fondé le droit napoléonien bien avant l'installation de la République – , on ne saurait comparer le fait de cocher la case d'un formulaire avec la loi. Il y a, d'un côté, la loi et, de l'autre, les règlements, les formulaires, les détails et les complexités de l'administration. Si « nul n'est censé ignorer la loi », nul n'est non plus censé connaître toute la science administrative qui accompagne le fonctionnement de l'État.
Aussi intéressant soit-il, votre argument juridique me paraît quelque peu spécieux.
Chercheriez-vous une place au Gouvernement ? C'est maintenant l'opposition qui répond à la place du ministre !
C'est le nouveau monde.
L'amendement no 725 rectifié est adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Dubois, pour soutenir l'amendement no 949 .
Cet amendement a pour objet d'inscrire dans la loi qu'une personne ne peut être tenue pour responsable ou privée d'un droit pour un retard de déclaration si celui-ci est imputable à la défaillance d'une administration, que celle-ci soit liée à un problème de délivrance d'information, de documents ou à un problème informatique.
À titre d'exemple, un agriculteur de Dordogne qui déplace une partie de son cheptel en Gironde dispose de sept jours pour effectuer la déclaration de son transfert. Il ne peut toutefois réaliser cette déclaration qu'en disposant à la fois des anciens numéros d'identification en Dordogne et du nouveau numéro de cheptel pour le département de la Gironde. Or l'administration lui fournit ces numéros pour la Gironde sept mois après le transfert. L'agriculteur ne peut donc faire sa déclaration qu'après le délai imparti de sept jours, et perd ainsi la possibilité de disposer d'une aide financière à laquelle il aurait pu avoir droit.
Ce type de situation anormale et injuste peut se rencontrer dans bien d'autres domaines et secteurs : elle mérite donc d'être prise en compte.
Après avoir longuement évoqué ce point en commission, nous étions convenus que vous retireriez votre amendement pour le représenter dans l'hémicycle, la réponse étant que le présent cas est couvert par le droit à l'erreur et que la bonne foi de l'usager pourra être très facilement démontrée.
Nous étions convenus que le ministre vous confirme cette bonne application du droit que nous nous apprêtons à voter, afin que vous-même et l'agriculteur de Dordogne soyez confortés.
Devant l'insistance de M. Jumel, qui souhaite entendre mon organe, et afin de répondre à M. le rapporteur – je ne voudrais frustrer ni l'un ni l'autre – , je tiens à prendre la parole, tout d'abord pour vous assurer, madame la députée, que le principe général du droit à l'erreur s'applique, en dehors de quelques exceptions, évidemment au cas que vous évoquez. Il est évident qu'en cas d'erreur de l'administration, la bonne foi est constituée pour l'entreprise, quel que soit son domaine d'activité, agricole ou autre, comme pour le simple contribuable. Il n'est donc pas nécessaire de le préciser dans la loi. Le faire risquerait même d'amoindrir la portée générale du texte.
Monsieur Jumel, je ne suis pas certain que le principe selon lequel « nul n'est censé ignorer la loi » soit un fondement de la République, même s'il est important. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il a été codifié et qu'on a veillé à ce que des sites, sur internet, facilitent la connaissance de la loi. Jadis, c'était le Journal officiel qui, parvenant le lendemain de sa publication dans les préfectures et les sous-préfectures de France, était censé contenir les lois et réglementations de la République.
Nous sommes tous attachés à ce que la loi de la République soit non seulement de portée générale, mais qu'elle s'applique sur tout le territoire, avec des exceptions fixées par le législateur lui-même. Pour autant, cela ne veut pas dire – et je vous renvoie à la discussion que nous avons eue tout à l'heure, ainsi qu'en commission – que les agents publics, en qui nous avons toute confiance, n'aient pas un devoir de latitude et d'appréciation. Cela me paraît d'ailleurs relever du domaine des ressources humaines, de la « conduite du changement », comme pourraient dire certains, en tout cas d'une volonté très forte de leur faire confiance.
Nous avons tous connu – vous en témoignerez, monsieur le député, vous qui êtes un élu chevronné – des cas où les agents publics eux-mêmes auraient souhaité disposer, non pas d'une latitude d'interprétation de la loi au sens où celle-ci pourrait être différente en Seine-Maritime ou dans le Nord, mais de la possibilité d'appliquer une règle correspondant à la vie réelle des gens.
Celui qui a la chance de posséder un certain capital social ou financier – voilà un argument qui devrait vous toucher et auquel je me range bien volontiers pour la défense des plus humbles – , a les moyens d'être conseillé, éclairé et même de prendre le temps d'étudier la loi. Il me semble, du reste, qu'un penseur que vous connaissez bien soulignait qu'avoir le temps de faire des études relevait d'une vision capitaliste des choses, car ceux qui ne possédaient que leur force de travail n'avaient pas les moyens de s'enrichir l'âme et de comprendre le monde complexe dans lequel ils vivaient. Cela vaut aussi pour le droit, qui est un élément de la politique, si je connais bien mon petit Karl Marx illustré.
Sourires.
Monsieur Jumel, ce texte permet donc, au contraire, de protéger ceux de nos compatriotes qui n'ont pas forcément les moyens d'avoir des conseils, d'être accompagnés ou même de prendre le temps nécessaire – car nous savons que c'est indispensable, mais parfois difficile quand on a d'autres soucis dans la vie. Il protège ceux qui ont les moyens les plus modestes, car il prend le parti que la bonne foi n'a pas à être prouvée, ce qui est précisément le contraire de ce que nous avons connu jusqu'à présent.
Pour ces deux raisons – la première étant qu'il permet de l'innovation aux agents publics, à qui l'on fait confiance, et la deuxième qu'il aide tous les citoyens sans distinctions fondées sur leur capital social ou financier – , vous devriez voter ce texte des deux mains.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.
Le ministre a, semble-t-il, de solides bases de références fondamentales,
Sourires
mais qui résistent mal au principe de réalité. Nous établissons d'ailleurs un parallèle entre votre projet et la politique de rationalisation, voire de rationnement ou de réduction des moyens dont dispose l'administration publique : la fusion des régions, l'éloignement des services publics, la perte d'expertise dans certaines régions…
Ça n'a rien à voir !
… nous font craindre que, selon le territoire où l'on se trouve et selon l'administration et les moyens dont elle disposera pour forger sa libre appréciation de la loi en prenant en compte la réalité dont vous parlez, on se trouve dans des situations profondément inégales sur les plans territorial et social, et que, contrairement à ce que vous affirmez, en fonction du patrimoine social, culturel et relationnel de chacun, la force de frappe de ceux qui disposeront d'une escouade de conseillers juridiques pour aider à l'interprétation de la loi soit en faveur du plus fort, et rarement en faveur du plus faible. Voilà ce que nous pensons, sans avoir besoin de nous référer à des fondamentaux dont la relecture peut certes être parfois être plaisante : c'est la réalité de la politique d'austérité portée par la droite, continuée sous le gouvernement précédent et accélérée sous le vôtre.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
On peut rêver d'un monde qui protège les plus faibles sans pénaliser les plus forts.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
C'est juste, mais parfois, ça suppose tout de même que les plus forts redistribuent !
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je vous remercie d'avoir confirmé que le cas que j'ai cité sera considéré comme relevant de la bonne foi et je retire donc mon amendement.
L'amendement no 949 est retiré.
La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot, pour soutenir l'amendement no 1047 .
Cet amendement, construit par plusieurs membres de mon groupe qui s'investissent sur les questions agricoles, tend à souligner particulièrement le cas des corrections apportées a posteriori aux déclarations relevant de la PAC. Nous avons pu constater que, dans certains pays voisins de la France, l'on prenait des libertés dans l'application des règlements européens relatifs à la politique agricole commune, notamment lorsqu'il s'agissait de rectifier un oubli ou de considérer qu'il existait un droit à l'erreur quand il fallait, par exemple, cocher une case manquante dans la déclaration PAC.
Malgré la rigueur des textes européens, les services de l'État dans nos territoires font certes preuve de souplesse, mais d'une souplesse non officielle et variable selon les départements, de telle sorte que nous connaissons des disparités et un traitement territorial inéquitable.
C'est pourquoi, sur la base de la bonne foi de l'agriculteur, il me semble pertinent de proposer qu'il ne soit pas appliqué de pénalités financières dans le délai de vingt-cinq jours durant lequel la correction de la déclaration est autorisée.
Le besoin de souplesse est certain. Toutefois, il semble que ce principe ne puisse être consacré dans ce texte national. Monsieur le ministre, je vous remercie donc de nous communiquer l'avis du Gouvernement sur la réforme de la doyenne des politiques européennes, car, pour la PAC d'après 2020, les États membres devront envoyer leurs propositions dès mai 2018 – autant dire demain.
Madame la députée, vous invitez le ministre à prendre la parole et je vais donc la lui laisser très vite. J'exprimerai cependant une position un peu formelle sur la question que vous soulevez.
Vous souhaitez inscrire dans la loi la possibilité d'allonger les délais. Or le droit de l'Union européenne ne le permet pas aujourd'hui, car il encadre très strictement ces délais. Cette modification législative ne peut donc pas recevoir de ma part un avis favorable. Je laisse cependant la parole au ministre pour qu'il puisse vous répondre notamment à propos de la politique agricole commune.
Madame Cattelot, je connais votre engagement sur la question agricole, du fait de votre histoire personnelle et de votre circonscription, mais également du travail que vous avez accompli avec certains de vos collègues depuis le début de cette législature.
Il est évident que, comme je l'ai dit en commission, la question de l'agriculture doit être un pan important de notre action de simplification au service des agriculteurs. Comme vous l'avez très bien dit sur tous les bancs de cette assemblée, ils sont confrontés à des complexités qui, bien qu'elles ne soient pas toujours d'origine européenne, le sont parfois en raison des surtranspositions ou même des procédures réglementaires ou des circulaires que nous leur imposons.
Comme vous l'aurez constaté, et même s'il me revient aujourd'hui de représenter le Gouvernement, je ne suis pas le ministre de l'agriculture
Sourires
et je laisserai volontiers M. Travert, qui connaît bien son affaire pour être également élu d'une circonscription très agricole, le soin de défendre la position du Gouvernement dans un cadre qui me semble conforme à mon idée de départ.
Je suis favorable à toute simplification, et j'ai même regretté que certaines simplifications ne soient pas au rendez-vous lorsque nous avons commencé à les évoquer devant vous quand le projet de loi du Gouvernement a été soumis à votre assemblée.
Madame la députée, la méthode que veut adopter le Gouvernement n'est pas d'introduire des exceptions à la règle du droit à l'erreur, car, comme je l'ai dit tout à l'heure, cela amoindrirait la portée générale du texte. Les mesures de simplification évidentes qui doivent être introduites dans le monde agricole doivent figurer dans le projet de loi agricole qui est actuellement devant le Conseil d'État et qui viendra devant votre assemblée dans les prochaines semaines – sans doute, à ce que l'on m'a dit, vers le mois de mars.
Permettez-moi, madame la présidente, de faire une réponse générale qui vaudra également pour les amendements auxquels je pourrais être favorable sur le fond et défavorable sur la forme. Il me revient également de dire que tout ce qui concernera les TPE et PME relèvera de la loi portant plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises – PACTE – que défendra M. Le Maire, et que les simplifications relatives au monde militaire figureront dans la loi de programmation militaire, qui comporte évidemment un volet de simplification. Il en ira de même pour toutes les politiques publiques déclinées dans les projets de loi du Gouvernement.
Je salue donc votre travail, madame la députée, ainsi que celui de certains de vos collègues, et je comprends les préoccupations exprimées par certains orateurs, notamment par Mme Rabault, qui rappelait tout à l'heure les difficultés administratives que rencontrent certains agriculteurs : nous comprenons tous que, quand on connaît les difficultés de leur vie, il faudrait simplifier les choses pour leur éviter des difficultés financières. J'émets cependant un avis défavorable, en espérant que vous retirerez votre amendement et aurez, comme ce sera sans doute le cas, des discussions avec M. Travert dans les prochains jours.
Le vrai problème est celui de la rétention du versement de la totalité ou quasi-totalité des aides PAC lorsqu'une déclaration est mal faite ou qu'un contrôle soulève des doutes sur la déclaration et ses contenus.
Nous avons défendu cet amendement en commission, et vous ne l'avez pas retenu pour des raisons que je n'ai plus à l'esprit en cet instant. Puisque vous indiquez cependant que ces mesures seront inscrites dans le texte agricole que nous examinerons bientôt, n'omettons surtout pas d'y inscrire cette disposition. La pénalité de trésorerie provoque, en effet, de très graves difficultés économiques, qui obligent parfois l'exploitation à cesser son activité.
Je remercie M. le ministre, qui représente le Gouvernement, de son écoute et j'attends avec impatience de pouvoir échanger avec le ministre de l'agriculture et les divers groupes politiques. En France, en effet, comme vous le savez, de nombreux députés s'intéressent aux questions agricoles et à la ruralité. Je retire l'amendement.
L'amendement no 1047 est retiré.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 94 .
Dans un souci de transparence, cet amendement tend à faire en sorte que la personne en cause soit informée de la sanction prise à son encontre, mais aussi des voies de recours qui lui sont offertes. Pour ce faire, il est proposé que la personne concernée soit invitée à présenter, dans un délai de deux mois, ses observations sur les griefs qui lui sont faits et, bien évidemment, informée des voies de recours offertes.
Cette précision me semble être plutôt d'ordre réglementaire et elle viendrait quelque peu en contradiction avec l'objet de l'article 2, qui vise à avoir la portée la plus générale possible pour toutes les administrations. Elle ne serait pas opportune dans le texte et j'émets donc un avis défavorable.
Défavorable
Je soutiens cet amendement de M. Descoeur, ce qui me donne l'occasion de revenir sur l'amendement précédent.
Mais si ! Notre collègue demandait simplement d'allonger les délais accordés aux agriculteurs pour pouvoir corriger leurs erreurs. Lorsque les procédures sont dématérialisées et qu'en pleine campagne, on ne parvient pas à se connecter au réseau pour faire sa déclaration, les agriculteurs rencontrent systématiquement des difficultés pour remplir correctement ce qu'ils doivent remplir, de telle sorte que le délai de vingt-cinq jours n'est pas de trop.
Ce n'est pas l'objet du texte !
L'amendement était de très bon aloi. Je suis désolé de devoir y revenir et je m'en excuse auprès de vous, monsieur le ministre, car cela semble vous mécontenter fortement, mais nous loupons quelque chose en laissant tomber un tel amendement.
C'est là un point important. Nous allons passer quelques jours et quelques nuits ensemble, …
Monsieur Aubert, calmez votre joie. Je connais votre passion secrète pour ma personne et il serait désolant que nous puissions tous en témoigner collectivement.
Sourires.
Exclamations et rires sur divers bancs.
Ne soyez pas jalouse, madame Cattelot !
Sourires.
Monsieur Lurton, je connais votre précision. Dans le domaine agricole, comme dans tous les domaines de la vie publique, règne une telle complexité – ce qui fait d'ailleurs écho à notre texte – qu'on pourrait détailler des mesures de bon sens telles que celles qu'évoquaient Mme Cattelot et Mme Rabault.
Nous devrons cependant, tout au long de l'examen de ce texte, nous en tenir à un point de méthodologie. Tout d'abord, comme nous en avons longuement débattu en commission et au début de la discussion générale, ce texte n'est pas un texte de simplification, une liste de mesures de simplification. De fait, conformément à une circulaire du Premier ministre, chaque projet de loi du Gouvernement comprendra désormais un volet de simplification. C'est le contraire de ce que nous avons connu ces dernières années où, tous les ans ou tous les deux ans, était adopté un texte de 400 ou 600 pages d'exceptions ou de simplifications.
