Madame la présidente, monsieur le vice-président de la commission mixte paritaire, cher Bruno Studer, monsieur le rapporteur de la commission mixte paritaire, cher Gabriel Attal, mesdames et messieurs les députés, au coeur du projet de loi relatif à l'orientation et à la réussite des étudiants, il y a une ambition : celle d'accompagner plus de lycéens et d'étudiants vers l'enseignement supérieur et vers la réussite. C'est l'épine dorsale de ce texte, c'est la boussole que je me suis fixée et c'est cet objectif, je le sais, que nous avons très largement partagé au long de chacune des étapes du travail parlementaire.
Chacun l'a bien vu, la massification s'est faite, à l'école comme à l'université, et c'est une bonne chose, mais la démocratisation reste à faire : l'accomplir et la réussir, c'est là le défi qui s'offre à nous. C'est la raison pour laquelle, au-delà des dysfonctionnements inacceptables qu'a connus la procédure d'entrée dans l'enseignement supérieur, le Gouvernement a souhaité construire un plan étudiants qui saisisse dans sa globalité la question de l'accès aux études supérieures, dans ses composantes pédagogiques, mais aussi matérielles. Le plan étudiants est un bloc ; il apporte des réponses concrètes à des questions concrètes, et ne sépare pas l'accompagnement pédagogique des politiques de prévention et de l'action en faveur de la vie étudiante.
Forte de cette ambition, je me suis attachée, tout au long de la préparation et de l'examen de ce projet de loi, à engager le dialogue le plus large possible avec l'ensemble des acteurs de l'enseignement supérieur et des forces politiques représentées dans cet hémicycle. En effet, l'enjeu est particulièrement important ; l'avenir de notre jeunesse est l'une des grandes causes qui peuvent rassembler très largement.
C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité asseoir ce projet sur une base saine et solide, en ouvrant dès le mois de juillet une large concertation et en la conduisant tout au long de l'été. La voix de chacun a été écoutée et entendue, enrichissant ainsi encore ce plan étudiants qui, je le disais à l'instant, traduit une vision d'ensemble et une exigence globale : celles d'être aux côtés de notre jeunesse, de l'informer, de l'accompagner et de lui rendre la liberté de faire de vrais choix, c'est-à-dire des choix informés et construits. Nous le devons à l'ensemble de notre jeunesse. L'enjeu – primordial – est bien de rendre tous nos futurs étudiants maîtres de leur avenir, quel que soit leur projet et quels que soient leur territoire ou leur milieu d'origine.
Aujourd'hui, nous le savons, tous ne sont pas égaux face à notre système d'enseignement supérieur. Les inégalités sont là, entre filières, entre territoires, entre catégories socio-professionnelles. L'ambition du Gouvernement est de les réduire, non pas en diminuant la liberté de certains, mais bien au contraire en permettant à chacun des futurs étudiants d'être pleinement maître de ses choix. La liberté de décider de son avenir ne peut être un privilège ; elle doit être garantie à tous. C'est tout le sens de ce plan étudiants. Identifier les voies et les moyens d'y parvenir en apportant des réponses précises et concrètes aux difficultés rencontrées par les étudiants, voilà ce que nous avons fait ensemble.
Je veux souligner la qualité remarquable du travail parlementaire conduit sur ce texte, en particulier par l'Assemblée nationale, qui a fait plus que poser sa marque sur ce projet : elle se l'est approprié et lui a donné son sens. Dès le stade de l'examen en commission des affaires culturelles, sous la houlette du président Bruno Studer, que je tiens à remercier chaleureusement, vous avez profondément fait évoluer ce texte. Je pense naturellement aux nombreux amendements adoptés sur l'initiative de votre rapporteur, Gabriel Attal – que je salue lui aussi très chaleureusement – , qui ont contribué à faire de Parcoursup la plateforme unique d'entrée dans les formations supérieures publiques ou reconnues par l'État. Je pense également, dans un registre différent, à l'entrée des étudiants au conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie – CNAM – ou à l'introduction d'un cadrage national des attendus. Enfin, je salue la volonté du rapporteur d'assurer l'égalité entre tous les étudiants en retenant le principe d'un montant unique pour la contribution vie étudiante, et ce quel que soit le niveau d'études.
