Au nom de La France insoumise, je tiens à vous remercier pour votre intervention. La commission aura certainement le plaisir de vous recevoir une fois encore à l'automne : en tant que président du CCNE, vous êtes directement concerné par la révision des lois de bioéthique qui devrait avoir lieu dès cette année. Vous vous êtes d'ailleurs prononcé en faveur d'une telle révision et vous avez annoncé que les états généraux se tiendront au plan régional jusqu'au mois de juin. C'est sur la base de vos propositions que nous devrions être saisis avant la fin de l'année.
Les sujets sont nombreux, comme les questions à vous poser. J'en garde donc en réserve pour une prochaine rencontre. La dernière révision des lois de bioéthique, en 2011, n'a pas été à la hauteur des enjeux en ce qui concerne le respect de la dignité humaine en fin de vie, et ce sera aujourd'hui l'objet de mon intervention.
Certes, et on l'a dit avant moi, la sédation profonde et continue est désormais possible pour certains patients – cela doit leur permettre d'éviter de souffrir avant de mourir –, mais la décision est conditionnée à l'accord des médecins : elle n'est pas pleinement et exclusivement de la responsabilité des patients. Comme de nombreux Français, vous avez certainement été touché par l'histoire d'Anne Bert, cette écrivaine atteinte de la maladie de Charcot, qui provoque une paralysie progressive de l'ensemble de la musculature squelettique des membres. Militant activement pour le droit de choisir sa fin de vie, elle avait interpellé les candidats à l'élection présidentielle de 2017. Elle jugeait la loi largement insuffisante, constat que nous partageons. En septembre dernier, elle a annoncé sa volonté de mettre fin à ses souffrances et d'être euthanasiée. Elle a donc traversé la frontière pour rejoindre un centre de soins palliatifs à l'étranger : française, elle a fermé définitivement les yeux en Belgique, le 2 octobre 2017.
En évoquant ce sujet, j'ai à l'esprit les milliers de patients victimes des mêmes souffrances qui aimeraient décider d'en finir dignement, mais en sont empêchés sur le territoire national. Selon moi, le droit à mourir dans la dignité est un droit fondamental et j'aimerais profondément que le législateur permette de le respecter. Il est temps d'avoir ce débat au sein de notre assemblée. À l'occasion d'une prochaine « niche » parlementaire attribuée à mon groupe, Caroline Fiat aura ainsi l'honneur de présenter une proposition de loi visant à permettre une fin de vie digne. Notre texte décrit les procédures et les conditions d'application de ce droit, il améliore les conditions de désignation de la personne de confiance, il dépénalise la participation des médecins et il adapte leur code de déontologie tout en introduisant une clause de conscience. Ce sera l'occasion de réaliser une avancée majeure pour le respect de la dignité humaine.
Dans son avis n° 121, datant de 2013, le CCNE s'était prononcé en faveur d'un tel droit. En tant que président de ce comité, pourriez-vous confirmer que sa position n'a pas changé et nous donner votre sentiment sur la proposition de loi que je viens d'évoquer ? Votre avis pourrait être particulièrement éclairant. Il pourrait même permettre, peut-être, de convaincre les députés de la majorité, qui rejettent régulièrement les propositions dès lors qu'elles sont issues de nos rangs – ce qui donne l'impression que ce n'est pas la proposition elle-même qui compte, mais la personne ou le groupe dont elle émane. Votre avis aurait donc un intérêt particulier.