Ensuite, M. Reiss, dont je connais aussi la précision au sein de votre groupe, a été le premier à attaquer le texte que je présente, en lui reprochant d'être encore un texte fourre-tout de simplification – bien que Mme Le Pen ait déclaré que, pour elle, le terme de « fourre-tout » n'était pas négatif, à moi, il ne semble pas être tout à fait positif. Il s'agit là d'un angle mort pour un tel texte : on pourrait multiplier à l'envi les mesures de bon sens, elles seraient toutes légitimes mais feraient perdre la cohérence générale du texte.
Je vous demande donc un peu de patience. Je vous ai expliqué que le Gouvernement serait prêt à étudier ces dispositions dans les semaines qui viennent, dans le cadre d'un projet de loi agricole qui va prochainement vous être soumis.
Enfin, permettez-moi aussi de relever une contradiction. M. Dive, dont j'ai apprécié tout à l'heure l'intervention, frappée, comme à l'accoutumée, au coin du bon sens, déplore une inflation législative. Or, monsieur le député, c'est là une pierre dans votre jardin, car, à ma connaissance, c'est au Parlement qu'il appartient de légiférer, voire de refuser les lois que lui propose le Gouvernement. Il s'agissait donc sans doute de votre part d'une autocritique bienvenue.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Je constate qu'en même temps que vous regrettiez la possibilité d'une inflation législative pour les Français, votre groupe a déposé sur ce texte plus de la moitié des amendements qui créent de nouveaux droits.
Mêmes mouvements.
Je ne vous blâme pas, je dis simplement que nous avons collectivement la tentation – c'est le cas de la majorité, et peut-être aussi du Gouvernement – …
Il y en a moins de 3 %, madame Louwagie.
C'est donc parfois la tentation du Gouvernement et de certains de mes collègues que de pousser certaines mesures à la faveur de ce texte. Vous ne manqueriez alors pas de me le rappeler.
À titre de remarque liminaire à nos débats, je nous invite donc à éviter de dresser une liste des simplifications de bon sens que nous pourrions insérer et que nous attendons depuis longtemps.
Ainsi, monsieur Lurton, ne me faites pas le procès de refuser des amendements de bon sens, car vous savez que je partage ce bon sens avec vous. Cependant, vous aurez également compris que je ne suis pas habilité à refaire, thème par thème et politique publique par politique publique, toute la politique administrative du Gouvernement.
Je ne reviens pas sur les tentatives éhontées du ministre de donner de sa personne pour essayer de séduire l'opposition. En revanche, je note une contradiction dans votre argumentaire, monsieur le ministre : vous refusez des amendements au motif qu'un grand texte sur l'agriculture sera examiné prochainement alors que le projet de loi comporte des dispositions sur la régionalisation des chambres d'agriculture. Si nous devons parler d'agriculture, utilisons le véhicule législatif du mois de mars plutôt que celui-ci !
Vous affirmez ne pas vouloir alourdir le texte. Sachez que l'opposition se tient à votre disposition pour vous aider dans cet échenillage : on pourrait commencer par les éoliennes ou d'autres dispositions qui sont relativement éloignées de votre objectif initial. Vous avez, en commission, convoqué Les douze travaux d'Astérix. Mais il est possible de réduire la charge de travail.
L'amendement no 94 n'est pas adopté.
Pardonnez-moi, monsieur le ministre, d'avoir déposé un amendement, mais le dépôt d'un amendement relève de la procédure législative qui, bien entendu, ne doit pas être confondue avec l'inflation législative.
C'est l'histoire des Shadoks !
Cet amendement de principe tend à préciser qu'une personne ayant déjà fait l'objet d'une procédure de régularisation en cas d'erreur ne peut être sanctionnée pour la même méconnaissance d'une règle si les circonstances de droit ont évolué depuis sa dernière régularisation.
L'étude d'impact indique que le droit à l'erreur s'applique à droit constant.
Absolument !
Pour lever toute ambiguïté, l'amendement propose une clarification en indiquant que le droit à l'erreur prend en compte les évolutions du droit, à l'instar des alinéas 15 et 16 qui prévoient la non-opposabilité des conclusions formelles d'un contrôle à l'administration en cas de changement des circonstances de droit.
C'est un défi de logique que vous nous soumettez. Je vais essayer d'y répondre de manière logique.
Nous avons adopté un amendement qui visait à reconnaître la première méconnaissance d'une règle. Si le droit a changé, la règle qui avait été méconnue n'est plus la même. On ne pourra donc pas être sanctionné pour la méconnaissance puisqu'il ne s'agit plus de la même règle. Votre amendement me semble largement satisfait par le texte. Je vous demande donc de le retirer.
Défavorable.
Une interprétation a posteriori des lois peut aller dans le mauvais sens et permettre de sanctionner des erreurs.
M. Dive nous donne l'occasion de clarifier les choses. Une mauvaise interprétation pourrait permettre de revenir sur l'erreur initiale. On sait que le droit peut changer pendant l'instruction dans certaines procédures. Ce problème peut se poser en matière d'urbanisme ou de financement. Il faut absolument clarifier cette situation pour que le droit à l'erreur puisse être appliqué de manière cohérente et apaisée dans le temps.
De deux choses l'une. Soit le droit a changé pendant votre procédure d'appel de bonne foi, si vous me permettez l'expression – avouez que vous n'avez pas beaucoup de chance, car l'instauration du droit à l'erreur a précisément pour objet la reconnaissance immédiate de la bonne foi dans les relations avec l'administration. Il est alors évident que ce changement de législation est un élément constitutif de la présomption de bonne foi, tout comme l'erreur de l'administration renforce cette présomption.
Soit vous considérez que le droit change sous l'effet de l'inflation législative, qui est sans doute la conclusion de la procédure législative – pour qu'il y ait inflation, encore faut-il qu'il y ait procédure auparavant.
Pour lesquelles vous habilitez le Gouvernement, monsieur le député, à moins de méconnaître la Constitution.
Vous considérez que le droit constant est celui qui est appliqué dans la République – c'est pourquoi le Gouvernement ne peut pas accepter votre amendement, car il vient amoindrir la portée générale du texte. Tant que nous parlons du droit et de sa fabrique au Parlement, le droit n'est pas appliqué. Mais lorsqu'il est promulgué, il devient le droit constant. Votre amendement, qui pose une question de logique, est satisfait par le texte actuel. Il est d'ailleurs heureux que nous l'étudiions à vingt-deux heures trente seulement, car, à une heure du matin, le débat aurait sans doute été différent. Je vous invite donc au retrait de l'amendement, sinon j'y serai défavorable
L'amendement no 78 n'est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l'amendement no 449 .
Cet amendement tend à préciser la notion de mauvaise foi, au bénéfice du particulier ou de l'entreprise, en demandant un écrit contresigné par le supérieur de l'agent qui procède au contrôle.
Cet amendement, comme le précédent du même auteur, relève du domaine réglementaire. Il ne faut pas, dans la loi, entrer dans des considérations procédurales aussi précises. Avis défavorable.
L'amendement no 449 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Monsieur le rapporteur, vous dites refuser les exceptions et souhaiter que tous les Français soient égaux. Mais, pour reprendre une phrase d'un célèbre humoriste que chacun connaît, certains sont plus égaux que d'autres, moins égaux en l'occurrence : ce sont les agriculteurs.
L'erreur qui serait commise par un agriculteur, notamment dans sa déclaration de surface dans une demande d'aide au titre de la PAC, serait sanctionnée et ne pourrait pas bénéficier de la largesse dont profitera le contribuable qui se trompe dans sa déclaration fiscale. Pourquoi ? Parce que le régime des sanctions relève exclusivement de la compétence du commissaire européen. C'est évidemment une injustice supplémentaire commise à l'égard de nos agriculteurs, qui connaissent déjà de graves difficultés et sont confrontés à une bureaucratie complexe à manipuler.
Voilà une conséquence très concrète de l'abandon de notre souveraineté juridique : la représentation nationale est condamnée à l'impuissance face aux dérives bureaucratiques de Bruxelles, qui empoisonnent chaque jour la vie de nos agriculteurs. Ne venez pas nous parler d'égalité dans ces circonstances parce que les agriculteurs sont excessivement fâchés – et on les comprend – de cette situation.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 510 .
Avis défavorable. Ne vous en déplaise, la France ne souhaite pas se soustraire ou déroger à la législation européenne.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 803 .
Nous avons bien saisi que le texte ne concerne pas la législation européenne. L'amendement prévoit que le droit à l'erreur s'applique aux volets de la PAC qui relèvent des décisions de l'État français.
Si des sanctions sont prévues par la loi française, le droit à l'erreur s'applique. Si ces sanctions sont issues du droit européen, nous assumons l'exception au droit à l'erreur pour la législation européenne. Avis défavorable.
Défavorable.
Monsieur le ministre, dans le cas que j'ai cité précédemment d'une erreur de bonne foi sur un formulaire qui n'a pas été rédigé par l'Union européenne mais par vos services, parce qu'ils ne comprennent pas ce qui leur est demandé – moi-même, je n'ai pas compris – , les agriculteurs peuvent-ils, oui ou non, invoquer le droit à l'erreur tel qu'il est prévu par le texte dont nous débattons aujourd'hui ?
Madame Rabault, la réponse est oui. Si le droit à l'erreur est invoqué au sujet d'une législation européenne, le texte ne s'applique pas. S'il est prouvé qu'il s'agit d'une procédure française, établie par le pouvoir réglementaire ou législatif, le droit à l'erreur s'applique pour l'agriculture comme pour toute autre activité.
Je vous invite, une nouvelle fois, à défendre les mesures de simplification pour le monde agricole, qui sont toutes frappées au coin du bon sens, dans le texte que présentera le ministre de l'agriculture. M. Guerini m'a dit qu'il portera personnellement tous les amendements relatifs à l'agriculture dans ce cadre. Vous pouvez compter sur lui !
L'amendement no 803 n'est pas adopté.
Les règles relatives à la préservation de l'environnement sont très nombreuses et viennent nous rappeler l'enjeu majeur qu'elle constitue. Mais la luxuriance de ces règles ne nous permet pas de nous prémunir contre les conséquences de la multiplication des modifications desdites règles.
L'article exclut du champ d'application du droit à l'erreur l'ensemble des sanctions prononcées en cas de méconnaissance de ces règles. Cette exclusion est trop large. Il est donc proposé d'inclure les sanctions administratives et de maintenir l'exclusion des sanctions pénales.
L'amendement no 76 est retiré.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 89 .
Au regard de la complexité des normes environnementales qui ne cessent d'évoluer et d'être modifiées, il semble peu légitime de les exclure de l'application du droit à l'erreur. Bien que l'environnement constitue un enjeu majeur, il est difficile d'accepter que les règles sanctionnant le non-respect des normes de préservation de ce dernier soient toutes écartées. L'amendement vise donc à restreindre l'exclusion aux seules sanctions pénales. Le droit à l'erreur s'appliquerait aux sanctions administratives qui seraient prononcées en cas de méconnaissance des règles.
Si nul n'est censé ignorer la loi, l'usager est en droit de ne pas avoir pris connaissance de toutes les modifications en temps réel du code de l'environnement. Je rappelle qu'il comporte 2 623 pages et qu'il a connu quatre-vingt-sept modifications pour la seule année 2016, soit plus d'une par semaine, portant sur près de mille articles. Ce seul exemple témoigne de manière édifiante de l'inflation législative qui s'est abattue sur nos concitoyens, sans parler des arcanes insondables de l'administration.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l'amendement no 306 .
Je ne m'étends pas, car l'amendement reprend le même exposé des motifs et poursuit le même objectif que les précédents.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 328 .
Ce n'est pas la même chose !
S'agissant du droit à l'erreur, monsieur le ministre, quel est le domaine dans lequel la réglementation a le plus explosé depuis vingt ans ? Celui du droit de l'environnement !
Or vous voulez l'exclure. Il faut voir ce que l'on entend lorsque les gens de terrains, nos concitoyens, viennent nous voir !
Que n'entend-on pas !
Ils nous disent qu'ils ont subi un contrôle, qu'ils n'étaient pas exactement là, qu'ils n'ont pas bien rempli tel document… Je ne comprends pas pourquoi ni au nom de quoi vous excluez le droit de l'environnement du champ du droit à l'erreur. Telle est la question soulevée par ces amendements identiques, déposés par des collègues de toutes sensibilités.
Les amendements identiques ont déjà été bien défendus. Il est vrai qu'il y a, en matière d'environnement, une inflation de normes absolument phénoménale. D'ailleurs, en France, nous faisons toujours plus que ne l'exige la réglementation européenne, ce qui va sans doute rendre difficile l'application de ce texte en matière de réduction des normes. En tout cas, nous ne voyons pas pourquoi l'environnement serait exclu du champ d'application du droit à l'erreur. C'est pourquoi nous vous demandons d'insérer le mot « pénales » après le terme « sanctions » à l'alinéa 11.
L'alinéa 11 indique que le droit à l'erreur n'est pas applicable dans les domaines de la santé publique, de la sécurité des personnes et des biens et de l'environnement, où les intérêts fondamentaux doivent être défendus. Nous assumons cette exclusion. La restriction que vous voudriez apporter en ne visant que les sanctions pénales amoindrirait très fortement cette exception, et nous ne souhaitons pas aller dans ce sens. Cependant, je comprends que l'on puisse ne pas tenir compte d'une erreur tout à fait bénigne qui touche à l'environnement. C'est pourquoi je propose, dans l'amendement qui suit, d'introduire la notion de « préservation directe » de la santé, de la sécurité des personnes et des biens et de l'environnement, afin de préciser l'intention du législateur. Je pense que votre proposition serait excessive, pour la raison que j'ai énoncée. J'émets donc un avis défavorable sur les amendements identiques.
Je constate que le rapporteur et le Gouvernement adoptent une position relativement sage, ce qui est très bien. Par ailleurs, je relève qu'un certain nombre de mes collègues ont pratiqué un copier-coller assez intense de l'exposé des motifs.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Je ne sais pas d'où vient ce texte préconçu, qui se retrouve entre différentes mains en même temps. Il est toujours assez étonnant de voir ce genre de phénomène apparaître à l'Assemblée nationale. Je voulais le signaler à ce moment de nos débats.
Quoi qu'il en soit, certains éléments de cet article relatif au droit à l'erreur touchent au code de l'environnement et nous semblent aller déjà trop loin. En la matière, il ne faut pas bouger d'un pouce ; il ne faut rien céder, pas un seul millimètre de terrain, car la planète, elle, n'attend pas nos longs et tumultueux débats.
« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe REM.
Je voudrais réagir à l'explication donnée par M. le rapporteur pour justifier son avis défavorable. Contrairement à ce que vous venez de dire, monsieur le rapporteur, ce n'est pas du tout une volonté d'amoindrir les droits fondamentaux qui nous a poussés à déposer ces amendements. Nous voulions, au contraire, souligner le fait que, en matière d'environnement comme dans d'autres domaines visés par le texte, un certain nombre de dispositions sont aujourd'hui tellement mouvantes que les administrés ne sont pas toujours au fait de la réalité des textes…
… et qu'une erreur peut conduire à des sanctions disproportionnées au regard de l'intention initiale. Je peux vous citer de nombreux exemples ; nous l'avons déjà fait en commission et nous n'allons pas nous livrer de nouveau à cet exercice ici.
