Madame la présidente, chers collègues, le protocole no 16 vise à renforcer le dialogue entre les juges de la Cour européenne des droits de l'homme et les juges nationaux, ce qui est une bonne chose. En effet, la Cour européenne des droits de l'homme est l'institution garante des principes inscrits dans la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Créée en 1959 par le Conseil de l'Europe, elle exerce de nos jours une influence bien au-delà des frontières de l'Union européenne puisqu'elle rassemble quarante-sept États.
Le protocole que vous nous proposez de ratifier ouvre aux plus hautes juridictions des États parties à la convention la possibilité d'adresser à la CEDH des demandes d'avis consultatifs sur des questions d'interprétation ou d'application des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Même si cette procédure sera facultative et même si – faut-il le rappeler ? – les avis rendus par la CEDH ne sont pas contraignants, cette évolution n'en demeure pas moins essentielle pour mieux respecter les droits humains fondamentaux. L'un de nos collègues évoquait tout à l'heure – il a depuis lors quitté l'hémicycle – son refus de la « soumission » de notre pays à la CEDH. Voilà qui est curieux, alors que les députés de ces mêmes bancs acceptent de se soumettre aux traités « austéritaires » et néolibéraux de l'Union européenne.
Le protocole vise également à résorber l'engorgement de la CEDH. En effet, le processus d'élargissement du Conseil de l'Europe, qui compte désormais quarante-sept États membres, a manifestement entraîné un afflux massif de requêtes devant la CEDH. La structure du contrôle juridictionnel ainsi que ses conditions d'exercice ont dû être modifiées afin de permettre à la Cour de faire face efficacement au nombre croissant de requêtes dont elle est saisie. Le protocole qu'il nous est proposé de ratifier vise à répondre au nombre excessif de requêtes individuelles portées devant la CEDH, mais aussi au problème des mauvaises interprétations et applications de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par les États membres et à l'insuffisance du dialogue entre eux et la CEDH.
Il a vocation à faciliter l'application de la jurisprudence de la CEDH au niveau national et à résoudre en amont les difficultés d'interprétation de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il est en effet nécessaire de faciliter l'application de la jurisprudence de la CEDH, qui protège de nombreux droits humains fondamentaux. Citons notamment l'article 4 de la convention, qui proscrit l'esclavage et le travail forcé. Nous savons qu'on recense en Europe environ 600 000 esclaves modernes, que leur statut fragile maintient dans la précarité, tels les travailleurs migrants, notamment les sans-papiers et les demandeurs d'asile, qui sont les plus exposés au risque d'exploitation. En France – faut-il le rappeler ? – , la justice peine à lutter contre le travail forcé, dont la pratique se répand notamment dans l'agriculture, la construction, l'industrie et la restauration.