Intervention de Stéphane Peu

Réunion du mercredi 24 janvier 2018 à 16h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Peu :

Je tiens en premier lieu à m'excuser de mon absence lorsque vous avez commencé l'examen de cette proposition de loi, étant à l'ouverture du procès de Jawad Bendaoud, en lien avec les attentats du 13 novembre 2015, pour lequel, en qualité d'élu de Saint-Denis, je me suis constitué partie civile.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera ce texte, et ce pour deux raisons. La première, c'est qu'en la matière, la responsabilité des politiques est immense. Je vous rappelle que le récépissé était une promesse du candidat François Hollande en 2012, une promesse non tenue. Quant au candidat Emmanuel Macron, il s'était pour sa part inquiété de la question des contrôles au faciès et de la discrimination, mais n'a rien proposé une fois au pouvoir. C'est comme cela que l'on décrédibilise l'action publique et que l'on nourrit dans la population, et tout particulièrement parmi les jeunes issus de l'immigration, le doute et le soupçon vis-à-vis de la sincérité du discours politique.

En second lieu, cette pratique, que je connais bien pour être un élu de la Seine-Saint-Denis, pose des problèmes aux jeunes, mais aussi aux policiers. Car, ce que vous disent les agents dans les commissariats de banlieue, c'est que le contrôle d'identité, c'est la police du pauvre. Lorsque vous n'avez pas les moyens de faire de l'investigation sur des délits avérés et que vous n'avez pas les moyens de faire de la prévention parce que vos effectifs ne vous le permettent pas, le seul moyen à votre disposition pour vous rendre « visible » et rassurer les populations, c'est de procéder, parfois cinq à dix fois dans la même nuit, à des contrôles systématiques dans certains quartiers. Pensez-vous vraiment que les policiers de terrain n'ont pas conscience d'être « à côté de la plaque » avec ces contrôles ? À côté de ce qu'attend d'eux la population en matière de sécurité ?

Je ne crois donc pas que cette proposition de loi soit en quoi que ce soit hostile aux policiers ou à la police en général ; au contraire – et je rejoins Éric Coquerel sur ce point. Si le fossé continue de se creuser et si la défiance persiste à grandir entre les jeunes et la police, c'est toute la République qui en souffrira, et d'abord ces jeunes et ces policiers qui ne supportent plus de voir leur action condamnée à l'inefficacité la plus totale.

Par ailleurs, cette proposition de loi nous paraît d'autant plus raisonnable qu'elle passe par une expérimentation fondée sur le volontariat. J'ajoute qu'elle propose une solution qui, sous la pression des juridictions, des ONG, voire de la Cour de cassation, finira par s'imposer à nous. Or une solution imposée se met toujours en place dans de plus mauvaises conditions que lorsque l'on en a pris l'initiative.

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