En tout cas, ne nous faites pas passer pour des gens qui veulent à tout prix s'en prendre à l'environnement, …
Vous nous surprenez, monsieur le rapporteur. En commission, vous avez présenté un amendement dont l'adoption a fait tomber un certain nombre d'amendements que nous avions déposés ou qui nous a conduits à les retirer préalablement. En effet, alors que le texte initial prévoyait que le droit à l'erreur n'était pas applicable « aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement », vous aviez proposé de remplacer le mot « préservant » par « portant atteinte à », ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Finalement, ce soir, vous souhaitez revenir en arrière en introduisant les mots « préservant directement ». Vous avez élargi le champ en commission, et vous souhaitez désormais le restreindre. Il faut que vous nous expliquiez ce revirement. En tout cas, je pense que ce n'est pas du tout acceptable.
Comme je l'ai indiqué à l'instant, il vise à introduire l'expression « préservant directement » pour bien traduire notre intention, qui est d'inclure l'environnement dans le champ de l'exception – décision que nous assumons, je le répète – , mais en visant les cas où l'erreur commise entraîne un dommage sur l'environnement.
Cet amendement a pour principal objectif de clarifier la rédaction de l'alinéa 9 tel qu'il est issu des travaux de la commission spéciale. En effet, ce ne sont pas les règles qui peuvent porter atteinte à un enjeu fondamental, c'est le non-respect desdites règles. Nous proposons donc de maintenir la référence à la notion d'atteinte aux règles tout en l'insérant plus logiquement dans l'alinéa en question.
Lors de nos travaux en commission, la rédaction de l'alinéa 8 du texte initial – devenu l'alinéa 11 du texte que nous examinons ce soir en séance publique – a été modifiée par un amendement du rapporteur, ainsi que l'a rappelé notre collège Véronique Louwagie. Or il est nécessaire de clarifier cette nouvelle rédaction dans un souci de précision. En effet, ce ne sont pas les règles qui portent atteinte à l'un des intérêts fondamentaux mentionnés : c'est le non-respect de ces règles qui peut avoir un tel effet, et il faut que cette atteinte soit réellement constatée. C'est pourquoi nous proposons, par cet amendement, de remplacer le mot « portant » par « lorsqu'il y a ».
J'ai besoin d'une précision, car je ne comprends pas exactement la portée de votre amendement no 722 , monsieur le rapporteur. Prenons un cas d'école, qui se présente d'ailleurs très souvent : un exploitant agricole intervient sur un cours d'eau le lendemain de la date à partir de laquelle il n'est plus censé le faire, et il y a sanction. Dans ce cas précis, l'application des sanctions les plus lourdes sera-t-elle ou non exclue par votre amendement ? Les gens qui nous regardent et nous-mêmes avons besoin de la réponse.
Pour ma part, je reste perplexe, monsieur le rapporteur, car vous faites machine arrière par rapport à la démarche qui a été la vôtre en commission. Je voudrais vraiment comprendre ce qui s'est passé ; il faut que vous nous l'expliquiez. La rédaction initiale était en réalité assez restrictive en ce qui concerne l'application du droit à l'erreur dans le domaine de l'environnement, puisqu'elle était exclue dès lors qu'il y avait une méconnaissance des règles préservant l'environnement. Vous avez probablement constaté vous-même que c'était trop restrictif compte tenu du volume et de la complexité de la législation en la matière, comme l'ont rappelé un certain nombre de nos collègues. Donc, vous êtes allé quelque peu dans notre sens en disant qu'il fallait considérer uniquement les dispositifs qui portaient atteinte à l'environnement. Or ce n'est pas du tout la même chose ; la différence est même énorme. Je vous invite à bien saisir la nuance, chers collègues de la majorité. Finalement, monsieur le rapporteur, vous revenez en arrière en restreignant encore plus que ne le prévoyait le texte initial.
Si, monsieur le rapporteur, l'expression « préservant directement » est encore plus restrictive. En tout cas, il faut vraiment que vous nous expliquiez pourquoi vous adoptez aujourd'hui une démarche différente de celle que vous avez eue en commission. Nous avons besoin de comprendre ; nous ne pouvons pas adopter un amendement de cette manière.
L'idée reste la même. La rédaction adoptée en commission semblait plus solide au regard des échanges que j'ai pu avoir notamment avec la Gouvernement. En tout cas, je veux vous rassurer : si la non-application de la règle n'a aucune conséquence sur l'environnement, comme c'est le cas dans l'exemple que vous avez cité, monsieur Viala – je pense qu'il est bon – , s'il s'agit simplement d'une erreur formelle, du non-respect de dates, mais que le cours d'eau n'est absolument pas endommagé, nous ne sommes pas, selon moi, dans le champ de l'exception. La rédaction que je propose, « préservant directement », répond à cette situation – je ne sais pas s'il faut que le ministre le précise lui aussi pour que les échanges que nous avons dans cet hémicycle aient une valeur jurisprudentielle. Cette formulation précise l'intention du législateur quant à la finalité du texte : il faut que l'environnement soit sacralisé, si je puis dire, et donc que le droit à l'erreur ne puisse pas avoir de conséquence néfaste pour l'environnement – c'est le sens de l'exception prévue, que nous assumons – , mais, s'il s'agit d'une erreur formelle qui n'a aucune conséquence sur l'environnement, il faut alors que l'usager puisse bénéficier du droit à l'erreur. J'espère m'être exprimé de la manière la plus claire possible. Tel est le sens de mon amendement.
Je souscris tout à fait aux propos de M. le rapporteur : à partir du moment où son amendement sera adopté, en cas d'erreur formelle qui n'a aucune conséquence sur l'environnement, comme dans l'exemple que vous avez pris, monsieur Viala, le droit à l'erreur s'appliquera, bien sûr.
Il y a le principe de la bonne foi, et il s'agira d'une constatation : si le cours d'eau est pollué, il y aura une atteinte à l'environnement ; s'il ne l'est pas, il n'y aura pas d'atteinte à l'environnement. Ensuite, il pourra y avoir un contentieux en cas de désaccord entre l'administration et l'administré, mais on sortira alors du cadre du droit à l'erreur.
Vous estimez, monsieur Viala, qu'il serait dommage que le droit à l'erreur ne s'applique pas en cas d'erreur formelle quand bien même celle-ci serait commise dans le domaine de l'environnement. Ainsi que le rapporteur l'a très bien dit, il s'appliquera dès lors qu'il n'y a pas de conséquences sur l'environnement, que nous souhaitons effectivement protéger. Je crois que l'amendement du rapporteur non seulement remplit les conditions posées lors du débat en commission, qui vous a amené à retirer vos amendements, mais répond aussi à vos interrogations.
J'insiste sur le fait que « porter atteinte » et « préserver », ce n'est pas la même chose.
Une atteinte est une chose que l'on va constater, alors que la notion de préservation est sujette à interprétation, …
… car on peut préserver par anticipation. Dans un cas, il y a un élément factuel ; dans l'autre, il peut y avoir une supposition. Les deux notions n'ont pas la même signification.
Nous allons entrer dans un contentieux, car si on lit a contrario l'amendement no 722 du rapporteur, il faut bien considérer que la méconnaissance des règles préservant indirectement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement, entre dans le champ du droit à l'erreur.
Monsieur le rapporteur, vous pensez que l'amendement précisera les choses ; à mon sens, il les complexifiera encore davantage. C'est pourquoi je vous mets en garde. Pouvez-vous nous confirmer que la méconnaissance des règles préservant indirectement la santé publique entrera dans le champ ? Je vous rappelle que je fais une lecture a contrario de votre amendement.
Nous parlons ici des règles « préservant directement ». La rédaction antérieure – « portant atteinte » – n'avait pas de signification très forte, ce qui posait problème. Je le répète, nous considérons ici les règles qui préservent directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement. C'est ainsi qu'il faut lire l'amendement.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 333 .
La tablette étant hors connexion, je regrette plus que jamais mon bon vieux papier…
Sourires.
De toute façon, j'ai défendu l'amendement. Il s'agit d'une nouvelle rédaction d'un amendement que j'ai déjà présenté.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
Je crois que nous pouvons remercier les services de l'Assemblée : ils ont enfin trouvé un moyen matériel permettant que M. de Courson défende plus vite ses amendements.
Rires.
Avis défavorable.
L'amendement no 333 n'est pas adopté.
Je l'ai déjà défendu. L'amendement s'inscrit dans la continuité des précédents, et sa rédaction relève de l'exercice de style : « Mourir vos beaux yeux, belle marquise, d'amour me font. » Nous proposons d'insérer les mots « dont le non-respect emporte une atteinte directe et immédiate à », rédaction encore plus précise que la vôtre, monsieur le rapporteur, et qui ne peut que vous séduire.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 202 .
Il s'agit de préciser le périmètre d'exclusion du droit à l'erreur. Nous souhaitons réduire ce droit dans les situations qui ont un impact sur l'environnement, c'est-à-dire quand le non-respect des dispositions de la réglementation crée une atteinte directe et immédiate à l'environnement.
L'adoption de l'amendement apporterait une réponse précise à certaines situations, puisqu'il exclurait du champ de la limitation du droit à l'erreur le non-respect des réglementations qui n'aurait aucun impact sur l'environnement et ne lui porterait aucune atteinte. Je le répète : l'amendement apporterait une vraie réponse à toutes ces situations très complexes.
Comme les précédents, l'amendement porte sur le périmètre d'exclusion du droit à l'erreur. Nous l'avons dit à plusieurs reprises : la notion de préservation de l'environnement est extrêmement large. Il faut donc apporter des précisions utiles à notre débat.
Si l'on peut comprendre certaines exceptions à un droit à l'erreur de portée générale, notamment au titre de la santé publique et de la sécurité des personnes, l'exclusion globale du champ de l'environnement paraît excessive à ce stade.
J'ai dit tout à l'heure que le droit à l'erreur envisagé ici est supplétif, c'est-à-dire qu'il prévaudra sauf si s'applique un autre droit. En l'occurrence, le code de l'environnement contient des articles qui créent cette possibilité. Plutôt que d'en faire la lecture exhaustive, je vous renvoie aux articles L. 171-7 et L. 171-8, qui précisent que l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine et qui ne peut excéder un an.
L'article L. 171-8 dispose que « l'autorité administrative compétente met en demeure la personne à laquelle incombe l'obligation d'y satisfaire dans un délai qu'elle détermine. » L'amendement est donc satisfait par le droit existant. Avis défavorable.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 204 .
L'amendement vise à préciser la conduite que doit suivre l'administration lorsqu'une personne qui a demandé à faire l'objet d'un contrôle prévu par la loi ou la réglementation est visiblement de mauvaise foi ou agit de manière abusive ou dans l'intention de compromettre le fonctionnement du service, voire de mettre l'administration dans l'impossibilité matérielle de conduire son programme de contrôle.
La procédure qui vous est proposée est relativement facile à mettre en oeuvre par l'administration. Elle permet au demandeur d'être informé des suites données à sa démarche et de faire formaliser, de façon tout à fait transparente, par l'administration le refus qui lui est opposé et le fait que le contrôle n'a pas pu avoir lieu.
L'amendement pose un problème de forme, puisqu'il propose d'introduire après l'alinéa 13 une précision qui pourrait figurer après l'alinéa 19. Sur le fond, le code de relations entre le public et l'administration prévoit déjà que toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception « sauf en cas de demandes abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique ». L'objet de l'amendement est couvert par cette précision, à moins que vous ne proposiez qu'il soit répondu systématiquement aux demandes répétitives, mais je ne pense pas que ce soit le cas.
Je vous suggère, par conséquent, de retirer l'amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement no 204 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement vise à protéger les personnes en situation précaire de la suspension de leurs prestations du fait d'erreurs qu'elles auraient commises en toute bonne foi. Aujourd'hui, dans un nombre significatif de situations, les bénéficiaires de certaines prestations voient leurs droits suspendus du fait de retard ou d'erreur lors de la mise à jour de leurs données, ce qui entraîne parfois une réelle difficulté financière, particulièrement insupportable quand les intéressés vivent seuls avec des enfants, ne disposent pas plus de 400 ou 500 euros par mois et dépendent presque exclusivement de ces revenus.
La mesure proposée permettrait aux bénéficiaires de mettre leurs données à jour sans pour autant être privés des prestations habituellement versées. Elle rendrait les administrations responsables d'une sorte de devoir d'alerte ou d'information permettant aux personnes de compléter ou rectifier la déclaration avant suspension des allocations.
Conscients de la portée assez large de l'amendement, nous proposons que la disposition fasse l'objet d'une expérimentation. Dans un premier temps, celle-ci pourrait être limitée aux caisses d'allocations familiales et donner lieu à un bilan après un ou deux ans. Nous pourrions fixer ensemble le délai permettant de déterminer la portée et l'efficacité de la mesure.
Il est parfois utile, lors des débats en commission, de renvoyer un amendement à la discussion en séance. Celui-ci a, en effet, été retravaillé. Cela dit, l'amendement no 1103 du Gouvernement répond à votre demande, monsieur Fuchs. Il propose, lui aussi, une expérimentation limitée aux caisses d'allocations familiales.
Je vous suggère, par conséquent, de retirer votre amendement au bénéfice de celui du Gouvernement.
Je précise à M. Fuchs et à M. Taquet, qui a exprimé la même préoccupation par voie d'amendement et en intervenant oralement en commission, que le Gouvernement, comme il s'y était engagé afin de répondre à cette préoccupation légitime, a déposé un amendement no 1103 portant article additionnel après l'article 2, inspiré par la même philosophie.
Nous aurons l'occasion d'en reparler. À mon tour, monsieur Fuchs, je vous suggère de retirer l'amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable. Si l'amendement du Gouvernement ne correspond pas tout à fait à votre demande, vous aurez l'occasion de le sous-amender.
L'amendement no 1103 est inspiré par la même philosophie que le mien, mais il me semble qu'il ne résout pas certaines situations. Nous verrons cela quand nous l'examinerons. En attendant, je retire mon amendement.
L'amendement no 688 est retiré.
Votre décision de ne pas donner de définition claire de la bonne foi, au prétexte discutable de maintenir pour les administrations une certaine souplesse sur la présomption de bonne foi dans le cadre du droit à l'erreur, fait difficulté. Dans son avis sur l'avant-projet de loi, le Conseil économique, social et environnemental nous alerte sur les risques de cette situation pour les activités de contrôle nécessaires à l'accomplissement des missions confiées à l'administration.
En lui imposant d'apporter la preuve de la mauvaise foi, alors que, souvent, elle ne disposera pas des moyens en personnels lui permettant d'instruire la demande, vous ouvrez la porte aux comportements abusifs. Nous proposons donc, avec cet amendement, que la présomption de bonne foi ne puisse s'appliquer aux redevables qui ne pouvaient pas ne pas connaître leurs obligations déclaratives, critère déjà engagé par l'administration des douanes pour écarter la bonne foi dans l'appréciation du droit à l'erreur.
En pratique, il s'agit d'écarter du bénéfice de la bonne foi les usagers les plus à même d'exploiter les failles du dispositif pour déroger à leurs obligations, notamment les grandes entreprises, qui disposent de compétences et de conseils juridiques, ainsi que les riches particuliers recourant à des conseils juridiques.
Sur le fond, je comprends votre préoccupation. Mais je pense qu'une telle disposition affaiblirait vraiment le principe que nous avons choisi pour cet article, qui consiste à prendre la bonne foi au sens le plus large possible, et de laisser à l'administration le soin de définir la mauvaise foi.
Depuis quelques années, l'administration fiscale pratique le droit à l'erreur, ce qui a donné lieu à un contentieux. De cette situation, qui a nourri nos débats, il ressort que cette administration a su définir la mauvaise foi. C'est pourquoi nous avons adopté l'amendement visant à préciser ce qu'elle est. Ne nous lançons pas dans une multitude de détails pour essayer de spécifier toutes les situations de bonne foi potentielle.
