J'ai compris qu'une deuxième audition aura lieu concernant le fonctionnement institutionnel de Météo France, en présence de son président-directeur général. En quelques mots, nous sommes une instance de conseil auprès de l'État, en l'occurrence nous conseillons le préfet.
Vous nous aviez par ailleurs posé une question à laquelle nous n'avons pas répondu concernant l'efficacité comparée des modèles américain et européen. Puisque vous parlez de la Réunion, je voudrais rappeler l'historique de la dépression tropicale Ava, qui est allée percuter Madagascar. Quelques jours avant cet événement, les prévisions du Centre européen de prévision météorologique à moyen terme annonçaient une trajectoire vers Madagascar, quand le modèle américain Global forecast system annonçait une trajectoire qui s'infléchissait vers la Réunion, ce qui a mis en alerte les autorités publiques. Notre modèle « Action de recherche petite échelle grande échelle » (ARPEGE) était cohérent avec le modèle Integrated forecast system du centre européen. En l'espèce, le modèle européen était meilleur.
De même, pour les événements de la Guadeloupe, de la Martinique, des Îles du Nord, le modèle du Centre européen est, de loin, le meilleur – les chiffres le montrent. Ce modèle européen, global, et le modèle français, ARPEGE, également global, sont en fait identiques. Ils sont le résultat d'une collaboration assez unique entre une organisation européenne – avec un statut d'organisation internationale – et un pays membre. Nous avons développé ensemble un modèle global, avec des configurations légèrement différentes lorsqu'il est utilisé par le centre européen ou par la France. Ces modèles sont excellents : le meilleur modèle de prévisions globales est celui du centre européen et le meilleur modèle à courte échéance sur l'Europe est le modèle français.
Les Américains ont fini par prendre en compte nos prévisions. Notre modèle AROME de petite échelle, qui traite de manière explicite les précipitations et les phénomènes convectifs, couplé à ces modèles de grande échelle, apporte une information très précieuse sur l'évolution des phénomènes. En effet, il ne suffit pas de prévoir la trajectoire d'un cyclone, il faut également prévoir son intensification ou son affaiblissement.
C'est ce que nous faisons à la Réunion : nous suivons le phénomène – j'y travaillais encore cette nuit, ainsi que mes collègues. Initialement, la prévision du centre européen le faisait passer au nord de l'île, ce qui lui aurait été très dommageable. Le modèle français ARPEGE prévoyait plutôt un passage au sud, AROME indiquant que le phénomène s'amoindrissait. Il s'agissait de prévisions délicates, sur des centaines de kilomètres, deux à trois jours à l'avance. Mais nous sommes aujourd'hui capables de produire des prévisions qui permettent de bien informer les populations et le préfet, qui doit ensuite prendre ses décisions. Vous comprendrez que nous ne sommes pas là pour juger la polémique locale.