Intervention de Sébastien Chenu

Séance en hémicycle du jeudi 1er février 2018 à 21h30
Euthanasie et suicide assisté pour une fin de vie digne — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Chenu :

Monsieur le président, madame le ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, après quelques mois passés à écouter dans cet hémicycle nos collègues de La France insoumise défendre « une autre vision de la société », j'ai été surpris de les voir défendre une proposition de loi destinée à légaliser l'euthanasie et le suicide assisté.

Comprenez mon étonnement : alors même que je vous croyais encore attachés à l'idée que tout, dans une société, ne pouvait être contrôlé par le marché, mesuré par l'utilité sociale et trié en fonction de la rentabilité économique, je découvre cette proposition de loi. Je la respecte, mais elle bat en brèche cette vision des choses.

Qu'elle est loin, l'époque où l'idée du don et du contre-don, développée par Marcel Mauss, père de l'anthropologie française, faisait chemin ! Qu'elle est loin, l'époque où vous considériez, comme lui, que fonder une société sur l'économisme était un choix civilisationnel inacceptable ! Qu'elle est loin, l'époque où vous ne considériez pas l'homme comme un maillon de la chaîne du tout-économique, et où vous preniez en compte l'idéalisme et la spiritualité politique qui pouvaient mettre en mouvement l'humanité !

En réalité, avec cette proposition de loi, vous vous rangez à la doxa matérialiste défendue par le libéralisme politique que vous feignez pourtant de combattre, selon laquelle tout est matériel et marchand. Dites-moi, dans votre futur idéal, quelle place réservez-vous à l'homme ? Car il faut être bien naïf pour croire que c'est la liberté qui sous-tend ce texte.

Votre proposition de loi sur le suicide assisté participe d'un profond matérialisme. Dans la vision qui guide votre projet, les personnes en souffrance dans notre société, notamment les personnes les plus âgées, ne trouvant plus d'utilité sociale, ne pouvant plus produire, devraient pouvoir être écartées de la société par la mort. Cela est encore plus grave lorsque ce sentiment est imposé par la société elle-même. « Je ne connaissais que des pauvres, c'est-à-dire des gens dont la mort n'intéresse personne », écrivait Céline. Nous y sommes.

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