L'administration fiscale a reconnu, par exemple, que certains administrés – vous citez ceux qui sont bien accompagnés, mais on peut aussi songer à ceux qui exercent la profession d'experts-comptables – ne peuvent pas ne pas connaître le droit et entrent donc dans le champ de la mauvaise foi. Mieux vaut conserver cette rédaction.
J'émets un avis défavorable sur l'amendement.
Je comprends bien la réflexion du rapporteur. Cela dit, on sait qu'une entreprise du CAC 40 dispose d'un arsenal juridique pour savoir si elle peut ou non bénéficier du droit à l'erreur, et utiliser les failles du dispositif. Il ne me semblerait donc pas logique de reconnaître qu'une telle entreprise est de bonne foi.
Vous ciblez les redevables qui ne peuvent pas ne pas connaître leurs obligations déclaratives. Je vous invite toutefois à la vigilance, parce que c'est cette formule, et non l'exposé des motifs, qui figurerait dans la loi. Or, nous ne savons pas quelles entreprises vous visez, quelle devrait être leur taille maximale – il peut s'agir de petites comme de grandes entreprises – et, surtout, quels titulaires de droits sociaux vous entendez préserver. En effet, quelqu'un qui perçoit ses allocations sociales depuis dix ou quinze ans ne peut pas ne pas connaître ses droits : il pourrait être tout aussi bien victime de votre zèle que la grande entreprise du CAC40 que vous visez. Je pense donc que votre proposition est à double tranchant. Votre rédaction, qui est particulièrement poreuse, risque soit de vider le texte de toute portée pratique, soit de mettre en porte-à-faux de petits comme de gros acteurs.
Très bien !
L'amendement no 793 n'est pas adopté.
Un des changements majeurs introduits par cet article est de considérer a priori de bonne foi la personne mise en cause. La charge de la preuve est donc inversée : c'est à l'administration de réunir les éléments permettant d'établir la mauvaise foi de l'usager. Or, comme l'a dit notre collègue, en matière fiscale, l'article 1729 du code général des impôts fait du caractère délibéré du manquement le critère de la mauvaise foi. À cet égard, il nous paraît important que l'appréciation de la mauvaise foi par l'administration ne repose pas uniquement sur la volonté de la personne mise en cause mais prenne aussi en compte les moyens dont elle dispose pour connaître les règles de droit auxquelles elle est soumise. Ainsi, une grande entreprise disposant de services juridiques en interne et de conseils juridiques externes devrait être plus facilement jugée de mauvaise foi qu'une petite entreprise ne disposant pas des mêmes connaissances juridiques.
Il en va de même d'un riche contribuable recourant à des conseils juridiques. Il est nécessaire que le droit à l'erreur et la bonne foi ne soient pas utilisés comme un prétexte à la négligence par ceux qui ont les moyens de connaître les règles qu'ils doivent respecter. Le Conseil d'État lui-même souligne le risque que le droit à l'erreur soit détourné de son objectif initial par les grandes entreprises et les riches particuliers ; en effet, il considère que le projet du Gouvernement « pourrait emporter des effets d'aubaine au bénéfice des personnes les plus à même de connaître le droit qui leur est applicable et de disposer, en interne, de compétences et de conseils juridiques adaptés à leur situation. »
Nous craignons que certaines entreprises ou certains particuliers calculent les risques qu'ils encourent à ne pas respecter la loi tout en bénéficiant du droit à l'erreur. Or cette démarche est caractéristique de la mauvaise foi. Par cet amendement, nous demandons donc que l'appréciation de leur mauvaise foi tienne compte de ces critères.
Je suis très mal à l'aise face à ces amendements, tels qu'ils sont rédigés, car ils sous-entendent qu'un gros acteur, une grande entreprise ne peut pas bénéficier, par nature, d'une présomption de bonne foi, tandis qu'un gentil allocataire de prestations sociales est, par nature, de bonne foi. Je caricature à peine ! Mais votre présentation va, je le répète, placer en porte-à-faux ces petits acteurs. En effet, une entreprise qui, de bonne ou de mauvaise foi, commet une erreur et augmente son bénéfice de 0,01 % peut échapper aux restrictions que vous avez définies. En revanche, un allocataire des prestations sociales qui double ses revenus, accidentellement ou non, même en faisant preuve de mauvaise foi et en soutenant le contraire, peut tout à fait entrer dans le cadre que vous avez fixé. Tel que vous l'avez rédigé, votre amendement est donc trop poreux : vous ne pouvez pas cibler sans le dire un certain nombre d'acteurs. L'enfer, on le sait, est toujours pavé de bonnes intentions.
Nous proposons de faire preuve de discernement en la matière. M. le ministre rappelait précédemment, en faisant référence à des principes classiques, notamment marxistes, qu'il ne suffit pas de dire que nul n'est censé ignorer la loi, qu'il existe une inégalité entre ceux qui maîtrisent la loi, peuvent s'orienter dans les méandres législatifs, et les autres. Il s'agit précisément de cela, de rappeler que certains bénéficient des services d'un avocat d'affaires, d'une expertise comptable, pour analyser la loi et, en toute mauvaise foi, essayer de truander. De fait, la petite PME n'a pas accès à tous ces services. Vous vous trompez donc en considérant, au moyen de cette énumération fourre-tout, que cette mesure aura des effets inadaptés sur la petite entreprise, la multinationale et l'allocataire du revenu de solidarité active. Ce dernier, en effet, n'a pas recours à un avocat fiscaliste, …
… et n'entre pas dans le champ de notre amendement. Mais peut-être me trompé-je et avez-vous des exemples à nous proposer pour illustrer le contraire.
Cet amendement vise à corriger une inégalité de fait entre une très grande entreprise, qui a les moyens de tester juridiquement une administration et d'aller jusqu'au contentieux, et une PME. Face à cette réalité, nous proposons de prendre en compte le fait qu'une entreprise dispose des moyens juridiques et techniques d'appréhender la loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 624 n'est pas adopté.
Nous proposons, par cet amendement, de supprimer les dispositions relatives au droit au contrôle. Le Conseil d'État a, vous le savez, jugé sévèrement ce dispositif, estimant que son champ d'application, extrêmement vaste, pourrait porter atteinte au bon fonctionnement de l'administration dès lors que celle-ci devra faire droit à la demande de contrôle dans un délai « raisonnable », indépendamment de ses moyens et de ses effectifs. Il a en outre considéré que le projet du Gouvernement « pourrait emporter des effets d'aubaine au bénéfice des personnes les plus à même de connaître le droit qui leur est applicable et de disposer, en interne, de compétences et de conseils juridiques adaptés à leur situation ». L'opposabilité des conclusions du contrôle, quand bien même l'administration aurait commis une erreur lors de ce dernier, constitue également une difficulté. L'administration devrait, en tout état de cause, disposer elle-même d'un droit à l'erreur, et toujours faire prévaloir le droit sur ses propres prises de position, au risque, dans le cas contraire, d'atteinte grave aux principes d'égalité devant la loi et de neutralité de l'administration. Lorsque l'administration constate des manquements lors de sa visite de conseil, la logique voudrait également qu'elle contrôle ensuite la mise en oeuvre, par l'auteur de la demande du contrôle, des recommandations formulées. À défaut de recherche d'une position d'équilibre entre mission de conseil et mission de contrôle, nous ne pouvons que demander la suppression de ce dispositif.
Je ne suis évidemment pas favorable à la suppression de ce dispositif, le droit au contrôle, qui est l'une des deux mesures fortes de cet article 2. Vous mentionnez le risque que l'administration soit déstabilisée et ne puisse pas répondre à la demande. Or, l'alinéa 19 de l'article me paraît assez raisonnable et protecteur de l'administration ; il dispose en effet que l'administration peut ne pas procéder à ce contrôle lorsque la demande a manifestement pour effet de « compromettre le fonctionnement du service » ou de la mettre « dans l'impossibilité matérielle de mener à bien son programme de contrôle. » Ces dispositions répondent, me semble-t-il, à votre préoccupation. Avis défavorable.
L'amendement no 530 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Barbara Bessot Ballot, pour soutenir l'amendement no 578 .
Cet amendement vise à obtenir un retour d'expérience concret pour en tirer les conséquences ; il propose ainsi un test, à titre expérimental. Toutefois, compte tenu de nos discussions, je le retire.
L'amendement no 578 est retiré.
Cet amendement a été défendu par plusieurs de nos collègues en commission spéciale. Comme nous avons le devoir d'écrire la loi de manière précise, faute de quoi le Conseil constitutionnel pourrait estimer que le législateur fait preuve d'incompétence négative, il convient d'expliciter ce qu'est un délai « raisonnable » : un délai qui « ne peut être inférieur à quatorze jours calendaires ».
L'article 2 instaure un droit au contrôle au bénéfice de toute personne de bonne foi, sur des points précis d'un domaine s'appliquant à sa situation. De fait, il paraît nécessaire de préciser la durée du délai dans lequel l'administration doit procéder au contrôle demandé. Le présent amendement prévoit qu'il ne devra pas excéder deux mois. En effet, il est indispensable que les usagers de bonne foi puissent obtenir rapidement une expertise de l'administration, afin de ne pas voir leur situation bloquée. Je suis toutefois hésitant, car je m'aperçois, par comparaison avec l'amendement de Mme Rabault, que nous avons deux conceptions différentes de la notion de « délai raisonnable ». L'amendement de Mme Rabault vise à préserver les capacités de l'administration à répondre aux demandes, tandis que le nôtre a pour objet d'éviter à l'administré d'être lésé par un délai de réaction trop long de l'administration. Peut-être faudrait-il encadrer ce délai par un minimum et un maximum.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement identique no 93 .
Dans le même ordre d'idées, la notion de « délai raisonnable » est un concept flou dont l'application aléatoire peut être de nature à induire, chez la personne faisant l'objet d'un contrôle, le sentiment d'être traitée de façon discriminatoire, puisqu'elle doit, elle, répondre dans un délai strictement encadré. Si nous voulons instaurer une relation de confiance entre les usagers et l'administration, il convient d'assurer une équité de traitement en édictant clairement le délai pendant lequel l'administration doit procéder au contrôle.
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l'amendement identique no 540 .
Si le texte doit être « au service d'une société de confiance », il me semble que l'on doit être précis dans l'usage des termes. En effet, un délai « raisonnable », sans autre précision, ne peut pas inspirer de la confiance aux usagers. C'est pourquoi nous proposons un délai de deux mois.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement identique no 344 .
Suivant la même logique, il s'agit de préciser la durée du délai « raisonnable », d'autant plus que l'administré est souvent astreint, dans ses rapports avec l'administration, à des délais assez courts.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l'amendement no 335 .
Cet amendement a pour objet de préciser que le délai d'intervention de l'administration ne peut excéder trois mois.
Il y a deux types d'amendements, de nature très différente. Premièrement, s'agissant de l'amendement de Mme Rabault, qui prévoit que le délai raisonnable ne peut être inférieur à quatorze jours, je répéterai ce que j'avais dit à nos collègues qui avaient défendu cet amendement en commission : nous nous trouvons dans le cadre du droit au contrôle ; dès lors que l'administré procède à cette demande, il est censé être prêt à en faire l'objet et il ne me semble pas nécessaire de fixer un délai minimal pour lui laisser le temps de se préparer. S'il souhaite avoir un peu plus de temps, il peut reporter sa demande. L'avis est donc défavorable, quant au fond, sur cet amendement.
Deuxièmement, je comprends l'intérêt qui peut s'attacher à la fixation d'un délai pour que l'administration réponde à la demande de contrôle. Mais, là encore, dans cet article, nous visons à offrir le droit le plus large possible, qui a vocation à s'appliquer à toute administration et à toute demande de contrôle. J'ai lu précédemment un passage de l'alinéa 19, en vertu duquel l'administration doit garder une certaine marge de manoeuvre. À cet égard, on peut penser que les demandes de contrôle vont être de nature très diverse. Il ne me paraîtrait donc pas raisonnable de définir, dans cet article, qui est très général, un délai d'une durée uniforme quelle que soit l'administration concernée ou la nature du contrôle demandé. D'ailleurs, une durée de deux mois, voire de trois mois, pour certains contrôles très complexes, dans de grandes entreprises, pourrait se révéler insuffisante. Je pense donc que nous devrons être attentifs à l'application de cette loi, en veillant à ce que l'administration réponde aux demandes, mais il ne me semblerait pas raisonnable, je le répète, de fixer une durée uniforme de deux ou trois mois. L'avis est donc également défavorable.
Monsieur le rapporteur, nos échanges sont tout à fait éclairants. Lorsque l'on ne définit pas une notion, on peut en concevoir des acceptions extrêmement différentes, en l'occurrence de ce que l'on appelle un délai raisonnable, alors que l'objectif est partagé.
Néanmoins, le délai raisonnable est une notion issue de la jurisprudence anglo-saxonne qui vient de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Souvent, la longueur d'un délai n'étant pas précisée, c'est le juge qui décide de son caractère raisonnable ou non. Si la loi ne quantifie pas le délai d'intervention de l'administration, quelqu'un devra apprécier la situation ; autrement dit, si le législateur ne précise pas la durée d'un délai raisonnable, le juge le fera. Or l'instabilité juridique fait partie des éléments qui compliquent la relation des Français avec l'administration.
En outre, il faudra sûrement plusieurs années pour qu'une jurisprudence s'établisse sur le caractère raisonnable du délai prévu par l'article 2. En effet, la jurisprudence pourrait se retourner plusieurs fois, des différences pourraient apparaître selon les cours et l'unification ne pourra être que progressive ; cette instabilité juridique irait à l'encontre de notre objectif, qui est de stabiliser la situation.
J'aurais donc trouvé intéressant de préciser que le délai raisonnable ne peut être inférieur à quinze jours ni, sauf exception, dépasser deux ou trois mois ; pour ma part, je préfèrerais deux mois, car c'est le délai communément admis pour les réponses de l'administration, et il me paraît de bonne guerre qu'il soit également applicable aux contrôles.
En tout cas, on ne doit pas sous-estimer l'importance de ce débat, car si nous ne précisons pas ce qu'est un délai raisonnable, quelqu'un d'autre devra le faire, et nous risquons d'être assez surpris du résultat.
Dans le prolongement de ce que vient de dire mon collègue Aubert, je pense que l'on pourrait fixer cette durée à deux mois, tout en précisant que si, compte tenu, de l'ampleur du contrôle envisagé, l'administration n'est pas en mesure de tenir un tel délai, elle doit en informer l'administré. Une telle éventualité ne concernerait toutefois pas les petits contrôles, qui seraient soldés dans le délai raisonnable de deux mois.
Juridiquement, il n'est pas bon de laisser un terme dans le flou et de donner ainsi trop de liberté au juge. Il faut fixer un délai. Peut-être qu'une durée de deux mois est trop courte, et qu'il serait plus opportun de choisir un délai de six mois.
La notion de « raisonnable » est difficilement définissable, et l'incertitude qui subsiste dans le texte pourrait se révéler préjudiciable. Il n'est pas nécessaire d'alimenter la jurisprudence en laissant trop de place à l'interprétation, au risque de rendre ces dispositions inapplicables, ce qui se retournerait contre l'administration. Celle-ci doit voir son intervention encadrée. Il faut lui laisser suffisamment de temps – je comprends que l'on ne puisse pas embouteiller les services – , mais le terme « raisonnable » me choque un peu, car il est beaucoup trop vague.
