Madame la députée, l'évolution des échanges commerciaux de ces derniers mois est vraisemblablement de nature conjoncturelle. Les déplacements d'investissements n'ont pu avoir, à aussi court terme, un tel effet sur le commerce extérieur, mais la dévaluation de la livre sterling stimule les exportations britanniques et peut dégrader notre balance commerciale.
Pour le moment, on n'observe pas une délocalisation massive d'investisseurs et les grands acteurs industriels attendent de voir comment les choses se passent avant d'engager de nouveaux investissements. En revanche, dans le domaine financier, très régulé et nécessitant toutes sortes d'autorisations, on se prépare sérieusement à un repli dans l'Union européenne, en créant des structures juridiques, des statuts d'établissements de crédit afin d'être prêt, le moment venu, à relocaliser les activités.
Les attitudes sont donc différentes, mais cela ne se traduit pas dans le solde commercial. Oui, la Grande-Bretagne est un partenaire important ; c'est la raison pour laquelle la France a intérêt à un accord de libre-échange incluant le moins de droits de douane possible.
Monsieur le député, c'est vrai, les Britanniques sont très discrets sur le droit de la concurrence et ont intérêt à minimiser le sujet dans la négociation. On ne sait pas ce qui a été promis à Nissan – on subodore qu'il s'agit d'aides d'État, de subventions –, mais ce dossier a permis de faire prendre conscience aux pouvoirs publics et aux acteurs économiques de l'importance de l'enjeu des aides d'État et des conditions équitables de concurrence.
Les Britanniques devront dans tous les cas respecter les normes européennes sur les biens pour pouvoir les exporter vers l'Union européenne, mais la question se pose s'agissant des règles sur les processus de production (par exemple, le règlement REACH qui vise à sécuriser la fabrication et l'utilisation des substances chimiques dans l'industrie européenne). Si le Royaume-Uni se mettait à exporter sans droits de douane et sans contrôles des produits fabriqués sans respecter nos normes, nous ferions face, à moyen terme, à un important problème de concurrence. Cela risque d'être difficile sur le plan politique. Dans les accords de libre-échange conclus par l'Union européenne, la dimension des normes environnementales est peu développée s'agissant spécifiquement des processus de production.
Il en va de même pour les aides d'État : si les Britanniques commencent à subventionner massivement leurs entreprises et que cela leur donne un avantage compétitif, cela nous posera problème. D'où l'intérêt d'introduire, dans l'accord de libre-échange, des clauses qui nous permettent de réagir face à ce genre d'évolution.