La commission des affaires sociales a aussi travaillé à structurer le champ de la prévention étudiante. Un programme annuel de prévention sera conduit dans le prolongement des actions menées au niveau national par le ministère des solidarités et de la santé. Au niveau local, les conférences de prévention étudiantes réuniront tous les acteurs, pour relever quotidiennement ce défi.
Les groupes politiques ont largement contribué à ces évolutions du projet de loi. Je remercie chaleureusement Anne Brugnera et l'ensemble des membres du groupe La République en marche, ainsi que Philippe Berta, pour le groupe MODEM. Tous ont participé à ces travaux dans un esprit d'ouverture, de dialogue et de responsabilité, et de nombreux amendements ont pu être adoptés.
L'adoption de ces amendements a permis d'aller beaucoup plus loin en prenant en compte les situations particulières de nombre de bacheliers. C'est à votre instigation que, non seulement les futurs étudiants en situation de handicap, mais aussi les bacheliers ultramarins ou des lycées français de l'étranger ont pu trouver toute leur place dans ce dispositif. Vos amendements ont permis de définir un juste équilibre, garantissant à chacun, quelle que soit sa situation, toutes les chances d'accéder dans les meilleures conditions à l'enseignement supérieur, ce qui est l'objectif du texte.
Vous avez également eu un souci permanent en matière de contrôle et d'évaluation du dispositif. Outre le rapport sur l'application du bon fonctionnement de la procédure, je salue le travail mené par Cédric Villani sur la publicité du code source de l'algorithme de la plateforme Parcoursup. C'est essentiel pour rétablir la confiance qui avait été mise à mal par les difficultés rencontrées l'été dernier.
L'opposition a, elle aussi, pris toute sa place. Si je ne minore pas les divergences profondes qui peuvent nous séparer, il était essentiel que le débat ait lieu – et il a eu lieu. Au-delà de ces divergences, l'Assemblée nationale a su se saisir de toutes les propositions concrètes conduisant à de vraies avancées. Je pense notamment à l'extension aux classes préparatoires et aux BTS du dispositif proposé ou aux propositions qui ont conduit, à l'article 2 ter, à poser les principes d'un enseignement modulaire et capitalisable : je sais que Patrick Hetzel en mesure toute la portée.
Le texte adopté au Sénat a aussi permis de concrétiser la volonté d'Annie Genevard de donner toute sa place à la langue française dans l'enseignement supérieur. Je souhaite également avoir un mot pour Nicole Sanquer, Philippe Gomès et le groupe UDI-Agir, dont les amendements ont permis de donner toute leur place aux territoires ultramarins dans ce projet de loi.
Près de soixante-sept amendements avaient été adoptés en commission et en séance publique sur un texte qui ne comptait initialement que six articles. L'immense majorité de ces apports figure dans le projet de loi issu des travaux de la commission mixte paritaire : c'est dire la qualité des améliorations qui ont été apportées.
Le texte issu de la CMP est, par nature, un point de rencontre entre les deux assemblées. La tâche n'était pas aisée ; de véritables et profondes divergences existaient sur des points centraux du projet de loi. Je salue le travail conduit par les députés et les sénateurs, qui a permis de trouver un accord sur ce texte qui répond, j'en suis certaine, aux attentes de l'Assemblée nationale.
Car l'essentiel est bien là : l'ouverture de l'enseignement supérieur à tous les bacheliers, quels que soient leur filière, leur parcours ou leur projet. C'est un baccalauréat dont le statut de premier grade de l'enseignement supérieur est confirmé et consolidé. C'est une procédure d'accès claire et transparente, dont l'arbitraire du tirage au sort est banni. C'est un effort d'information et d'accompagnement inédit, qui permet à chaque bachelier d'avoir une vision complète des formations, de leurs contenus et de leurs attendus pour mûrir leur choix.
L'essentiel, c'est une procédure d'entrée dans laquelle les étudiants ont le dernier mot sur leur avenir et sont en mesure de choisir jusqu'au bout entre les possibilités qui leur sont offertes. L'essentiel, ce sont des capacités d'accueil qui sont fixées par l'État, en lien avec les établissements, ce qui garantit le rôle régulateur de l'État. Je veux être claire sur ce point qui, je le sais, a fait naître des interrogations et parfois de l'émotion : rien, dans le projet de loi qui vous est soumis, n'autorise la conduite d'une politique malthusienne de réduction des capacités d'accueil sous quelque prétexte que ce soit. Rien ne permet d'établir un lien mécanique entre les capacités d'accueil et les taux d'insertion professionnelle.