De quoi parlons-nous ? Du droit au contrôle. Je veux bien que l'on imagine les contentieux auxquels pourrait conduire ce nouveau droit, mais rappelons qu'il s'agit, pour quelqu'un, de demander à une administration d'effectuer un contrôle « à blanc », si j'ose dire. Je remarque d'ailleurs que l'idée a fait son chemin, et je m'en réjouis. Lorsque la commission spéciale a entrepris ses travaux, elle n'était pas communément admise. Ainsi, plusieurs députés m'ont dit que jamais personne n'oserait demander à une URSSAF, par exemple, d'effectuer un contrôle sur demande. Nous avons donc déjà bien avancé puisque les auteurs des amendements semblent partir du principe que l'innovation proposée par le Gouvernement et le rapporteur est une bonne chose.
Je sais par ailleurs que nous vivons dans un pays de contentieux, mais il est difficile d'imaginer que quelqu'un ayant réclamé un contrôle à l'URSSAF puisse juger déraisonnable le délai dans lequel celle-ci intervient au point de lancer une procédure contre elle ! C'est sans doute aller un peu loin dans les conséquences possibles de l'application du droit au contrôle. En effet, nous ne parlons pas de délai raisonnable en général, mais du délai dans lequel une administration intervient dans le cadre de ce nouveau droit.
En outre, il est bon de ne pas tout réguler et de ne pas tout écrire. La loi est une norme générale, et nous faisons confiance à tous les acteurs : à l'administration, aux entreprises et aux juges. Le juge administratif a d'ailleurs déjà défini ce que signifiait un délai raisonnable, dont la durée, selon le cas, peut varier de deux mois à un an. Que nous ne soyons pas tous d'accord sur le sens à donner au mot « raisonnable », je l'entends, mais nous ne sommes pas des juges administratifs. S'il faut vraiment être plus clair sur ce point, tout le monde admettra qu'un délai raisonnable est un délai inférieur à un an. Mais il doit s'apprécier selon l'entreprise, le contexte et la difficulté rencontrée.
Dans la discussion générale, plusieurs orateurs ont regretté que le texte soit trop précis, trop complexe ou trop régulateur – à part quelques députés situés à la gauche de l'hémicycle ; or lorsque l'on regarde dans le détail, là où le diable se cache, on se met à tout formater, tout contrôler et tout verrouiller.
Certes, mais le droit au contrôle est un droit donné aux gens, madame Louwagie ! On est en train d'imaginer un contentieux portant sur le caractère raisonnable du délai dans lequel un contrôle est effectué à la demande de l'entreprise elle-même. Ce n'est pas tout à fait la réaction spontanée que l'on peut attendre, n'est-ce pas ?
Je ne suis donc pas favorable à préciser les choses, sachant que la jurisprudence administrative définit déjà ce qui est raisonnable. Laissons aux acteurs le soin de desserrer le corset de nos réglementations et de nos législations. Si, au bout d'un certain temps, une difficulté particulière apparaissait, je suis certain qu'un autre législateur et un autre ministre proposeraient une solution, mais il est inutile d'inscrire tout de suite dans le marbre ce qu'est un délai raisonnable. On pourrait débattre longtemps de sa durée – deux, trois, quatre mois ? – , jusqu'à aboutir à une solution de compromis, mais on n'aura pas pour autant réglé le problème de l'entreprise X. De plus, suite à l'avis du Conseil d'État, l'article comprend un nouvel alinéa qui permet à l'administration de refuser d'opérer ce contrôle si elle n'en a pas les moyens et qu'elle doit se concentrer sur son coeur de métier qui est le contrôle de fond ; or elle pourrait démontrer cette incapacité si le délai était contraint du fait d'une définition trop précise dans la loi. Le résultat obtenu – moins de contrôle effectifs – serait donc contraire à celui recherché.
L'amendement no 804 n'est pas adopté.
L'amendement no 335 n'est pas adopté.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 596 .
Cet amendement rédactionnel vise à exclure les demandes de contrôle qui ont manifestement pour effet de compromettre le « bon » fonctionnement du service.
L'amendement no 596 , accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 805 .
Cet amendement porte à nouveau sur les contrôles qui peuvent être opérés dans le cadre de la PAC, et dont les conséquences ne sont pas toujours très claires, notamment en cas de visite de l'exploitation. Pour notre groupe, il est important que, dans ce dernier cas, l'agriculteur puisse être informé de la portée du contrôle et puisse être accompagné – cette dernière mesure fait l'objet d'un autre de nos amendements ; surtout, s'il ne peut pas accompagner le contrôleur dans son exploitation à cause d'un problème médical, il doit pouvoir demander le report de ce contrôle.
Il y a une confusion : l'amendement porte sur l'alinéa 19 de l'article, qui concerne le droit au contrôle ; il serait paradoxal que la personne ayant fait jouer ce droit produise ensuite un avis médical afin de reporter l'exécution du contrôle.
Avis défavorable.
L'amendement no 805 est retiré.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l'amendement no 134 .
L'article prévoit que l'administration n'est pas tenue d'effectuer le contrôle en cas de mauvaise foi du demandeur, de demande abusive ou d'impossibilité matérielle de la part de l'administration. Cependant, si un tel cas survient, rien n'est prévu pour en informer l'usager.
Par cet amendement, nous souhaitons que l'administration adresse à l'intéressé une réponse écrite et motivée, qui la dispense de donner suite à la demande de contrôle. La procédure ainsi décrite présente l'avantage d'être relativement facile à mettre en oeuvre par l'administration, de permettre au demandeur d'être informé des suites données à sa démarche et de formaliser le refus qui lui est opposé de manière transparente.
Comme je l'ai dit tout à l'heure à Mme Louwagie, cet amendement est satisfait par le code des relations entre le public et l'administration, puisque cette dernière est tenue de donner une réponse écrite et d'accuser réception de toute demande. Avis défavorable.
L'amendement no 134 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement de cohérence envisage le cas dans lequel des divergences apparaîtraient entre différents corps de contrôle. Il propose de rendre opposables les conclusions expresses mentionnées à l'article 2, non pas à la seule administration les ayant produites, mais à l'ensemble des corps de contrôle de l'État.
Nous avons eu cette discussion, fort intéressante, en commission. Je vous avais répondu que les champs de contrôle des grandes administrations telles que l'URSSAF ou les douanes étant suffisamment bien définis pour que les conclusions d'un contrôle ne soient opposables qu'à l'administration dont elles émanent.
Par ailleurs, les services sanitaires d'une mairie et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – DGCCRF – ne disposent pas forcément des mêmes moyens de contrôle, et il serait ennuyeux que la DGCCRF soit tenue par les conclusions d'un contrôle effectué par une administration dotée de moyens moins importants.
Il ne serait donc pas raisonnable de supprimer les mots « dont elles émanent » à la fin de l'alinéa 20. Avis défavorable.
L'amendement no 290 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 2 reconnaît la possibilité pour une personne de demander à faire l'objet d'un contrôle, puis définit les modalités dans lesquelles les conclusions de ce contrôle sont opposables. L'alinéa 23, dont cet amendement propose la suppression, indique ainsi qu'elles cessent de l'être « Lorsque l'administration procède à un nouveau contrôle donnant lieu à de nouvelles conclusions expresses. ». L'alinéa 23 autorise donc l'administration, à la faveur d'un nouveau contrôle, à changer d'avis et à revenir sur les conclusions expresses antérieures, sans que de nouvelles circonstances de droit ou de fait ne le justifient. Une telle disposition va à l'encontre de l'objectif de confiance poursuivi : si les conclusions du contrôle initié par une entreprise ne sont plus opposables en cas de nouveau contrôle effectué par l'administration, cette dernière peut s'autoriser tout changement de doctrine.
Cet article 2 est donc une façon de dire aux Français – j'ai déjà eu l'occasion de le souligner, même si cela peut heurter – qu'ils ne pourront pas opposer dans tous les cas les conclusions du contrôle qu'ils ont demandé en cas de nouveau contrôle de l'administration. Cela pose une vraie difficulté. Parce que l'alinéa 23 remet en cause le droit à l'erreur en même temps que l'opposabilité des conclusions d'un contrôle effectué à la demande d'une entreprise, nous vous proposons de le supprimer.
Je m'en souviens, vous m'aviez dit en commission, monsieur le ministre, que mes propos « [relevaient] du bon sens ». J'ose donc espérer que vous émettrez un avis favorable à cet amendement !
J'espère que mes propos relèveront également du bon sens. Cet amendement vise, de même, à supprimer l'alinéa 23 qui prévoit que l'administration puisse changer d'avis et revenir, lors d'un nouveau contrôle, sur les conclusions expresses d'un premier contrôle. Une telle disposition, vous en conviendrez, limite singulièrement la portée de cette mesure.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l'amendement no 338 .
Si l'on comprend bien la logique de cette disposition, on comprend vite aussi les dérives qu'elle pourrait engendrer : l'administration pourrait en effet réaliser un nouveau contrôle, dans la foulée du premier, pour faire valoir un nouveau point de vue qui infirmerait le précédent dont elle ne serait pas satisfaite. C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'alinéa 23.
Le droit au contrôle pourrait porter atteinte au bon fonctionnement de l'administration, dans la mesure où celle-ci doit faire droit à la demande de contrôle dans un délai raisonnable sans que l'on tienne suffisamment compte de ses moyens et de ses effectifs.
Les moyens des services de l'État ont souvent été fortement réduits et ne lui permettent pas toujours de remplir ses missions premières, au risque d'exposer la responsabilité de l'État et la responsabilité pénale de ses agents.
L'article ne recense pas les procédures de contrôle auxquelles le dispositif pourrait s'appliquer et, par suite, ne permet pas d'apprécier les conséquences qu'emportera la mise en oeuvre du droit au contrôle.
Le projet de loi pourrait provoquer des effets d'aubaine au bénéfice des personnes les plus à même de connaître le droit qui leur est applicable et de disposer de compétences et de conseils juridiques adaptés à leur situation.
Avis défavorable. Nos discussions en commission m'avaient fait douter, je l'avoue. Mais je ne doute plus. Je vais donc essayer de vous rassurer à votre tour.
Sourires.
J'ai demandé des précisions au Gouvernement sur l'opposabilité du droit au contrôle. Ce qu'il faut éviter, c'est qu'à la suite par exemple d'une erreur de l'agent administratif lors d'un contrôle – cela peut arriver – le droit ne soit cristallisé ad vitam pour l'entreprise concernée. Ce dont nous devons nous assurer en revanche, c'est que si un agent administratif se trompe lors d'un contrôle – je reprends cet exemple – , la société ne puisse pas être inquiétée pour la période qui court entre ce premier contrôle et un éventuel second contrôle.
Imaginons une société contrôlée deux fois, à cinq ans d'intervalle ; imaginons aussi qu'elle n'ait pas changé sa pratique, et que le droit soit constant. Elle ne doit pas être inquiétée pour cette période de cinq années. Le Gouvernement m'a confirmé que ce serait bien le cas : l'opposabilité cesse lors de nouvelles conclusions, mais pour l'avenir.
Très concrètement, prenons l'exemple d'une entreprise contrôlée en 2010. L'administration lui demande de corriger sa situation sur un point, valide d'autres points. L'entreprise se met en règle. Elle est à nouveau contrôlée en 2015 ; le nouveau contrôleur remarque qu'une erreur d'interprétation de la doctrine a été faite en 2010 et change de position : l'entreprise ne sera pas redressée pour la période qui court de 2010 à 2015. En revanche, l'administration lui demandera de changer sa position pour l'avenir.
J'espère avoir été clair et vous avoir montré pourquoi l'alinéa 23 empêche de cristalliser le droit ad vitam à la suite, par exemple, d'une erreur, tout en protégeant les entreprises entre deux contrôles.
Je souscris entièrement aux propos du rapporteur. Je voudrais apporter quelques précisions, et peut-être entamer déjà le débat sur l'article 4, sur lequel le Gouvernement sera ouvert aux propositions du rapporteur sur la garantie fiscale – même si un peu de travail sera sans doute encore nécessaire.
Dans chaque activité, administrative ou autre, il y a une dimension humaine. De même qu'un arbitre pourrait ne pas siffler un penalty quand un autre le sifflerait, de même qu'un policier pourrait vous verbaliser pour une infraction au code de la route quand un autre considérerait qu'une admonestation suffirait, il faut accepter l'idée que le contrôle, la vérification, n'est pas l'application bête et méchante d'un texte, d'un règlement, d'une jurisprudence. Sinon, des robots et des données pourraient suffire à ce travail, ce qui ne me paraît pas souhaitable.
Personne ne peut contester cette part d'incertitude dans les choix effectués par le vérificateur ou le contrôleur.
Je voudrais également signaler que si l'on pouvait opposer un premier contrôle – voulu – à un second – subi – alors la valeur du premier contrôle en serait fortement limitée.
Vous voulez qu'un premier contrôle soit opposable à un second. Ce faisant, vous partez d'abord du principe que les deux opérations contrôlent exactement la même chose, ce qui n'est pas évident. Certains contrôles peuvent ainsi fonctionner par sondage, d'autres être plus longs – parce que la vérification de tel ou tel point de droit serait, par exemple, une politique du ministre. Ils pourraient alors soulever des problèmes différents.
Mais surtout, si nous partons du principe qu'il faut, en fin de contrôle, dresser la liste des points contrôlés parce qu'ils seront opposables lors d'un second contrôle, l'administration sera incitée à limiter la précision du premier contrôle. Le risque d'effet pervers est très important : c'est celui d'un premier contrôle qui ne contrôlerait pas grand'chose, ou qui multiplierait tellement les circonvolutions…
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Je vous dis la réalité administrative : c'est ce qui risque d'arriver ! Le droit au contrôle est une chose tout à fait nouvelle, une nouvelle façon d'imaginer le conseil, qui ne fait pas du tout plaisir à certains directeurs d'administration. Vos amendements paraissent de bon sens, mais en réalité la situation est autre : vous risquez d'en arriver à un premier contrôle très oral.
Un relevé de conclusions écrit me paraît au contraire une garantie forte.
Troisièmement, vous avez tout à fait raison, monsieur le rapporteur : le contrôle ne peut pas être opposable à vie ! Un premier contrôle est réalisé parce que vous l'avez demandé, mais votre entreprise – ou le droit, d'ailleurs – a changé, votre chiffre d'affaires a changé, le nombre de salariés a changé… Quelques années plus tard, il n'est pas sûr que les conclusions du premier contrôle correspondent à la situation nouvelle.
Cette opposabilité, ce serait même un blanc-seing pour frauder : avec un premier contrôle opposable à un second, pendant un an ou deux, vous pouvez faire absolument n'importe quoi !
Enfin, madame Louwagie, nous pouvons nous rejoindre sur un point : une fois le contrôle terminé, une fois les conclusions données, cela constitue une preuve de bonne foi. Si ce projet de loi traite du droit au contrôle juste après le droit à l'erreur, c'est parce qu'il faut constituer la bonne foi. Cela peut se faire de façon multiforme – cela peut être l'erreur de l'administration, un changement de réglementation, ou la demande d'un contrôle.
Pour toutes ces raisons, il me semble qu'il serait dangereux d'opposer le premier au second contrôle. C'est une activité humaine, je l'ai dit, et il faut prendre ce point en considération ; un second contrôle pourrait d'ailleurs se révéler plus positif que le premier.
Je reprends l'exemple du football : imaginons un arbitre qui n'aurait pas sifflé le penalty de Ravanelli, il y a bien longtemps…
Ah, mais la vidéo ne peut pas tout…
Pas plus que l'arbitrage, l'administration n'est automatisée, et c'est à mon sens une très bonne chose. La loi, le règlement ne peuvent pas tout prévoir, loin de là – c'est d'autant plus vrai des nombreux effets de bords pouvant résulter de son application.
