Le bureau Multicom 3 est chargé de la lutte contre la criminalité financière et chargé des sanctions internationales : ces deux activités ont des liens entre elles mais restent, fondamentalement, au quotidien, assez différentes.
La lutte contre la criminalité financière regroupe la lutte contre le blanchiment de capitaux, la lutte contre le financement du terrorisme et la lutte contre la corruption. Le bureau a, dans ce champ d'activité, une fonction assez classique de régulateur et cela à trois niveaux. Le premier est le niveau international : nous représentons la France dans un certain nombre d'institutions comme le Groupe d'action financière (GAFI) qui édicte toutes les normes en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux, le groupe G20 sur la lutte contre la corruption, ou encore le groupe de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) contre la corruption. Au niveau européen ensuite, nous apportons toutes les « briques » techniques et nous contribuons aux négociations techniques sur les textes européens – par exemple sur la directive sur le blanchiment. Enfin, au niveau national, c'est nous qui proposons la réglementation en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme.
Pour ce qui est de la criminalité financière, notre champ d'action dépend très largement de la matière traitée : dans la lutte contre le blanchiment des capitaux, nous agissons bien aux trois niveaux et c'est bien nous, j'y insiste, qui proposons les textes réglementaires. En revanche, pour ce qui est de la corruption, notre activité est bien plus limitée, nous sommes beaucoup plus en retrait : nous représentons la France auprès de certaines organisations internationales mais, pour la partie régulation, nous sommes seulement un bureau contributeur derrière d'autres bureaux pilotes métiers qui viennent notamment du ministère de la justice.
Quant à notre activité en matière de sanctions internationales, elle est assez atypique. Elle peut prendre la forme d'un soutien technique que nous apportons, lorsque des programmes de sanctions internationales sont envisagés, au ministère de l'Europe et des affaires étrangères qui fixe l'objectif politique à atteindre. Nous donnons ainsi notre avis sur l'impact de telle mesure, apportons une contre-expertise sur des propositions des partenaires européens, etc.
Nous sommes également chargés de leur mise en oeuvre au quotidien : c'est ainsi que nous publions une documentation pour expliquer les sanctions, nous éditons des guides pour accompagner les exportateurs, mais également les établissements financiers, dans la compréhension des règlements européens en matière de sanctions internationales. Nous avons ainsi une boîte générique qui permet de répondre aux questions des exportateurs. Il nous appartient également, lorsque les textes européens le prévoient, de délivrer des autorisations de transactions financières puisque, dans certaines situations, il faut que les exportateurs et les banques viennent nous voir pour être autorisés à effectuer telle ou telle transaction vers un pays qui peut être sous sanction. Voilà pour le champ d'activité du bureau.
L'extraterritorialité est quant à elle une question très importante pour nous. Nous avons suivi de très près la rédaction du rapport parlementaire d'octobre 2016, qui a permis de lancer de nombreuses réflexions. De notre point de vue, l'extraterritorialité fait surtout partie de la catégorie « sanctions internationales » et nous la traitons sous deux angles.
Le premier consiste en un dialogue très régulier et étroit avec les autorités des pays concernés, en particulier les autorités américaines, notamment pour amener à clarifier les régimes de sanction en vigueur. Ainsi, dans le cadre de l'accord de Vienne avec l'Iran, une partie de cet accord consistait à clarifier les régimes de sanctions résiduelles après la levée des sanctions. Cet accord politique s'est traduit techniquement par un dialogue entre les autorités américaines chargées de ces sanctions, donc le Trésor américain et en particulier l'OFAC (Office of Foreign Assets Control), et nous-mêmes, ainsi que d'autres administrations, afin d'essayer de repérer quels points de la réglementation américaine pouvaient être clarifiés. Ce travail a donné lieu à la publication de dizaines de pages sur le site du Trésor américain dans la perspective de clarifier sa réglementation et d'en atténuer les effets de bord : il s'agissait de rassurer nos exportateurs sur ce qu'ils pouvaient faire ou non.
Second angle, le dialogue au niveau européen : nous sommes convaincus que nous ne pouvons pas régler seuls la question de l'extraterritorialité. Il nous faut donc des partenaires. Mais il n'en est qu'à ses débuts.
Nos missions ne prévoient pas le suivi de dossiers particuliers de poursuites judiciaires qui auraient lieu aux États-Unis. Cette question relève sans doute bien plus du ministère de la justice ou plus largement des autorités judiciaires françaises. Nos discussions dans cette matière avec les États-Unis sont de nature transversale.
Vous nous avez interrogés par ailleurs sur l'administration chargée de l'application de la loi dite de blocage. Depuis l'entrée en vigueur de la loi Sapin 2, l'Agence française anticorruption est chargée d'appliquer la loi de blocage lorsque les entreprises françaises sont soumises à des programmes d'autorités étrangères de mise en conformité – de la part des autorités américaines par exemple. Nous sommes associés à cette mise en oeuvre sous certains aspects mais, j'y insiste, c'est vraiment l'agence qui est le pilote en la matière.