Je veux par ailleurs le dire très clairement : il n'y aurait pas de sens à prétendre piloter les capacités d'accueil par l'insertion professionnelle directe des formations, d'abord parce que ce critère ne fonctionnerait pas, faute de faire le départ entre poursuite d'études et insertion. C'est la raison pour laquelle la notion de « perspectives d'insertion professionnelle », qui suppose de réfléchir sur le long terme et de prendre en considération l'émergence de nouveaux métiers et de nouveaux besoins en qualification a été retenue.
Je le dis très clairement : les perspectives d'insertion professionnelle n'ont rien à voir avec des taux d'insertion constatés. Il s'agit d'avoir une vision prospective large, qui ne peut permettre que de créer de nouvelles formations. C'est une évolution majeure garantie par le texte issu de la CMP.
Plus profondément, nul ne peut réduire la mission de l'enseignement supérieur à la préparation à l'insertion professionnelle. Le rôle de l'université, sa vocation, est de créer le savoir, de le transmettre dans l'ensemble des champs disciplinaires, de se préoccuper de l'insertion professionnelle et de veiller à la diffusion de la culture scientifique et technologique. Telles sont les quatre missions piliers des universités. C'est pourquoi le projet de formation et de recherche des établissements doit être pris en compte. Les besoins académiques et scientifiques propres qu'il porte doivent être reconnus. La mention du projet de formation et de recherche figure clairement dans le projet de loi.
Enfin et surtout, le Gouvernement n'aurait pas pu accepter que les voeux des futurs étudiants ne soient pas le point d'entrée de la fixation de toute capacité d'accueil. C'est pourquoi leur projet de formation a été réintroduit dans le texte. C'était, dès le départ, le critère central, celui qui est au coeur de la réforme : développer une offre de formation qui permette à notre jeunesse de trouver et de choisir sa voie.
En lien avec les universités, ce sont les recteurs, sous mon autorité, qui seront amenés à fixer les capacités d'accueil. Dans le contexte démographique actuel, aucun mouvement à la baisse ne pourra bien évidemment être accepté. J'en suis la garante et le Gouvernement prendra toutes les dispositions nécessaires, y compris, s'il le faut, par la voie réglementaire, afin d'apporter toute la clarté nécessaire sur ce point.
D'ores et déjà, les recteurs travaillent avec les universités pour créer des places supplémentaires. Ce travail le montre : les capacités d'accueil augmentent fortement, tout particulièrement dans les filières qui étaient en tension, en STAPS – sciences et techniques des activités physiques et sportives – , en droit ou en PACES – première année commune aux études de santé.
L'essentiel, c'est la consécration d'un principe d'accompagnement vers la réussite pour tous les étudiants, avec des établissements d'enseignement supérieur qui sont d'ores et déjà en train de se saisir de ces nouveaux outils pour accueillir plus largement les futurs bacheliers dans toute leur diversité. Le « oui, si », qui est au coeur de ce projet de loi, est la traduction très concrète de l'engagement des établissements, au service de la réussite de tous les étudiants. Je serai très attentive à ce que chacun des futurs bacheliers puisse effectivement bénéficier de cet accompagnement.
Je suis allée à la rencontre des équipes pédagogiques tout au long des dernières semaines, à Strasbourg, à Marseille, à Bordeaux, à Nantes ou à Lyon. J'ai vu plus de 80 % des présidents d'université. Je peux vous confirmer que les enseignants-chercheurs sont partout à pied d'oeuvre pour penser, construire et proposer de véritables parcours de réussite. Je tiens à saluer leur travail devant la représentation nationale car il est tout simplement remarquable.
L'essentiel, c'est la garantie apportée par l'État, au travers d'un recteur, qu'une proposition sera faite à chacun, au plus près de ses voeux. L'essentiel, c'est un effort inédit au service de la santé étudiante. L'essentiel, c'est une année de césure désormais ouverte à tous les étudiants.
Ce projet de loi constitue un progrès majeur pour l'ensemble des étudiants. Son ambition est de faire à la jeunesse toute sa place, au centre d'un enseignement supérieur aux portes largement ouvertes à tous ceux qui souhaitent le rejoindre et de prendre en compte les besoins, les attentes et les exigences de nos étudiants. C'est tout le sens de ce texte, que le Gouvernement vous invite à adopter.