De plus, je le redis, le contrôle ne peut pas être opposable à vie. Enfin, vous risquez, par cette proposition, de donner des idées maléfiques à ceux qui ne souhaitent pas la mise en place du droit au contrôle. Cela n'aiderait pas les entreprises, qui trouveraient que ce dispositif ne sert à rien. Nous aurions ainsi tué le droit au contrôle, dont nous souhaitons tous pourtant qu'il vive.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Après ces longs discours, je voudrais revenir sur un élément central. Si une position prise par un fonctionnaire, certes sous couvert de sa hiérarchie, était opposable lors d'un nouveau contrôle, alors ce serait la course à la corruption du fonctionnaire qui signera le bon papier !
Vives protestations sur les bancs du groupe REM.
Peut-être suis-je le seul à avoir un esprit pervers dans cet hémicycle…
Exclamations sur divers bancs.
Mais imaginons que je sois une grosse entreprise peu scrupuleuse – ou d'ailleurs tout aussi bien une petite entreprise peu scrupuleuse : j'aurais franchement très envie d'avoir ce papier.
Prenons un autre exemple, puisque vous êtes bien réveillés à cette heure tardive : l'indemnité représentative de frais de mandat, l'IRFM, a été supprimée, et l'Assemblée nationale va instaurer un contrôle de nos dépenses. Il y a un contrôle aléatoire, tous les ans. Si l'on vous disait qu'une fois qu'un député a été tiré au sort et contrôlé, il ne peut pas l'être à nouveau dans les années suivantes, alors quelle belle aubaine ce serait que d'être tiré au sort la première année ! Pour les quatre années suivantes, plus de justificatifs à donner, c'est la fête.
Le contrôle a ses vertus lorsque l'on sait qu'il peut être aléatoire, qu'il peut être reconduit. Bien sûr, il faut garder de la mesure. Mais un contrôle opposable à vie n'est pas une bonne idée, et je voterai contre ces amendements.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous répondez non pas en nous rassurant mais en soulevant de nouvelles inquiétudes ! Les gens, entend-on, vont se croire protégés. Le titre même du projet de loi évoque une « société de confiance ». Son but est de donner confiance aux acteurs économiques et de sécuriser leur situation juridique. Or nos amendements permettent d'éviter notamment qu'il y ait plusieurs contrôles coup sur coup, qui donneraient des résultats différents.
Pour répondre à vos inquiétudes, je précise qu'avec nos amendements, les conclusions d'un premier contrôle ne seraient plus opposables en cas de changement des circonstances de droit ou de fait. En adoptant notre proposition, nous sécuriserons les entreprises, et plus largement les justiciables.
Je remercie M. le rapporteur et M. le ministre pour ces informations. Je souhaite traduire ce que vous avez dit pour être certaine d'avoir bien compris. Vous avez cité l'exemple d'un agent faisant une erreur dans ses conclusions ; cela est tout à fait possible. Des changements de doctrine de l'administration peuvent également intervenir : ils sont l'objet de nos amendements, qui visent à protéger les entreprises d'un tel changement de doctrine.
Si j'ai bien compris, les conclusions d'un contrôle souhaité par l'entreprise ou le citoyen cessent d'être opposables après le contrôle suivant. Ainsi, au prochain contrôle « imposé » par l'administration à l'entreprise, les conclusions du contrôle « voulu » sont opposables à l'administration. Ce n'est qu'à l'issue du deuxième contrôle que les conclusions du premier cessent d'être opposables : voilà ce que j'ai cru comprendre.
Si tel est le cas, nous avons un petit problème de rédaction de l'article concernant son application dans le temps. Ce dernier dispose en effet que « Ces conclusions expresses cessent d'être opposables [… ] lorsque l'administration procède à un nouveau contrôle [… ] », c'est-à-dire dès lors que l'administration enclenche un nouveau contrôle. Il y a donc un problème dans la rédaction de l'article au regard de ce que vous venez de nous dire.
Je suis assez convaincu par l'argumentaire de M. le ministre. Il s'agit d'un contrôle fiscal, pas d'un rescrit : la demande porte sur un contrôle fiscal. On peut très bien avoir un contrôle fiscal même si on ne le demande pas, et être contrôlé à nouveau un an après. Nous sommes tout à fait dans ce contexte. Si j'ai besoin de sécuriser une interprétation, si je veux savoir si j'ai bien fait les choses, je demande un contrôle par anticipation. De ce fait, il est tout à fait logique que son résultat fige ma situation. Mais en cas de nouveau contrôle fiscal, soit à la demande, soit parce que les services le décident, l'administration ne peut pas être tenue par l'ancien contrôle car sinon il n'y a plus de contrôle possible. Si la notion de contrôle est importante et constitue une avancée, il ne faut pas la confondre avec le rescrit : cela n'a rien à voir.
Ce débat est important car il porte sur l'un des éléments clés du texte : autant être très clair sur ce point. Oui, cela est sécurisant : la période entre les deux contrôles est sécurisée. Je veux m'exprimer de manière très claire : pour reprendre mon exemple, la période séparant les deux contrôles, entre 2010 et 2015 est sécurisée, l'entreprise ne pourra pas être redressée pour ces cinq ans.
Il n'y a pas de rétroactivité !
Mais si, comme dans l'exemple déjà cité, un inspecteur a commis une erreur et donné un avis erroné lors du premier contrôle, il faut que l'administration puisse saisir l'occasion que lui donne le deuxième contrôle de demander à l'entreprise de corriger sa pratique.
Vous évoquez madame Louwagie, l'hypothèse d'un changement de doctrine de l'administration. Or l'article 9 du projet de loi renforce l'obligation de publier les circulaires et instructions, tout ce qui n'est pas publié étant réputé abrogé. L'on voit ainsi que notre texte marche bien sur ses deux jambes : les changements de doctrine ne peuvent pas être insidieux mais doivent être clairs et rendus publics. Dès lors, tout changement de doctrine faisant l'objet d'une publication constitue une modification du droit, une situation prise en compte par l'alinéa 22. Je maintiens donc que, à rédaction constante, « lorsque l'administration procède à un nouveau contrôle » signifie « dès lors qu'il y a un nouveau contrôle » ; clarifions ce point ici !
Ce point est vraiment important. Comme la disposition est innovante, les gens vont s'intéresser à nos débats : nous devons tous être d'accord sur ce que nous mettons en place et soumettons à votre vote.
Il me semble vraiment que ce serait une erreur d'adopter votre amendement. Je tiens à le préciser parce que, M. le rapporteur a raison, il s'agit, entre les deux contrôles, de garantir la légalité du premier d'entre eux ; il n'y a donc pas de rétroactivité.
Je veux juste rappeler, avant que nous ne débattions de l'article 4, que nous sommes pour l'instant hors du champ fiscal. Même si l'opposabilité fiscale, autre question à laquelle nous nous intéresserons – le rapporteur a fait adopter un amendement à ce sujet – , répond à peu près à la même logique, les précisions que je veux apporter concerne le présent article 2.
Si je n'avais pas la responsabilité de diriger une administration, peut-être aurais-je pensé spontanément comme vous. Mais il arrive que l'on découvre un défaut légistique, un vice intrinsèque de la législation. Il est tout à fait possible que, après un premier contrôle à l'issue duquel l'administration a jugé inutile de chercher des poux dans la tête des gens et s'est contentée de préconiser une simple modification des pratiques, une fraude massive finisse par se faire jour.
C'est par exemple le cas des certificats d'économies d'énergie, dont nous nous sommes aperçus, suite à un signalement de Tracfin, qu'ils faisaient l'objet d'une fraude massive, assimilable à la fabrication de fausse monnaie. L'administration dont je suis responsable, avec l'appui de Nicolas Hulot, a donc donné des instructions pour renforcer les contrôles lors de la délivrance de ces certificats. Cette affaire nous a donc conduits à changer la doctrine administrative ou, du moins, à demander aux contrôleurs de contrôler différemment.
Je citerai un autre exemple pour illustrer mon propos, même s'il relève du droit fiscal et déborde donc le champ de l'article 2. Lors du débat sur le projet de loi de finances, nous avons examiné, à la demande du président Ferrand, la question de savoir si certaines transformations réalisées par un agriculteur dans son exploitation agricole devaient conduire à considérer celle-ci comme relevant davantage de l'industrie ou, du moins, de la logistique, et donc à la taxer en ce sens. Or l'interprétation de l'administration varie d'une situation à l'autre. Certes, le législateur devrait être plus précis – je m'y suis engagé lors du débat budgétaire – , mais le temps que l'administration réfléchit à la législation qu'elle souhaite proposer au Parlement ou à une nouvelle doctrine, il convient de se mettre sur pause.
Il peut donc arriver parfois, à droit constant, que la puissance publique change de position parce qu'elle veut lutter contre une fraude ou parce qu'elle considère qu'on est allé trop loin dans un certain sens. Cela ne retire rien aux arguments de M. le rapporteur : entre deux contrôles, il n'y a pas de remise en cause, mais nous ne pouvons pas nous engager à une opposabilité éternelle, parce que la vie change.
Nous avons pris le temps d'éclaircir les choses, mais il ne me semble vraiment pas souhaitable que ces amendements soient adoptés, car ils iraient à l'encontre de ce que nous souhaitons tous faire. Il est vrai que subsiste une part d'incertitude, parce qu'il s'agit d'un droit nouveau, mais il faut faire confiance aux acteurs concernés.
Vous avez raison, monsieur Brun, de dire que ce projet de loi revient à faire confiance aux entreprises. Mais il est aussi une façon de manifester de la confiance envers l'administration : si nous ne faisons pas confiance aux agents publics pour appliquer une innovation, si nous ne leur laissons pas une marge d'interprétation, nous ne pourrons jamais couvrir tous les cas ; or nous savons tous que certaines situations donner lieu des interprétations différentes. Moins les agents disposeront de la liberté individuelle de trancher selon le bon état d'esprit, plus nous risquons de laisser la place aux tracasseries administratives bêtes et méchantes que nous refusons tous. La vérité bureaucratique n'a jamais donné beaucoup de liberté.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes REM et MODEM.
Je remercie M. le rapporteur et M. le ministre pour leurs réponses précises sur ce qui se passe entre le contrôle « voulu » et le nouveau contrôle : nous n'avions pas eu ces réponses en commission.
C'est vrai !
Vous-même, monsieur le rapporteur, aviez eu des doutes. Au regard des réponses que vous nous avez apportées et dans la mesure où les entreprises et les contribuables restent protégés pour ce qui concerne la période séparant le contrôle « voulu » du contrôle « imposé », je retire mon amendement.
L'amendement no 203 est retiré.
Je retire le mien également au vu des précisions apportées, le débat parlementaire, en commission puis dans l'hémicycle, ayant permis de clarifier les dispositions de l'alinéa 23.
L'amendement no 292 est retiré.
L'amendement no 338 est retiré.
L'amendement no 1061 est retiré.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.
Il est prévu, dans l'alinéa 23, que l'administration puisse, lors d'un nouveau contrôle, formuler un nouvel avis et donc éventuellement contredire les premières conclusions expresses transmises à l'administré.
Si aucune disposition législative ou réglementaire ne la justifie, cette possibilité offerte à l'administration n'apparaît pas équitable, en termes d'égalité de moyens vis-à-vis de l'administré, si le nouvel avis s'avère plus défavorable à ce dernier. C'est la raison pour laquelle cet amendement propose de modifier la rédaction actuelle de l'alinéa en écartant toutes nouvelles conclusions expresses qui seraient moins favorables à l'administré.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l'amendement no 70 .
Il est très similaire à l'amendement précédent, ce qui prouve qu'une même pensée peut venir des montagnes vosgiennes et des montagnes corses.
J'avais répondu sur ce point en commission : il ne me semble pas possible d'appliquer différemment la loi selon qu'elle est favorable ou défavorable aux administrés.
Avis défavorable sur les deux amendements.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 806 .
L'amendement no 806 est retiré.
La parole est à M. Stanislas Guerini, pour soutenir l'amendement no 724 .
L'amendement no 724 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il s'agit ici de lutter contre un défaut inhérent à l'administration : elle réfléchit en tuyaux d'orgues. Nous adorons la norme, nous adorons le respect de la norme, nous adorons le contrôle de la norme, nos administrations sont extrêmement efficaces mais, parfois, elles oublient tout simplement de se coordonner.
Cela donne à l'arrivée un particulier ou surtout une entreprise qui vous dit : « En janvier, ça a été les impôts ; après, j'ai eu une descente de l'hygiène ; après, telle autre administration est venue me contrôler. » Ces deux amendements, qui sont liés, proposent donc que, en l'absence de redressement lors d'un premier contrôle par une administration, un délai minimum s'écoule avant qu'une autre administration n'organise un autre contrôle. En d'autres termes, il s'agit d'encourager les administrations à discuter entre elles pour éviter ce sentiment de harcèlement qui s'empare parfois de nos concitoyens.
Le deuxième amendement, no 771 , vise à amplifier la coordination par l'institution d'un fichier permettant à une administration de vérifier une entreprise a déjà fait l'objet d'un contrôle et de calculer le délai raisonnable au delà duquel elle pourra exercer son propre contrôle.
L'amendement no 766 prévoit un délai minimal de six mois entre deux contrôles, tout en réservant principalement cette disposition aux administrations fiscales et sociales, de façon à exclure certains contrôles plus spécifiques.
En voulant éviter que les citoyens ne soient les « victimes », entre guillemets, d'un manque de coordination administrative, nous nous plaçons vraiment au coeur de ce qui est proposé dans ce projet de loi.
Je comprends votre proposition parce que les administrations fonctionnent trop souvent en silo ; c'est d'ailleurs tout l'objet de l'expérimentation prévue à l'article 16 pour les PME, qui vise à limiter la durée de contrôle et, ce faisant, à opérer une meilleure coordination entre les administrations pour procéder à des contrôles dans les entreprises.
Pour autant, inscrire dans la loi ce délai de six mois ne serait pas très raisonnable car il s'appliquerait à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. Nous le savons, la fréquence à laquelle une entreprise est contrôlée varie énormément selon sa taille : pour une toute petite entreprise, il peut se passer pas loin de cent ans entre deux contrôles, contre cinq ans pour les plus grandes. La situation est en outre hétérogène selon les administrations.
Il ne serait donc pas raisonnable de fixer un délai obligatoire de six mois, dont l'effet pourrait être d'ôter à certaines administration leur pouvoir de contrôle, pourtant indispensable lorsqu'il s'agit de la sécurité des personnes, de la santé ou de l'environnement. Je vous propose plutôt de vous rallier à l'expérimentation que nous mènerons sur 20 % des PME, soit 810 000 entreprises : elle permettra de tester la coordination des administration.
Quant à l'institution d'un fichier destiné à mutualiser les informations et à améliorer la coordination, elle est sans doute ce vers quoi nous devons nous diriger. Une mission de l'inspection générale des finances a d'ailleurs abouti à des conclusions similaires. Je crois que l'expérimentation mise en place par l'article 16 permettra d'aboutir à ce type de coordination entre administrations. Je recommande de commencer par l'expérimentation avant d'inscrire « dans le dur » l'obligation d'un délai de six mois entre deux contrôles. D'où ma position défavorable.
Ainsi, monsieur Aubert, après avoir dénoncé le délai raisonnable, vous l'inscrivez dans vos amendements ? Je plaisante.
Je suis absolument défavorable à vos amendements, pour une raison assez évidente : n'enlevez pas à l'administration le pouvoir qu'elle a parfois de mettre tous les moyens – vous avez même parlé de harcèlement – pour faire cesser des troubles manifestes à l'ordre public ou d'autres difficultés.
Je vais vous en donner deux exemples. Quand on a créé les GIR, les groupes d'intervention régionaux, ou les CODAF, les comités opérationnels départementaux anti-fraude, c'était pour permettre à plusieurs administrations de coordonner leurs contrôles. En effet les douanes peuvent avoir des moyens que n'a pas l'administration fiscale ni l'URSSAF.
Mon deuxième exemple sera celui des élus municipaux. Le maire a un pouvoir de contrôle, même s'il le connaît assez peu, qui lui permet d'intervenir en matière de sécurité et de salubrité publique, de stationnement, d'immeubles menaçant ruine, de tranquillité publique. Il dispose de petits pouvoirs qui mis bout à bout lui permettent de faire cesser un trouble à l'ordre public.
Si à Carpentras un commerçant ne se contente pas de faire son métier officiel et que par une multitude de contrôles relevant de la compétence du maire, complétés peut-être par ceux relevant du préfet, vous pourrez mettre fin à un trouble évident à l'ordre public parce que le voisinage se plaint d'ouvertures extrêmement tardives, de jeux cachés, de trafic de stupéfiants, de troubles à l'ordre public, vous êtes bien content d'avoir ce pouvoir.
Je crois que l'esprit de vos amendements correspond à celui de l'amendement du rapporteur relatif à l'expérimentation mais s'il semble de bon sens à première vue, il est contre-productif du point de vue de la puissance publique. C'est pourquoi j'y suis défavorable.
Combien de fois, lorsque j'étais à la Cour des comptes, j'ai entendu les fonctionnaires que nous contrôlions se plaindre d'avoir été déjà contrôlés par l'inspection des finances et l'inspection générale des affaires sociales, parfois sur les mêmes sujets. Ce qui est mal vécu par l'administration est encore plus mal vécu à l'extérieur de l'administration.
Certains de vos arguments ne sont pas opérants. Il s'agit principalement des contrôles de l'administration de la Sécurité sociale, de l'inspection du travail, de l'administration fiscale et de la direction des douanes et des droits indirects, et non de tous les contrôles.
C'est différent dans le cadre d'un GIR puisqu'il s'agit alors par définition d'une démarche coordonnée de l'administration, ce qui permet de déclencher les contrôles le même jour. On n'est pas du tout dans le champ de ce que je propose.
Enfin le délai de six mois n'est pas acquis : il ne court que si le premier contrôle n'a rien donné. En d'autres termes, on part du principe que l'administration s'est trompée en croyant que l'entreprise cachait quelque chose alors qu'elle ne cachait rien et qu'il faut peut-être attendre un peu avant de lui dépêcher l'inspection du travail ou de contrôler ses cotisations. Il faut un équilibre entre l'administration et l'entreprise. L'administration est venue perturber l'activité de l'entreprise par un contrôle qui n'a rien donné : en compensation, on va permettre à cette dernière de reprendre une activité normale pendant six mois.
Madame la présidente, j'ai présenté deux amendements conjointement, cela devrait me donner droit à un temps de parole doublé ! Face au ministre, qui dispose de tant d'arguments, je suis contraint de grappiller quelques minutes de plus et de déployer des trésors d'imagination !
Sourires.
Si donc on n'adopte pas ce type de mesure, une autre administration pourra vouloir vérifier que l'entreprise n'a rien à cacher et celle-ci, la pauvre, ne pourra plus travailler.
Vous avez raison, monsieur le rapporteur, il manque peut-être un seuil mais je suis à votre disposition si vous souhaitez sous-amender mon amendement. Vous connaissez l'ouverture d'esprit de l'opposition !
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l'amendement no 778 .
Cet amendement propose une réciprocité des sanctions dans le cas où l'administration ferait une erreur préjudiciable aux administrés.
Sous forme de demande de rapport, c'est une demande sur le fond. Quant au fond, votre amendement est donc satisfait puisque des pénalités sont prévues pour sanctionner les erreurs de l'administration. S'il s'agit vraiment d'une demande de rapport, je vous invite à ne pas les multiplier. Nous en avons déjà accepté un certain nombre dans le cadre de l'examen de ce projet de loi. Ne noyons pas le Gouvernement sous les demandes de rapport mais suivons ce sujet lors de l'application de la réforme.
L'amendement no 778 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 2, amendé, est adopté.
La parole est à M. Mohamed Laqhila, pour soutenir l'amendement no 663 .
Cet amendement, qui, lorsqu'il a été présenté en commission, visait les administrations en général, a été retravaillé et précisé. Il tend à appliquer aux ménages et aux entreprises les règles que l'administration fiscale et les institutions chargées du service public de la Sécurité sociale se fixent à elles-mêmes.
Nous souhaiterions qu'au moins les administrations fiscale et sociale s'imposent les mêmes délais qu'elles imposent aux contribuables, le silence valant acceptation.
Je maintiens l'avis défavorable que j'avais opposé à votre amendement en commission, pour les mêmes raisons. Il ne peut pas y avoir réciprocité dès lors que la charge qui incombe à l'administration n'a rien à voir avec celle qui incombe à l'administré.
L'amendement no 663 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements, nos 1103 et 993 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no 1103 .
Cet amendement prévoit que nous ne suspendions pas l'instruction d'un dossier lorsqu'il manque une pièce essentielle, avec un effet de bord qu'il nous paraît important de souligner : comme le prévoit le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration, la disposition ne s'applique pas lorsque la pièce manquante est indispensable à l'administration pour instruire valablement le dossier – par exemple pour vérifier qu'une prestation est due et éviter ainsi toute fraude.
La parole est à M. Adrien Taquet, pour soutenir l'amendement no 993 rectifié .
Je ne peux qu'adhérer à l'excellent exposé des motifs du ministre. Il s'agit effectivement de créer un droit inconditionnel à l'instruction de son dossier. Un certain nombre d'entreprises et de particuliers ont vécu cette situation où une pièce manquante arrête l'instruction du dossier. Cette mesure est importante pour réduire les délais d'instruction et d'octroi des droits.
Je vous demande de retirer l'amendement no 993 rectifié au profit du no 1103.
L'amendement no 993 rectifié est retiré.
Je veux souligner après M. Taquet l'excellente présentation de l'amendement no 1103 .
Si cet amendement tend à raccourcir le délai d'instruction du dossier, je ne suis pas sûr qu'il tient compte du cas où en raison d'un changement de situation, des droits sont suspendus alors même qu'ils ont déjà été versés. Leur versement serait suspendu le temps de l'instruction, plus court grâce à cet amendement, mais ce dernier ne prend pas en considération la situation de précarité née de l'interruption de ces versements pendant quelques mois.
À quel exemple concret pensez-vous ?
Une jeune femme qui avait travaillé quelques heures par mois et s'était trompée en remplissant le formulaire a vu ses droits suspendus pendant les deux mois nécessaires pour que son dossier soit validé.
En tant qu'élu municipal, j'ai eu à connaître des cas similaires mais il me semble que la suspension de ses droits est due à une erreur de l'administration plutôt qu'à une règle de l'administration.
Ce que je vous propose, monsieur le député, c'est qu'on vérifie au Sénat que l'amendement traduit bien la philosophie du texte, quitte à ce que vous puissiez confirmer en CMP qu'on est bien dans ce cadre.
L'amendement no 1103 est adopté.
Cet amendement vise, pour les entreprises de moins de cinquante salariés, à accorder pendant deux ans un droit à l'erreur de bonne foi à propos de dispositions nouvellement introduites, tenant compte du fait que ces entreprises ont moins de facilités administratives et juridiques pour interpréter les nouvelles dispositions.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 219 .
Cet amendement vise en effet à différencier les entreprises qui ont les moyens humains d'appréhender les nouvelles réglementations, les changements de législation, et les plus petites d'entre elles, qui ne les ont pas forcément. Il s'agit donc de reconnaître un droit à l'erreur par rapport aux nouvelles dispositions législatives ou réglementaires pendant les deux premières années pour les entreprises dont les effectifs ne dépassent pas cinquante personnes. Pendant deux ans à compter de la promulgation de la loi, elles pourront donc bénéficier d'un droit à l'erreur plus conséquent. Il s'agit d'une différence importante qui résulte d'un discernement entre les situations et qui prend en compte la complexité des nouvelles réglementations.
Je comprends l'intention louable de proposer un dispositif spécifique pour les petites entreprises mais je crois, en l'état, qu'il ne serait vraiment pas opérant d'introduire un principe d'inégalité devant la loi : pendant deux ans, les petites entreprises n'auraient pas à appliquer la loi qui serait votée.
Certes, mais elles sont couvertes par le droit à l'erreur et nous faisons confiance à ce dispositif en les considérant comme de bonne foi dès lors que les évolutions du droit peuvent entraîner des erreurs – commises de bonne foi. Dans ce cas-là, le principe les protège et le droit à l'erreur s'applique aux petites entreprises. Il ne convient pas de surajouter le principe que vous proposez, lequel contreviendrait au principe d'égalité devant la loi.
Avis défavorable à ces amendements.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l'amendement no 419 .
Les démarches des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune doivent être soumises au principe du droit à l'erreur mais il faut distinguer deux parties : la partie nationale, tout d'abord, sur laquelle M. le ministre a été rassurant en commission en indiquant que le droit à l'erreur s'y appliquera et, ensuite, la partie directement européenne – le règlement européen no 13062013 le prévoit pour des erreurs manifestes.
Le droit à l'erreur est donc théoriquement déjà applicable pour les démarches de la PAC. Cependant, la mise en oeuvre de ce droit de correction des erreurs manifestes semble restrictive. En dépit de telles dispositions, de nombreux agriculteurs ne parviennent pas à obtenir la rectification d'informations enregistrées par erreur auprès de l'administration bien qu'ils en aient le droit. Ils perdent ainsi le bénéfice d'aides ou de paiements auxquels ils pouvaient légitimement prétendre.
Cet amendement inscrit donc dans la loi un véritable droit à l'erreur en matière agricole. Les règlements sont d'application directe mais cet amendement précise que dans le cadre d'une erreur manifeste, « l'administration constate l'erreur manifeste, enregistre les motifs et la date de la correction ainsi que le nom de la personne l'ayant sollicitée puis procède aux régularisations nécessaires. »
Vous avez raison de dire que la réglementation européenne consacre déjà le droit à l'erreur mais son application – nous en avons déjà discuté tout à l'heure – relève du champ réglementaire et non législatif. Avis défavorable.
L'amendement no 419 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 807 .
Cet amendement rejoint un peu ce qui vient d'être dit à propos de la PAC. En cas de contrôle, il n'est pas possible de dire à l'agriculteur qu'il s'agit simplement d'une visite. Le contrôle doit être très clairement spécifié, de même que ses conséquences éventuelles sur le montant des aides versées par la PAC. L'administration doit également pouvoir préciser que, lors du contrôle, l'agriculteur peut se faire accompagner par la personne de son choix.
Il me semble que là encore nous sommes dans le champ réglementaire. Le principe de loyauté adopté à l'annexe satisfait la règle posée, le reste relevant plutôt du règlement. Avis défavorable.
L'amendement no 807 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 808 .
J'ai évoqué tout à l'heure les deux options qui peuvent être cochées dans le formulaire de déclaration à remplir pour la PAC. Face à ces options, un chiffrage ou la mention d'un impact financier sont nécessaires de manière à ce que les agriculteurs concernés se rendent bien compte des conséquences de l'une ou l'autre option.
Il s'agit en fait de mettre en pratique le « Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement ».
« Et les mots pour le dire… »
Avis défavorable pour les mêmes raisons exposées précédemment : cela relève plutôt du champ réglementaire. Ce sont là de bonnes questions qui devront être posées dans le cadre de la loi sur l'agriculture.
J'entends bien ce qui se dit sur ces sujets très intéressants. Je suis quant à moi tout à fait d'accord avec notre collègue Valérie Rabault.
Vous dites que cela relève du champ réglementaire et nous voulons bien le comprendre mais il serait intéressant de nous donner des garanties nous permettant d'être certain que ces demandes seront prises en compte dans le cadre réglementaire, à moins que nous ne votions cet amendement.
M. le ministre Travert !
Selon vous, ce sont des dispositions réglementaires mais elles figureront donc dans la loi sur l'agriculture ! C'est ce que vous avez dit à l'instant !
Vous pourrez poser des questions à M. le ministre de l'agriculture.
À ce stade, nous ne disposons donc d'aucune garantie que ces préoccupations seront prises en considération par la majorité ou le Gouvernement.
Je ne suis pas ministre de l'agriculture.
L'amendement no 808 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 809 .
Si vous avez des questions à poser à l'administration fiscale depuis le site impot. gouv. fr, vous les envoyez via la messagerie électronique du site et, en général, l'administration fiscale vous rappelle et vous donne la réponse par téléphone.
Pour conforter l'idée de la confiance, la réponse devrait être écrite dès lors que la demande a été formulée par écrit, c'est-à-dire via le système de messagerie.
Il me semble que cette demande est satisfaite dans l'article L. 112-11 du code des relations entre le public et l'administration disposant que « tout envoi à une administration par voie électronique ainsi que tout paiement opéré dans le cadre d'un téléservice au sens de l'article 1er de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives fait l'objet d'un accusé de réception électronique et, lorsque celui-ci n'est pas instantané, d'un accusé d'enregistrement électronique. Ils sont émis selon un procédé conforme aux règles fixées par le référentiel général de sécurité ».
S'agissant de la modalité de la réponse, une réponse écrite relève de la bonne pratique de l'administration.
Avis défavorable.
Ce n'est pas du tout la question que je vous ai posée, monsieur le rapporteur spécial.
Si vous posez une question, vous recevez en effet un accusé de réception précisant que votre demande est enregistrée mais vous recevez la réponse par téléphone et il n'y a aucune trace. La bonne foi du contribuable peut être parfaitement remise en cause.
Si le contribuable a posé une question via le système électronique du site impot. gouv. fr, il doit recevoir une réponse écrite selon la même modalité, et pas simplement un coup de fil.
Cela relève en effet du bon sens que d'avoir une réponse écrite à une question écrite. Cela confère également une traçabilité à la réponse, ce qui me paraît parfaitement logique. Voilà ce que demandent la plupart des usagers.
Je veux bien que l'on parte du principe que, par nature, l'administration peut répondre par téléphone si elle n'a pas envie de laisser de traces écrites mais, objectivement, depuis mon élection comme député puis comme maire, pas un seul contribuable – lesquels savent trouver la porte des élus lorsqu'ils font des permanences sans rendez-vous – ne s'est plaint de l'absence de réponse de l'administration fiscale.
J'ai bien compris la nature de votre demande.
Qu'ils se plaignent de la solution proposée par l'administration fiscale est une chose mais d'une réponse…
… insatisfaisante de la part de l'administration fiscale, cela ne m'est jamais arrivé, y compris depuis que je suis ministre.
Nous n'allons pas rigidifier les choses. Si on envoie un mail – je renvoie à la discussion que nous avons eue avec M. Bernalicis sur ce qui est humain ou non – et que, parce que la question posée est complexe, l'agent préfère répondre par téléphone, appeler le contribuable et lui poser des questions – les gens n'étant pas toujours extrêmement clairs lorsqu'ils écrivent…
D'aucuns cherchent des amis dans l'administration fiscale en général, monsieur le député,
Sourires
mais tout n'est pas dans le rendez-vous physique ! Comme dans la chanson de Polnareff, les mots d'amour peuvent s'échanger sur le clavier !
Sourires.
Lorsque l'on pose une question écrite à l'administration fiscale, objectivement, elle vous répond la plupart du temps par écrit.
Si votre question n'est pas claire ou qu'elle requiert des explications, l'administration peut donner un rendez-vous physique mais il n'y a pas plus de trace écrite que lors d'un entretien téléphonique. Je ne pense pas qu'il faille rigidifier la relation avec l'administration et faire un parallélisme des formes entre demande et réponse écrites.
Sur cette question, monsieur le ministre, j'ai plusieurs exemples où des contribuables ont envoyé un mail. Ils ont été rappelés, on leur a dit que leur question était en effet un peu complexe et que, faute d'un nouvel appel de la part de l'administration, leur interprétation était la bonne. Je suis désolée, mais ce n'est pas là une relation de confiance.
On peut très bien discuter avec le contribuable et lui envoyer un petit mail afin qu'il y ait une trace écrite. La confiance, cela se construit. Dès lors qu'il existe une demande écrite, il doit y avoir une réponse écrite.
Vous voulez tout technocratiser !
Dans le cadre des bonnes pratiques, on ne pourra pas opposer de nombreux exemples où l'administration fiscale n'aurait pas répondu par écrit à un administré demandant une réponse écrite. Si l'objectif est de formaliser la réponse, je vous renvoie à l'article 10 de ce texte élargissant la demande de rescrits. De surcroît, nous avons voté un amendement permettant de fixer un délai à chacune des administrations pour qu'elle puisse répondre.
Même en cours de contrôle.
En effet, vous avez raison.
S'il s'agit de formaliser une garantie sur un point de droit, il convient d'appliquer le droit au contrôle voté à l'article 2 ou la demande de rescrit. Dans ce cas-là, une réponse écrite sera adressée.
S'il s'agit de chercher une bonne formule voire de se montrer poli, comme vous semblez l'indiquer, il vaut mieux s'en remettre en effet au domaine réglementaire afin de codifier les bonnes pratiques de l'administration.
Qu'il est dur de refuser un amendement d'un tel bon sens ! En tout cas, monsieur Guérini, vous êtes un très bon VRP de l'administration fiscale. On rêverait de vous avoir comme interlocuteur. Malheureusement, rien de ce que vous avez dit ne garantit cette réponse écrite, laquelle dépend vraiment du bon vouloir de l'agent.
Lorsque vous dites qu'il ne faut pas rigidifier les pratiques, monsieur le ministre, pourquoi le sont-elles toujours dans le sens du contribuable vers l'administration et pourquoi ne seraient-elles pas gravées dans le marbre en sens inverse, pour des questions de confiance, comme le disait Mme Rabault ? Il faut que la relation soit équitable. Lorsque les contribuables font une demande écrite, ils ont droit à une réponse écrite qui les sécurise et de laquelle ils pourront se prévaloir.
S'ils font la demande d'une réponse, ils l'ont !
Cela ne coûte rien d'écrire cela dans la loi. Si nous sommes tous d'accord sur le principe, nous pouvons l'inscrire dans le texte.
Il y a quelque chose que je ne comprends pas très bien, madame Rabault. Si l'on veut que les relations entre administration et usagers soient plus confiantes, pourquoi rajouter du formalisme ? Une demande écrite peut être faite : on peut demander une réponse écrite si l'on en a besoin, cela a été dit. Sur la forme, il y a donc déjà quelque chose qui me dépasse : à mes yeux, la confiance, ce n'est pas encore plus de formalisme – j'aurais même tendance à penser que c'est plutôt l'inverse.
En outre, nous avons voté l'article 2. Nous l'avons dit depuis le début – cela fera la boucle avec mon intervention de tout à l'heure : il s'agit de la présomption de bonne foi. Et vous dites que faute de réponse écrite et d'une réponse téléphonique, vocale, il n'est pas possible de prouver la bonne foi de l'usager ! Mais c'est l'inverse puisqu'il est présumé de bonne foi !
Bien plutôt, on ne peut pas prouver sa mauvaise foi en raison d'une absence de trace écrite. C'est l'inverse de cette logique. L'exemple que vous avez donné ne tient pas dès lors que nous avons voté l'article 2. Le contribuable, en l'occurrence, est présumé de bonne foi. Il n'est donc pas nécessaire de la prouver par la présence d'une trace écrite ou d'en déduire son absence faute d'une trace écrite. Je ne comprends donc pas votre exemple.
Sur l'amendement no 809 , je suis saisie par le groupe Nouvelle Gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
Je trouve qu'on pourrait se lâcher un peu, si vous me passez l'expression. Cet amendement n'est pas extraordinaire, puisqu'il demande seulement un retour écrit.
Je comprends tout à fait, monsieur le ministre, qu'il soit compliqué pour l'administration de répondre à des milliers de messages électroniques, mais je ne vois pas pourquoi cette proposition suscite un tel blocage. Franchement, un retour écrit, une trace, ce n'est pas grand-chose.
Je comprends votre tentation, mais il faut réaliser que si cet amendement est adopté, à toute demande écrite, il y aura une réponse écrite,
« Oui ! » sur les bancs du groupe LR
même quand l'administré préférerait qu'on le rappelle au téléphone, pour qu'il puisse demander des précisions. L'amendement, tel qu'il est rédigé, prévoit que tout message électronique, quel que soit son contenu, devra faire l'objet d'une réponse écrite.
Sourires.
Faisons attention ! Vous disiez vouloir graver cela dans le marbre, mais à trop vouloir figer les choses, nous risquons de nous retrouver à Pompéi. Je maintiens que l'administré, même lorsqu'il formule une demande écrite, n'est pas forcément en demande d'une réponse écrite et qu'il peut parfois préférer recevoir un coup de fil. Or le vote de cet amendement impliquerait une réponse écrite systématique. Par ailleurs, si un administré demande expressément à recevoir une demande écrite, je ne vois pas pourquoi l'administration le lui refuserait.
La confiance est des deux côtés…
… et, objectivement, ce ne serait pas un grand signe de confiance que de préciser dans la loi, de manière rigide, la manière dont des fonctionnaires, qui sont des personnes de très grande qualité, doivent répondre à des contribuables ou à des entreprises. La confiance n'est pas seulement du côté des contribuables et des entreprises.
Par ailleurs, comme nous discutons d'un texte sur le droit à l'erreur – c'est ce que M. Saint-Martin a essayé d'expliciter – , quand nous aurons adopté ce texte et qu'il sera devenu une loi de la République, c'est l'administration qui aura intérêt à répondre par écrit, et pas l'inverse, puisque la bonne foi sera du côté de celui qui demande, en l'occurrence, le contribuable ou l'entreprise. Si l'administration est en désaccord avec la question ou la suggestion formulée par écrit par un contribuable ou par une entreprise, c'est bien elle qui aura intérêt à rigidifier les choses et à laisser une trace écrite.
Je pense donc que vous raisonnez, premièrement, en ne faisant pas confiance aux agents du service public et, deuxièmement, en imaginant que ce texte ne changera pas les pratiques administratives, alors que c'est tout le contraire, puisqu'on part du principe que, une fois le texte promulgué, la bonne foi sera du côté du contribuable.
Si elle ne fait pas de réponse écrite, c'est l'administration qui se mettra en porte-à-faux.
Enfin, je ferai une simple observation sur la manière de se comporter avec les gens – et j'imagine que vous faites de même dans votre vie politique. Lorsque quelqu'un vous écrit une lettre et vous laisse son numéro de portable, en tant que parlementaire ou ministre, si, plutôt que de lui écrire une lettre administrative, vous prenez votre portable pour l'appeler directement, je suis sûr que vous lui faites plus d'effet.
Je pense franchement que vous êtes en train de rigidifier les relations avec l'administration, alors même que vous demandez tous de la souplesse et que vous souhaitez que la bonne foi soit du côté du contribuable.
Il est intéressant de voir dans la bouche du ministre des arguments que nous avons nous-mêmes développés au début de ce débat : il nous dit maintenant qu'il y a finalement dans l'administration des gens dotés de discernement, bourrés de qualités et capables de répondre.
Ce n'est pas vrai !
On peut en effet attendre de l'administration qu'elle nous réponde quand on lui écrit. Mais il existe déjà des textes sur cette question. Il y en a même qui concernent les demandes abusives et répétitives adressées à l'administration, qui risquent de nuire à son bon fonctionnement. Avec ma collègue Danièle Obono, je pense donc que nous nous abstiendrons sur le vote de cet amendement, parce que je ne vois pas ce qu'il apporte.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, ce qu'apporte cet amendement, c'est le suivi de la réponse. L'exemple que vous avez pris n'est pas le bon : il est vrai qu'une conversation téléphonique peut permettre d'éclaircir les choses, mais cet échange peut tout aussi bien se faire par courrier électronique, ce qui a le mérite de laisser une trace.
Par ailleurs, ce texte ayant pour but de laisser à l'administration, et donc à ses agents, la possibilité d'interpréter les règles pour les adapter au mieux à la demande personnalisée de chaque administré, nous aurons un besoin accru de traces écrites. Imaginons qu'un agent qui s'est chargé d'ouvrir un dossier et qui a fourni une première réponse à un administré soit absent, ou malade, ou qu'il ait été muté, lorsque ce dernier revient vers lui pour lui demander une précision. Dans ce cas-là, comment faire s'il n'existe pas de trace écrite ? Cela pose un vrai problème.
Je ne vois pas ce qui vous gêne dans le parallélisme des formes : à demande écrite, réponse écrite.
Cet article vise à fluidifier et à simplifier les choses. Or il me semble que cet amendement les complique. Rien ne pourra empêcher une personne d'écrire vingt ou trente messages électroniques et d'exiger des réponses. Il faudrait, dans ce cas-là, prévoir une procédure dans le cas où l'administration ne répond pas. Que se passe-t-il si l'administration ne répond pas à une demande écrite ?
Je propose donc un sous-amendement, prévoyant que l'administration doit répondre par écrit si l'administré fait une demande écrite.
Je ne sais pas, madame la présidente, si vous souhaitez mettre fin à ce débat, qui révèle des divergences quant à la confiance que nous avons dans les agents du service public.
S'agissant de l'administration fiscale, que je ne cherche pas spécialement à protéger, il faut bien dire qu'elle est extrêmement efficace lorsqu'il s'agit de répondre. Objectivement !
Si vous adoptez l'amendement de Mme Rabault, vous allez faire une chose tout à fait formidable, qui sera sans doute dénoncée par les prochains législateurs et par le prochain ministre. Permettez-moi de vous relire l'article qu'elle souhaite introduire : « Lorsqu'elle est interrogée par des contribuables par la messagerie électronique ou via sa plateforme, l'administration fiscale transmet une réponse écrite, que ce soit par voie postale ou via sa plateforme électronique. » Cela signifie que la loi de la République obligera tout agent public, même s'il a répondu aussitôt par téléphone à la demande écrite d'un contribuable, à lui répondre à nouveau par écrit. Si un contribuable veut se renseigner sur la réforme de la taxe d'habitation, il faudra absolument lui répondre par écrit ?
« Oui ! » sur les bancs du groupe LR.
Je ne savais pas que vous étiez à ce point bureaucratiques et communistes !
Applaudissements sur les bancs du groupe REM. - Exclamations sur les bancs des groupes LR et FI.
Je trouve cela totalement absurde.
Nous allons clore le débat sur cet amendement. La parole est à Mme Valérie Rabault, pour une dernière prise de parole.
Je ne pensais pas que cet amendement susciterait autant de réactions et autant de débats. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je vous propose, pour clore le débat, un sous-amendement qui prévoirait de demander au contribuable s'il préfère une réponse écrite ou téléphonique.
On est chez les dingues !
Pourquoi dites-vous cela, monsieur le ministre ? Vous prônez la confiance et je ne vois pas en quoi cet amendement la remet en cause. Je demande seulement que la réponse prenne la même forme que la question, qu'elle ait été envoyée par messagerie électronique ou via une plateforme.
Les fonctionnaires sont des grandes personnes !
C'est le caractère systématique de votre rédaction qui me pose un vrai problème. Je reviens à l'exemple que j'ai déjà donné : imaginons qu'un administré demande à être rappelé par téléphone pour une demande d'information. L'agent serait contraint, avec votre amendement, à faire une réponse écrite. Et je suis opposé à ce formalisme excessif.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 68 |
Nombre de suffrages exprimés | 64 |
Majorité absolue | 33 |
Pour l'adoption | 19 |
contre | 45 |
L'amendement no 809 n'est pas adopté.
À un moment donné, j'ai cru qu'on faisait durer le débat pour m'empêcher de défendre l'amendement no 905 ce soir.
On vous fera une réponse écrite !
Pour vous expliquer le fond de l'affaire, cet amendement est un peu orphelin de l'amendement no 904 , qui a été jugé irrecevable, et qui proposait de mettre en place une plate-forme et un Numéro Vert pour les lanceurs d'alerte. Il s'agissait de les informer sur leurs droits, de les orienter vers différents membres de la société civile, de recueillir leur témoignage, d'engager les démarches nécessaires et de leur apporter un soutien psychologique.
Être lanceur d'alerte aujourd'hui, c'est une démarche personnelle qui demande beaucoup de volonté et de courage, surtout quand on voit le sort qui leur est souvent réservé. Même quand la société reconnaît la valeur de leur acte, ce qui est souvent le cas, la justice, elle, en décide autrement.
Pour inciter à ce courage, qui nous honore tous collectivement, nous proposons que soient affichés, avant le 1er septembre 2018, dans les locaux accessibles aux salariés, le texte des articles 10 et 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 sur la liberté d'expression et la liberté d'opinion, des articles 6 à 9 de la loi 2016-1691 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, et la précision que ces libertés sont valables pour des constats réalisés par des salariés qui dérogeraient à certaines règles de droit commun.
Ce texte reconnaît le droit à l'erreur et prône la confiance. Or la confiance, nous la devons aussi à ces lanceurs d'alerte, qu'il faut honorer, car ils font en sorte que notre vivre-ensemble et notre État de droit soient garantis, par le respect de nos lois et de nos règles communes.
Les textes que vous citez sont accessibles gratuitement sur internet. C'est à nous, élus, de faire connaître la loi, et aux syndicats, éventuellement, de faire le choix de les afficher dans les locaux professionnels.
Citer dans la loi tous les textes de loi qui devraient être affichés dans les entreprises ne m'apparaît pas nécessaire. Avis défavorable.
Dans nos ascenseurs, comme dans quelques locaux de l'Assemblée nationale, un texte sur le harcèlement a été affiché récemment, à la suite de certains événements. Y figurent des extraits du code pénal, qui sont libres de droit, accessibles sur internet et gratuits.
Je ne sais pas pourquoi on les a mis là. On a dû se tromper, puisque ça ne sert à rien.
Pourquoi l'a-t-on fait ? Parce qu'un article n'a pas la même lisibilité quand il est perdu dans les méandres de la loi et quand il est affiché dans l'espace public et qu'on passe devant tous les jours. C'est fondamentalement différent, et vous le savez très bien. Je ne vais pas revenir, monsieur le ministre, sur votre excellente intervention de tout à l'heure, lorsque vous avez dit que tout le monde n'était pas à égalité en matière d'accès au droit, quand vous avez souligné sa complexité, due à l'empilement des textes, et que vous avez dit que le droit constitutionnel, ce n'est pas évident pour tout le monde. Lorsque la loi est affichée, il n'y a pas de doute.
Avec cet amendement, tout le monde saurait ce qu'est un lanceur d'alerte et quels sont ses droits. On pourrait même afficher la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en entier dans toutes les entreprises. Si vous proposez un sous-amendement dans ce sens, nous le voterons.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 905 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Suite de la discussion du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance.
La séance est levée.
La séance est levée, le mercredi 24 janvier 2018 à une heure.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Catherine Joly